Les textes portant réconciliation nationale excluent les responsables, sans les nommer, de la violence armée. L'ancien chef de l'Armée islamique du salut (AIS, branche armée de l'ex-FIS, Ndlr) a estimé que les textes de loi portant réconciliation nationale ont « en deçà des attentes» été formulés par les leaders de l'ex-FIS. «En fait, nous nous attendions à trouver mieux que les textes lapidaires formulés dans le projet de Charte, et il n'en est rien. Les mêmes textes ont été reformulés, les mêmes exclusions reconduites et les mêmes attitudes reportées» a-t-il affirmé, hier, à L'Expression lors d'un entretien téléphonique. «Bien sûr, les repentis, dans le cadre de la concorde civile ou dans le cadre de la loi de la rahma, sont remis dans leurs droits, tout comme le fait d'indemniser les familles touchées par la tragédie nationale ou de protéger de tout propos malveillant ceux qui ont bénéficié des mesures de grâce ou d'extinction des poursuites. Tout cela est bien, et évalué à sa juste valeur. Mais que dire du texte portant exclusion pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la violence de toute activité politique future ? Qui sont ces responsables? Qui l'est et qui ne l'est pas? C'est équivoque. En fait, il s'agit d'un carton rouge soigneusement caché et qui peut être brandi à chaque instant pour exclure ou sanctionner.» Madani Mezrag, qui rentre des Emirats arabes unis, où il a participé à un débat télévisé, et qui passera, demain, sur la chaîne satellitaire Al Arabiya, pense que dans une semaine, les textes passeront en Conseil des ministres et il y a lieu de faire du lobbying «pour essayer de rattraper ce qui peut être rattrapé». En réalité, à bien y lire, les nouveaux textes ne sont ni plus restrictifs ni plus répressifs que ceux déjà formulés dans le projet de Charte portant paix civile et réconciliation nationale. Les nouveaux textes de loi - chapitre 3-3 - énoncent des mesures pour prévenir la répétition de la tragédie nationale et qui interdisent l'activité politique sous quelque forme que ce soit pour toute personne responsable de l'instrumentalisation de la religion ayant conduit à la tragédie nationale, ainsi que pour quiconque ayant participé à des actions terroristes, refuse toujours de reconnaître sa responsabilité dans la conception et la mise en oeuvre d'une politique prônant la violence. Si l'on se réfère au dernier paragraphe, on peut y déceler un peu plus de restriction par rapport à la Charte, publiée et diffusée le 14 août 2005, mais l'esprit reste le même: éloigner de toute activité politique ceux qui se sont engagés dans la violence contre l'Etat, et plus, éloigner ceux-là de tout contact avec les citoyens. Ce qui reste «ouvert» est énoncé au septième chapitre du projet d'ordonnance, et qui, « en vertu du mandat qui lui a été conféré par le référendum du 29 septembre dernier, et conformément aux pouvoirs qui lui sont dévolus par la Constitution», permet au président de la République de prendre à tout moment toutes les autres mesures requises pour la mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Cette «issue» permet au président de procéder, à tout instant et autant qu'il le jugera nécessaire, à des corrections, rajouts ou suppressions de mesures. Tirant ce pouvoir autant de la Constitution que du plébiscite du 29 septembre 2005, le président se laisse une marge de manoeuvre confortable et pourra, à son aise, apporter les rectificatifs qui s'imposent, tout en gardant un contact privilégié avec toutes les parties du conflit.