Pour Boukhamkham, la trêve de l'AIS avait, d'emblée, permis de situer les enjeux. Abdelkader Boukhamkham, un des sept derniers «fondateurs légalistes» de l'ex-FIS (avec Abassi Madani, Ali Benhadj, Ali Djeddi, Chigara, Guemazi et Omar Abdelkader, ndlr). Pourquoi lui, pour parler de la trêve de l'AIS? Parce que, tout simplement, il est l'un des plus proches amis de Madani Mezrag et celui qui, de l'aile politique de l'ex-FIS, avait soutenu à fond les accords de l'AIS avec l'armée. Pour Boukhamkham, la trêve de l'AIS avait, d'emblée, permis de situer les enjeux. «Pour la plupart des éléments de l'AIS, c'étaient des cadres du FIS, et en tant que tels, ils avaient une certaine écoute des intérêts du pays. En répondant à l'appel de la direction du FIS, de déposer les armes - en 1997 -, l'AIS avait contribué à esquisser un début de sortie de crise, en même temps qu'elle avait mis à nu les éléments du GIA, que je refuse de reconnaître comme des islamistes ayant fait partie du FIS. Remarquez, qu'à chaque fois que la réconciliation nationale commence à prendre le pas sur les dispositions belliqueuses des uns et des autres, nous assistons à une effroyable recrudescence de la violence. Une recrudescence pour ramener les choses au point zéro. Là, je soulève des interrogations à profusion...» Quelles peuvent êtres les prochaines étapes pour consacrer la réconciliation nationale ? Boukhamkham répond: «La libération de Abassi Madani et Ali Benhadj peut constituer un autre pas vers la paix, ne serait-ce que parce qu'elle va mettre à nu les desseins de ceux qui, dans les maquis, continuent à tuer au nom du FIS...» Et si toutes les voies de recours ont été essayées sans que les deux chouyoukh arrivent à saisir ces opportunités? «C'était une époque, nous en vivons une tout autre. Les esprits se sont calmés et les tensions apaisées», répond cheikh Abdelkader. Abordant l'avenir de la paix, qui semble battre de l'aile, Boukhamkham estime qu'«il faut aller vers la réconciliation nationale au plus vite, car le temps presse, et plus le temps passe, plus les fils s'enchevêtrent pour devenir quasiment inextricables». Les accords AIS-ANP n'ont-ils pas, en fait, consacré la prépondérance de l'aile militaire sur la direction politique? «Non , répond cheikh Abdelkader, jamais ces accords n'auraient eu lieu sans l'aval, l'appui et la bénédiction de la direction politique de l'ex-FIS. Madani Mezrag, de par sa présence sur le terrain, avait mené les tractations et pesé de tout son poids sur les éléments armés, mais il n'agissait pas de son propre chef et avait une écoute attentive aux orientations de la direction politique». Enfin, «il ne faut pas que la haine qui a touché la génération actuelle touche aussi celle qui viendra, faisant transmettre le virus de la discorde aux enfants, après avoir complètement miné leurs parents. Pour ce faire, il faut éviter de faire de grandes différences entre victime et victime. Tous ont été victimes d'une grave dérive politique et tous aspirent et ont droit de vivre en paix. Les solutions politiques restent de mise, et rien ne doit nous faire oublier l'impératif de paix».