A la veille de chaque réunion du Conseil de sécurité, le Royaume enclenche une «opération» du même genre. A un mois de l'étude du dossier du Sahara occidental par le Conseil de sécurité, le climat dans la région s'est considérablement «alourdi» ces derniers jours. Répression policière contre des étudiants sahraouis, annonce de la visite à El-Ayoun de Mohammed VI et revendication d'une bonne partie du Sud-Ouest algérien, notamment la wilaya de Béchar, par un petit parti marocain, constituent les ingrédients de la «recette marocaine» destinée à empoisonner le processus d'autodétermination. Celui-ci, entamé en 1991 avec les accords de Houston, arrive à une phase critique, au sens où l'ONU est appelée, d'une manière ou d'une autre, à trancher cette affaire de décolonisation. La stratégie marocaine n'est en fait pas nouvelle, puisqu'à la veille de chaque réunion du Conseil de sécurité consacrée à la question du Sahara occidental, le Royaume enclenche une «opération de provocation» du même genre. Et pour cause, les «revendications territoriales» sur le Sud-Ouest algérien ne datent pas d'hier. De même pour les «visites» du roi dans la région, objet de conflit avec la République sahraouie. En 2002, Mohammed VI s'est rendu à El-Ayoun pour y déclarer qu'il ne renoncerait «jamais à un seul pouce du territoire de son Sahara inaliénable et indivisible». Un leitmotiv dans le discours du royaume alaouite qui renseigne sur l'importance pour le trône de maintenir la situation de flou en l'état pour sauvegarder le fragile équilibre politique autour de la royauté au Maroc. La prochaine visite annoncée poursuit le même objectif et il est certain que le Makhzen tentera d'exploiter le climat électrique qui en résultera pour maintenir un statu quo, dommageable pour tout le Maghreb. Une stratégie qui semble quelque peu dépassée par l'évolution de la situation politique dans toute la région. En effet, partie intégrante de la préoccupation sécuritaire des Etats-Unis, l'Afrique du Nord et le Sahel constituent l'une des priorités US, dans le cadre de la lutte antiterroriste que mènent les Américains depuis septembre 2001. La stabilité de toute la région est, en ce sens, un objectif prioritaire. Cette donne transparaît dans les propos de David Welch tenus lors de sa visite avant-hier à Alger. Sur le conflit au Sahara occidental, le diplomate américain a déclaré que «comme tous les pays membres du Conseil de sécurité, les Etats-Unis sont très attentifs et suivent de près» cette question. «Par le passé, nous avons toujours appuyé les efforts internationaux visant à régler (le conflit au Sahara occidental) dans le cadre des Nations unies et nous croyons qu'il est important pour la sécurité et la stabilité de la région de parvenir à une solution». Une déclaration qui pèsera sans doute lourd en avril prochain en Conseil de sécurité. Cela dit, même si les arguments et autres «manipulations» du Maroc ne tiennent pas la route, le risque de voir le Conseil de sécurité reconduire le statu quo est probable, du fait que pour des raisons de stratégie, le royaume a, en France, une oreille attentive. Pour ce qui le concerne, le Front Polisario, dont la cause est soutenue par une bonne majorité des pays membres de l'ONU, s'en tient toujours au plan Baker et souhaite que le Conseil de sécurité parvienne à «mener à son terme le processus de décolonisation du Sahara occidental malgré l'intransigeance du Maroc», c'est ce que souhaite le président sahraoui, Mohamed Abdelaziz qui, dans une interview accordée à l'agence Reuter, affiche son espoir de voir «une nouvelle impulsion de la part du Conseil de sécurité afin d'amener le Maroc à accepter l'organisation d'un référendum au Sahara occidental». La prochaine réunion du Conseil de sécurité est pour le président sahraoui un «motif de satisfaction et d'espoir». Un optimisme qui ne l'a pas empêché de dénoncer fermement l'intention du roi du Maroc de se rendre au Sahara occidental.