La nomination de Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN, à la tête du gouvernement aura été une surprise d'autant plus brève qu'elle a été suivie par l'annonce d'une reconduite pure et simple de l'équipe sortante, jusqu'alors drivée par Ahmed Ouyahia. Cette nouvelle a, par contre, suscité maintes interrogations et bien des étonnements dans les milieux politiques, surtout que le nouveau chef du gouvernement avait énoncé sa détermination à engager sans délais des consultations dans le but de former une «nouvelle équipe gouvernementale». De ces coups de théâtre annoncés, on retient que le nouveau patron de l'Exécutif va devoir relever le pari, contesté par tout le monde à son prédécesseur, d'être juge et partie, en organisant les prochaines échéances électorales, les législatives de 2007. Auparavant, Belkhadem aura, sans doute, à coeur de concrétiser son programme de prédilection qui a trait à la révision de la Constitution, de manière à lever la contrainte de la limitation du mandat présidentiel, tout en donnant des gages aux travailleurs qui ne sont pas mécontents de sa désignation puisqu'il s'était clairement heurté à Ahmed Ouyahia en se prononçant en faveur de l'augmentation des salaires. Dans un tel contexte, on relève que l'ancien ministre d'Etat, représentant personnel du président de la République, et néanmoins ministre des Affaires étrangères, avait marqué de sa présence indélébile un large pan de l'action extérieure de notre pays. Tout récemment, son rôle a été indirectement salué par le secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, qui a reconnu que l'Algérie a contribué, durant sa mandature, à une indéniable modernisation de l'Organisation panarabe tant dans sa structuration que dans son fonctionnement. Qu'il s'agisse des pays arabes ou islamiques, Abdelaziz Belkhadem a eu en charge la gestion de la diplomatie algérienne au point d'apparaître, à son corps défendant, comme le ministre bis des Affaires étrangères, le titulaire du portefeuille Mohamed Bedjaoui s'occupant des pays occidentaux et sud-américains, entre autres, tandis que Abdelkader Messahel restait dévoué aux causes maghrébines et africaines. Aussi étrange que cela puisse paraître, cette stratégie tricéphale semble avoir considérablement réussi puisque la diplomatie algérienne a réalisé, durant l'année écoulée, des performances exceptionnelles qui témoignent de son efficience et de son volontarisme. Belkhadem en charge du gouvernement, la diplomatie algérienne paraît orpheline de sa gestion arabe et islamique. Qui va conduire la politique extérieure sur ce terrain? Qui va devoir s'atteler aux dossiers multiples et lourds qui concernent les enjeux de la Ligue arabe, de l'OCI, sans compter plusieurs questions telles que le retour de la paix au Soudan ou le soutien à la cause palestinienne? Apparemment, le sujet n'a pas été abordé puisque la place, certes spéciale, qu'occupait le représentant personnel du président Bouteflika demeure vacante à El Mouradia. Est-ce à dire que le ministre des Affaires étrangères, Mohamed Bedjaoui, va devoir hériter de ces importantes missions qui requièrent une large disponibilité? Si c'est le cas, cela ne pourra se faire qu'au détriment des dossiers, peut-être plus importants encore, de la coopération avec l'Union européenne, les Etats-Unis et les pays émergents d'Asie et d'Amérique latine pour lesquels le ministre des Affaires étrangères a déjà beaucoup à faire. Cette problématique est en effet cruciale, sachant que Abdelaziz Belkhadem a marqué de son empreinte l'action, en ce domaine, du ministère des Affaires étrangères, d'abord en sa qualité de ministre officiellement en charge du porte-feuille, puis comme homme de l'ombre et proche parmi les proches du président Bouteflika qui ne désigne pas, pour une telle mission, n'importe quel commis. La réussite de cet homme austère et pragmatique est difficilement contestable si l'on en juge par l'attention que portent à l'Algérie et à sa politique sur nombre de problèmes internationaux, les pays arabes et musulmans, au Moyen-Orient et en Asie. Celui qui aura à assumer sa succession va rapidement se rendre compte du poids réel et de la prégnance que Abdelaziz Belkhadem, réputé discret et...marqué par l'épisode des barbéfélènes, détient dans les arcanes de ces pays «compliqués». Toujours est-il que la question de sa succession demeure entière et que la nécessité d'y répondre interpelle le président de la République qui doit, sans doute, songer à désigner un...nouveau représentant personnel qui hériterait de cet important dossier, auquel cas le futur commis devrait avoir une certaine expérience de la diplomatie et des enjeux du monde arabe et islamique.