La machine de la fraude est tellement rodée qu'elle répond au quart de tour. Le président du mouvement El Islah, Abdallah Djaballah, est un responsable politique qui ne se fait pas de doute. Il est convaincu que les élections législatives de 2007 seront truquées. Aussi, a-t-il soutenu, hier, que la fraude entachera cette première échéance électorale qui sera organisée sous la férule de Belkhadem. «La fraude est devenue une culture chez des responsables de l'administration», a déclaré M.Djaballah. «Le problème ne se pose pas en termes de textes de lois mais c'est une question de culture», a-t-il dit ajoutant que cette fraude «commence à un niveau supérieur de la hiérarchie de l'administration, à savoir les walis». Pour Djaballah, la machine de la fraude est tellement rodée qu'elle répond au quart de tour. «Le pouvoir en place qui a ses propres partis politiques, n'a pas besoin d'ordonner la fraude aux commis de l'Etat, ils savent eux-mêmes ce qui les guette comme représailles s'ils ne se plient pas aux appétits de ce même pouvoir qui les nomme, les protège et les affecte où il veut». Ce n'est pas un discours politique destiné à dissuader de l'idée de fraude, à avertir contre cette tentation. C'est une conviction, une reconnaissance officielle de cette entorse à la pratique démocratique. Plus encore, M.Djaballah est convaincu qu'il y a environ «trois millions de voix de plus» sur le fichier électoral. Cependant, Abdallah Djaballah qui participe depuis 1997 à ces «élections truquées», affirme que cette question fera l'objet d'un militantisme durant les mois à venir au sein de son parti. Dans ce contexte de «fraude omniprésente», Djaballah soutient malgré tout, que son parti est la deuxième force politique du pays derrière le FLN et dépassant le RND de quelque 100.000 voix. Si le pouvoir a ses propres partis, comment se fait-il alors qu'il se classe en meilleure position que le RND qui traîne le boulet «du parti de l'administration?». Le peuple a fait son choix, répondra-t-on. Soit, mais en termes de responsabilité politique et historique, le MRN, à travers son premier responsable, vient d'avouer qu'il cautionne, même indirectement, une pratique qui se répète depuis dix ans. Mais rompu à l'art de l'esquive, M.Djaballah se décharge de cette responsabilité. Il donne l'impression d'être persécuté, que des complots sont tramés dans les hautes sphères du régime pour le détruire et que d'autres partis tentent continuellement de le déstabiliser. Il semble affectionner cette stratégie du danger qui vient de l'extérieur, de l'ennemi virtuel omniprésent. Ce qui fait qu'il demeure toujours en alerte. «Nous savons que d'un jour à l'autre, le régime peut nous atteindre surtout s'il nous trouve une zone de faiblesse». Et Djaballah ne baisse pas la garde, notamment sur la question de savoir si son parti accepte sur ses listes électorales des éléments du FIS dissous où des ex-émirs des groupes armés. «Notre parti est ouvert à tout le peuple algérien et nous ne faisons pas de l'ancienneté une condition primordiale pour confectionner nos listes électorales», se dévoile-t-il puis il ajoute: «Madani Mezrag a déjà affirmé qu'il se présenterait sous les couleurs du FLN. Quant aux responsables du FIS dissous, ils n'ont jamais cautionné Djaballah». Par ses propos, le chef du parti El Islah qui se revendique d'être la deuxième force du pays, traduit toute la fragilité de la classe politique nationale et, par là, du processus démocratique en Algérie face à un régime qui se renforce chaque jour davantage.