Le bilan mitigé des «six mois d'essai» n'a pas été à la mesure des attentes suscitées. «Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, prendra les mesures qu'il jugera opportunes pour apporter les correctifs nécessaires à la réconciliation nationale, en vertu de ses droits constitutionnels et du mandat que lui a conféré le plébiscite populaire du 29 septembre 2005», nous a confié hier, une source proche de la Présidence. La période de grâce accordée aux groupes armés arrivent à terme, les leaders islamistes, installés à l'étranger, et qui avaient promis de rentrer au pays, ne l'ont pas fait et les critiques contre certaines mesures de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale n'ont pas cessé depuis sa publication et les débats qui ont suivi. Bilan mitigé s'il en est, mi-figue, mi-raisin, processus qui a perdu son attrait chemin faisant, le projet de la réconciliation laisse sceptique, et on comprend, dès lors, le silence du président de la République sur le sujet. Initiateur, concepteur et principal levier du projet, élaboré «dans un milieu hostile», Bouteflika ne se suffira certainement pas des «250 à 300 repentis», et dont la trêve ne s'est pas traduite par une embellie sécuritaire notable. Il devait certainement penser à cela en laissant dans le septième et dernier chapitre, sorte de prologue de la Charte, une «porte de secours», qui prévoyait qu'«en vertu du mandat qui lui a été conféré par le référendum du 29 septembre 2005, et conformément aux pouvoirs qui lui sont dévolus par la Constitution, le président de la République pouvait, à tout moment, prendre toutes autres mesures requises pour la mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale». De ce fait, le FLN et le MSP, principaux alliés du Président pour la réconciliation, semblent en train de préparer le terrain à d'éventuelles «retouches» aux fins d'attirer plus d'islamistes concernés par la Charte. Ces deux partis parlent depuis deux mois déjà de la possibilité de prolonger les délais fixés afin de permettre à d'autres terroristes de quitter les maquis, et suggèrent que, de la sorte, la réconciliation aura de meilleurs effets. Le retour des leaders islamistes à l'étranger et auquel le président de la République semblait tenir au plus haut point, ne s'est pas fait. Ni Rabah Kebir, ni Abdelkrim Ghemati, ni Ould Adda, ni Noui, et encore moins Anouar Haddam et le «groupe de Londres», un des plus importants, n'ont regagné Alger. Leur retour, et qui aurait donné de la crédibilité et de la consistance à l'offre de paix du président Bouteflika, se fait attendre. Au début de l'été, l'optimisme était réel et la plupart des chefs islamistes que nous avions alors contactés nous avaient affirmé leur intention de rentrer au pays. Certains avaient même avancé des dates précises et qui tournaient autour du 15-20 juillet 2006. Depuis lors, il semble que des obstacles ont surgi, car tout de suite il y eut une flambée des actes liés au terrorisme et le débat s'est effacé, donnant lieu à des interprétations plus alambiquées les unes que les autres. Ainsi, et hormis des signes positifs signalés ici et là, rien n'a pu être ajouté à ce qui a été déjà fait auparavant. Le délai de grâce, accordé aux différents groupes armés, tire à sa fin, mais peut être reconduit pour une autre durée limitée, si le président juge que certaines voies de recours pourront être exploitées pour inciter les terroristes à quitter les maquis. C'est dire que le bilan de six mois de réconciliation nationale, même si les autorités en font un éloge prononcé, reste en deçà des attentes suscitées et se dessine en clair-obscur. Il y a quelques jours, le ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, affirmait que quelque 40.000 dossiers ont été reçus par la Commission nationale chargée de la mise en oeuvre de la Charte pour la paix et la réconciliation nationale, alors que le 28 juin, il soulignait, à Cherchell, lors du passage du président de la République aux cérémonies annuelles des sorties des promotions, à l'Académie militaire inter-armes, que les mesures proposées, lors de la dernière rencontre gouvernement-walis, seront mises en application «à partir de la fin de l´été ou au plus tard en décembre 2006», lesquelles comportent aussi des volets relatifs à la prise en charge des victimes de la tragédie nationale.