«Nous sommes les premiers à nous soucier de la sécurité de notre pays...» affirme Anis Rahmani. Le procès pour diffamation intenté par le Guide de la révolution libyenne, Mouamar El Gueddafi, contre le quotidien arabophone Echourouk, représenté par son directeur Ali Fodil et la journaliste auteur des articles incriminés signés Naîla B, aura lieu mardi prochain au tribunal d'Hussein Dey. Ce procès en citation directe fait suite à la requête déposée par le représentant du Guide libyen à Alger, M.Abdelmoula Salem Ghodbane, secrétaire du bureau de l'amitié arabe algéro-libyen. Deux avocates sont chargées du dossier, côté plaignant, il s'agit de maître Nabih Hacina et Mouna Amimour. L'objet de cette requête est la diffamation et concerne deux articles publiés par le journal arabophone dans ses numéros 1757 et 1762 parus respectivement le jeudi 03/08/2006 et le 12/08/2006, ayant traité de l'implication du colonel El Gueddafi dans les tractations avec la communauté touaregue d'Algérie ayant conduit à des tensions dans la région. La presse avait largement commenté le projet de création d'un Etat sahélien sur un territoire à grande concentration de la communauté targuie, à cheval entre trois pays, à savoir l'Algérie, le Niger et le Mali. Le journal avait rapporté des témoignages de membres influents de la communauté touarègue qui n'auraient pas apprécié l'attitude des autorités libyennes qui auraient envoyé des émissaires pour nouer des contacts avec les notables de la région de l'Ahaggar englobant les régions de Tamanrasset et Djanet. Le sujet avait même suscité l'intérêt de la presse internationale alertée par le regain de violence dans la région du Sahel, particulièrement dans le nord du Mali avec la rébellion du mouvement du 23 Mai contre les autorités de Bamako et le sud algérien qui a enregistré une recrudescence dans les activités terroristes du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc). La partie libyenne reproche à la journaliste, auteur de l'article, de faire dans «la propagande» et réfute toutes les informations contenues dans les articles publiés qui seraient «sans fondement» et «sans preuves». Articles qui touchent à la «notoriété de la victime et à celle de son pays» et qui sont «dangereux car mettant en danger la sécurité des deux pays» et «nuisent aux relations entretenues entre l'Algérie et la Libye». De ce fait, la partie plaignante demande «d'obliger la publication à faire paraître un démenti officiel dans dix journaux nationaux et de garder le droit de demander des réparations», présumant de l'issue du procès. Toutefois dans l'une de ses déclarations faites à Tombouctou (Mali) même à la mi-avril 2006, le Guide de la révolution appelait les Touareg à l'unité pour la fondation d'un Etat du grand Sahara. L'Agence France Presse avait, elle aussi, fait état d'une réunion tenue le vendredi 21 avril 2006 entre une délégation d'officiels libyens, maliens d'un côté et des autorités administratives, des notables et des ex(combattants de la rébellion targuie de Kidal (nord est du Mali), de l'autre information recueillie auprès des autorités maliennes. De son côté, le directeur de la rédaction d'Echourouk, Anis Rahmani, que nous avons contacté pour connaître la position du journal dans ce conflit, inédit, opposant un chef d'Etat étranger à un organe de presse national, pense que toute «la partie libyenne, vise à travers, cette agitation de se justifier auprès des autorités algériennes et montrer ainsi les bonnes intentions du Guide de la révolution libyenne envers notre pays», tout en insistant sur «la véracité des informations publiées recueillies auprès des autorités politiques et morales de la communauté targuie de la région et qui sont prêtes à témoigner». Notre interlocuteur s'étonne de l'attitude de la partie plaignante qui dit qu' «elle se soucie de la sécurité de l'Algérie» et de lui répondre que «nous, Algériens, sommes les premiers à nous soucier de la sécurité de notre pays et de la défense de ses intérêts, et sur ce plan le Guide libyen est mal placé pour nous donner des leçons». Tout en rappelant que «la position du journal et des journalistes d'Echourouk est celle des citoyens touareg algériens dont nous défendons les intérêts. Elle est indépendante et n'a rien à voir avec la position officielle du gouvernement algérien». Le directeur de rédaction s'interroge déjà sur les suites à donner aux décisions de justice qui seront prises, «la justice algérienne a jugé recevable la requête du Guide libyen, et je m'interroge sur l'application des sanctions qu'elle prononcera à l'encontre de la partie plaignante s'il s'avère que les informations publiées sont fondées et confirmées par les témoignages, en sachant que les lois de la République algérienne interdisent les articles irrévérencieux à l'égard des chefs d'Etat étrangers, ce qui en quelque sorte confère l'immunité au Guide de la révolution libyenne». Car il faut bien savoir qu'une plainte jugée sans fondement est assimilée à un outrage à la justice. Anis Rahmani nous fera savoir que le journal sera représenté par un collectif d'avocats, dont Me Medjhoud et Berghal, qui fera appel aux témoignages de personnalités et de notables de la communauté targuie.