Il n'a pas toujours été facile de décomplexer les relations multiformes entre la France et l'Algérie. Hubert Colin de Verdière aura-t-il été l'ambassadeur français qui aura le plus marqué son passage en Algérie? Il aura suffi d'une phrase, prononcée à Sétif, à l'université Ferhat Abbas, sur les événements du 8 mai 45, à propos desquels il avait employé le terme de massacre et de tragédie. C'est que cela venait après l'engagement pris par les présidents Bouteflika et Chirac de signer un traité d'amitié entre les deux pays pour lancer les bases d'un partenariat d'exception bilatéral. Pourtant, le 23 février 2005, l'Assemblée nationale française adoptait la loi qui faisait l'apologie du rôle positif de la colonisation, notamment en Afrique du Nord. La déclaration de l'ambassadeur de France, venant juste après l'adoption de cette loi controversée, montrait toute la difficulté à aborder en toute sérénité les questions liées à la mémoire et à l'histoire commune. A l'évidence, les Algériens, et une partie des Français, ne voient pas de la même manière les mêmes événements. Et pourtant, comme l'a affirmé le président Chirac lui-même: «Une nation se grandit à reconnaître ses erreurs.» Est-ce que ce qui est bon pour l'Arménie ne l'est pas pour l'Algérie? Mais bien entendu, la mission de l'ambassadeur de France en Algérie ne consistait pas seulement à recoller les morceaux d'une mémoire éclatée, mais ce n'était là que l'un de ses aspects. Entre la France et l'Algérie, les domaines de la coopération sont multiples, et M.Colin de Verdière a eu à en gérer, à son niveau, toute la complexité. Au sommet de la pyramide de cette coopération, se trouve celle de la circulation des personnes. Depuis le début des années 90, soit depuis le début de l'insécurité en Algérie, la procédure d'attribution des visas a été particulièrement durcie à l'égard des Algériens. Des chaînes monumentales se font devant le consulat général de France, à Hydra. Les délais pour établir les visas sont par ailleurs trop longs. Les dossiers sont traités avec une lourdeur presque humiliante. L'ambassadeur Hubert Colin de Verdière a mis un point d'honneur à alléger les procédures et à améliorer l'accueil au niveau du consulat général, même s'il y a encore beaucoup à faire, les numéros de téléphone mis à la disposition des demandeurs de visa ne fonctionnant pas toujours au top. Et puis, bien sûr, il y a des aspects de cette procédure qui échappent au consulat général lui-même, puisque ils dépendent soit du quai d'Orsay, soit même de l'espace Schengen, toutes les contraintes auxquelles ne sont pas soumis les ressortissants des autres pays maghrébins, à savoir les Tunisiens et les Marocains. On peut donc reconnaître que M.Colin de Verdière a fait ce qu'il a pu de son côté pour améliorer les choses. Juste après la circulation des personnes viennent les échanges commerciaux, et là bien sûr, la France reste, bon an mal an, le premier fournisseur de l'Algérie, vu la proximité géographique, les habitudes de consommation et les circuits d'échange existant entre les deux rives de la Méditerranée. Sur le plan économique, par contre, les investissements directs français en Algérie ne se sont pas développés au rythme souhaité par les deux parties, c'est-à-dire qu'au fond, il y a toujours cette frilosité des opérateurs qui vient refroidir l'ardeur des politiques. Mais, bon, on pourra dire que l'ambassadeur aura fait ce qu'il a pu pour que l'image de l'Algérie, longtemps classée dans la zone rouge outre Méditerranée, soit rehaussée et mise au niveau des exigences et de la qualité des relations entre les deux pays. On citera à ce propos, le fait que la Coface se soit installée en Algérie et le fait que dans le domaine culturel, des efforts méritoires sont faits, malgré la défection en pleine coupe du monde du canal TPS. Le plus curieux étant que les chaînes publiques comme France 2 et France 3 aient suivi le mouvement. Est-ce un simple dysfonctionnement. On peut espérer que dès son retour en France, l'ambassadeur qui reste attaché aux bonnes relations algéro-françaises attirera l'attention de qui de droit pour aplanir ces accrocs audiovisuels.