Le ministère syrien des Affaires étrangères a annoncé, hier, l'ouverture d'une «nouvelle page» dans l'histoire du pays, marquant une rupture avec les 24 ans de Bachar al-Assad. Dans un communiqué officiel, le ministère a souligné que cette nouvelle phase serait celle de la «justice et de l'égalité», où tous les Syriens, unis par un pacte national, jouiront de leurs droits et accompliront leurs devoirs, sans être divisés par des idéologies uniques. «La citoyenneté sera désormais le fondement de notre société», a affirmé le communiqué. Le Premier ministre syrien, Mohamed al-Jalali, a affirmé qu'il avait coordonné avec les autorités militaires pour assurer la protection des institutions publiques, et que la majorité des ministres restaient à Damas, où des discussions sont en cours pour gérer la période de transition. Parallèlement, le ministre syrien de l'Industrie, Samer Khalil, a annoncé la réouverture de plusieurs installations industrielles à Alep, assurant que des mesures sont prises pour garantir la continuité des services publics. Le Premier ministre syrien, Mohamed al-Jalali, s'est dit prêt à coopérer avec le tout nouveau «leadership» choisi par le peuple, précisant qu'il serait-dimanche matin-dans ses bureaux au siège du gouvernement pour toute procédure de «passation» de pouvoir. -Les pays arabes suivent de près la situation L'Arabie saoudite a appelé à des efforts concertés pour empêcher la Syrie de sombrer dans «le chaos et la division», après la chute du président Bachar al-Assad chassé du pouvoir par des rebelles islamistes. «Le royaume affirme son soutien au peuple syrien frère et à ses choix» et «appelle à des efforts concertés pour préserver l'unité de la Syrie et la cohésion de son peuple, de manière à l'empêcher de sombrer dans le chaos et la division», a affirmé le ministère saoudien des Affaires étrangères dans un communiqué. Dans les premières réactions de pays arabes au départ de Bachar al-Assad, l'on retrouve l'Irak qui a appelé, hier, au «respect» de la volonté du peuple syrien et de l'intégrité territoriale de la Syrie voisine. «L'Irak affirme la nécessité de respecter la volonté de tous les Syriens et souligne que la sécurité, l'intégrité territoriale et l'indépendance de la Syrie sont d'une importance capitale», a déclaré le porte-parole du gouvernement, Bassim Alawadi, dans un communiqué. Les Emirats arabes unis, par la voix d'un haut responsable, ont exhorté les Syriens à «travailler ensemble» pour éviter «le chaos», «Nous espérons voir les Syriens travailler ensemble et ne pas assister à un nouvel épisode de chaos», a déclaré Anwar Gargash. L'Iran a vu sa diplomatie appeler le «gouvernement syrien et les groupes d'opposition légitimes» à entamer des négociations. Cette déclaration au Qatar du ministre des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, avait semblé marquer un changement de ton de l'Iran. À Beyrouth, le Premier ministre libanais Najib Mikati a, quant à lui, souligné que la priorité était de «renforcer le contrôle de la situation aux frontières» et que le Liban «reste à l'écart» des «répercussions des développements en Syrie». La Jordanie dit respecter «les choix» des Syriens et appelle à «éviter le chaos». Le Qatar a déclaré qu'il «suivait de près les développements en Syrie» et a souligné «la nécessité de préserver les institutions nationales et l'unité de l'Etat pour l'empêcher de sombrer dans le chaos». - En Europe... D'autres pays, notamment européens, ont rapidement réagi aux événements. La Russie a affirmé qu'Assad a «démissionné de son poste» et quitté le pays. A déclaré la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova. Le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, a déclaré, hier, que les acteurs internationaux et régionaux devraient assurer une transition en douceur en Syrie après la chute de Damas et le départ de Bachar al-Assad. «Nous devons travailler très dur avec le peuple syrien.» a-t-il dit. La France «salue» la chute du régime de Bachar al-Assad après «plus de 13 ans d'une répression d'une grande violence contre son propre peuple», et appelle les Syriens à rejeter l' «extrémisme», a réagi le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Christophe Lemoine. En Allemagne, le chancelier Olaf Scholz a qualifié de «bonne nouvelle» la fin du régime de Bachar al-Assad en Syrie, tout en appelant à la protection de tous les groupes religieux et minorités du pays et à une solution «politique». La ministre des Affaires étrangères (MAE), Annalena Baerbock, a de son côté mis en garde contre le risque de voir arriver d'autres radicaux au pouvoir. Aux Etats-Unis, le porte-parole du Conseil national américain de sécurité Sean Savett a déclaré dans la nuit que «le président Biden et son équipe suivent attentivement les évènements extraordinaires en Syrie et sont en contact permanent avec nos contacts régionaux». Notons que pour Donald Trump, qui prendra ses fonctions de président des Etats-Unis le 20 janvier, Bachar al-Assad «a fui» la Syrie après avoir perdu le soutien de son protecteur, la Russie. Londres, par la voix de la vice-Première ministre travailliste Angela Rayner, a dit souhaiter «voir les civils et les infrastructures protégés (car) beaucoup trop de gens ont perdu la vie et nous avons besoin de stabilité dans cette région». L'Espagne, par la voix de son MAE José Manuel Albares, a également appelé à une solution pacifique en Syrie, pour une nouvelle stabilité au Proche-Orient. Les chiffres d'un désastre La guerre en Syrie, qui a débuté en mars 2011, a provoqué des conséquences humanitaires, économiques et sociales dévastatrices. Voici les principaux chiffres illustrant son impact: Bilan humain - près de 500 000 morts - plus de 100 000 disparus - environ 27 000 enfants et 27 000 femmes ont perdu la vie Déplacements forcés: - 13 millions de déplacés -6,8 millions de réfugiés à l'étranger, principalement en Turquie (3,6 millions), au Liban, en Jordanie et en Europe. - 6,5 millions de déplacés internes qui ont fui leurs foyers mais restent en Syrie. Infrastructure et économie - 60% des infrastructures détruites: hôpitaux, écoles, routes, et habitations ont été gravement endommagés. - pertes économiques estimées à 442 milliards de dollars (rapport de l'ONU, 2022). - 90% de la population vivent sous le seuil de pauvreté, selon les Nations unies. -des millions de Syriens dépendent de l'aide internationale pour survivre. Enfants et éducation - 2,4 millions d'enfants déscolarisés à cause des destructions et des déplacements. - un enfant sur deux est exposé à des traumatismes psychologiques en raison des violences prolongées.