Pierre Gemayel a été tué hier lors d'un attentat dans la banlieue de Beyrouth. L'assassinat, hier, du ministre libanais de l'Industrie, Pierre Gemayel, aggrave la crise au Liban qui se trouve dans une dangereuse impasse politique depuis l'accord donné la semaine dernière par le cabinet Siniora -d'où étaient absents six ministres dont cinq chiites- au statut du tribunal international devant juger l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, en février 2005. La mort, hier, de Pierre Gemayel, 34 ans en charge du département de l'Industrie, tué dans un attentat dans la banlieue de Beyrouth replonge, de fait, le Liban dans les pires moments qu'il a connus lors de la guerre (1975-1990). L'information de l'assassinat de Pierre Gemayel, fils de l'ancien président, Amine Gemayel, a circulé en milieu d'après-midi d'hier. Une source qui s'est exprimée sous couvert de l'anonymat avait tout d'abord annoncé que le ministre avait été grièvement blessé et transporté dans un hôpital de Beyrouth. Peu après, des sources sécuritaires avaient indiqué que «M.Gemayel a été grièvement blessé dans l'attentat. Evacué vers un hôpital, il a succombé à ses blessures». Au moment où nous rédigeons ces lignes, aucune indication n‘a été donnée quant à la manière dont l'attentat a été perpétré. Pierre Gemayel, chrétien maronite, 34 ans, est aussi le neveu du président assassiné en 1982, Bechir Gemayel. Pierre Gemayel fait partie de la majorité parlementaire anti-syrienne drivée par Saâd Hariri, fils du défunt Rafic Hariri. Saâd Hariri, qui donnait une conférence au moment de l'annonce de la mort du ministre de l'Industrie, a immédiatement accusé la Syrie, sans cependant la nommer, en déclarant: «Ils font ce qu'ils ont promis de faire, ils veulent assassiner tout homme libre au Liban». Première à réagir à l'assassinat de Pierre Gemayel, la chef de la diplomatie britannique, Margaret Beckett a fait part de sa «consternation» et a «condamné», au nom de la Grande-Bretagne, ce nouveau drame qui survient au Liban, indiquant: «Nous sommes consternés», faisant ressortir le fait qu'il y avait «déjà assez de problèmes au Liban». «C'est le genre d'action qui peut accroître la tension dans la région» a insisté Mme Beckett, soulignant «c'est profondément dommageable pour tout le monde dans la région.» De leur côté, les Etats-Unis ont, promptement, dénoncé hier l'assassinat du ministre de l'Industrie libanais, Pierre Gemayel, en qualifiant cet assassinat d' «acte de terrorisme». «Nous avons été choqués par cet assassinat, nous le considérons comme un acte de terrorisme», a déclaré le numéro trois du département d'Etat, Nicholas Burns, secrétaire d'Etat adjoint pour les Affaires politiques. L'assassinat de M.Gemayel intervient au moment où le gouvernement tentait de reprendre les choses en main, alors que l'opposition menaçait d'avoir recours aux manifestations pour avoir gain de cause. Appelant au dialogue, le Premier ministre, Fouad Siniora, qui a pris la parole devant des diplomates étrangers accrédités à Beyrouth, a mis en garde contre toute action qui pouvait envenimer la situation indiquant: «Nous devons être très prudents dans les circonstances actuelles, les tensions sont très vives». M.Siniora faisait alors le bilan des 100 jours qui ont suivi la guerre qu'Israël a livré contre le Liban qui a duré trente trois jours (du 12 juillet au 14 août). Fouad Siniora a dit, encore, que le Liban avait besoin de dialogue, indiquant: «Le cycle d'action et de contre-réaction ne fera qu'augmenter la pression et divisera davantage le pays (...). Nous avons besoin d'un dialogue ouvert et franc. Le dialogue est la seule façon de régler les différends et effacer le manque de confiance» entre les parties. Toutefois, l'aggravation de la crise politique a été induite par l'acceptation par le gouvernement Siniora du projet de statut du tribunal international devant juger l'affaire de l'assassinat de Hariri tel que proposé par le Conseil de sécurité de l'ONU. Le Hezbollah, et d'une manière générale, les chiites ont rejeté ce statut avec comme conséquence la rupture et la démission du gouvernement, le 11 novembre, de six ministres dont cinq chiites des mouvements Amal de Nabih Berri et du Hezbollah. Hier, avant l'annonce de l'assassinat de Pierre Gemayel, l'impasse politique était totale, faisant courir au Liban le risque d'être confronté à de nouvelles violences. L'assassinat du ministre de l'Industrie va crisper davantage les esprits et aggraver le fossé entre les parties libanaises.