Il s'est lancé dans la revente des véhicules volés et maquillés ainsi que dans l'immigration clandestine. L'émir Mokhtar Benmokhtar, chef de l'AIS ayant rallié le Gspc après la trêve entre Madani Mezrag et l'ANP, refuse de déposer les armes. Ce redoutable terroriste, né en 1970, a réussi à tisser tout un réseau «familial» et s'est introduit au sein des tribus et des nomades du Mali, Niger, Tchad et la Mauritanie. L'objectif du terroriste, selon des sources sécuritaires chargées de la lutte antiterroriste extérieure, est de gagner des hommes de confiance en créant une alliance qui se veut incontestable par des liens de parenté, mariage, complicité visant à préserver des intérêts nationaux et internationaux, et d'une pierre deux coups, se constituer une protection hermétique. Son objectif a été atteint vu que la région du Sahel se caractérise par l'insécurité et l'instabilité considérant l'immensité du désert. Selon les informations obtenues auprès des mêmes sources, Mokhtar Benmokhtar cherche à compenser le manque d'effectif au sein du Gspc, d'abord, pour renforcer cette organisation criminelle et ensuite pour déstabiliser l'Etat. Sous les directives d'Al Qaîda, Mokhtar Benmokhtar a été chargé d'internationaliser le mouvement terroriste. Et pour cela, les mêmes sources ont souligné que, par le biais de ses biens et argent, le tristement célèbre Mokhtar Benmokhtar a enrôlé au sein du Gspc des étrangers de différentes nationalités, des Maliens, Mauritaniens, Libyens, Nigériens, mais aussi des Marocains, nous dit-on. La stratégie semble avoir été étudiée par l'homme de main d'Oussama Ben Laden, Zawahiri. L'idée, bien sûr, est d'obtenir une «médiatisation mondiale». Il va sans dire que Mokhtar Benmokhtar était, de tout temps, un élément clé d'Al Qaîda en Algérie et le seul terroriste à être reconnu par cette organisation sanguinaire. En quelques années, il s'est transformé, en plus de son activité terroriste, en un véritable contrebandier et l'un des hommes les plus recherchés en Algérie, voire dans le monde. Des sources très au fait du dossier terroriste, ont confié que des relations auraient été tentées entre ce terroriste et Hadj Bettou, mais sans succès. Originaire du Sud, Mokhtar Benmokhtar, comme nous l'avons déjà rapporté dans nos précédentes éditions, agit entre M'sila, Biskra et le M'zab. L'individu sinistre, apprend-on de sources militaires, a été «renié» par les Mozabites pour ses actes criminels. Devenu un véritable brigand du désert, le criminel notoire a investi deux autres créneaux qu'il rajoute à ses activités de contrebandier. S'acoquinant avec ceux du Niger et du Mali surtout, il s'est lancé dans la revente des véhicules volés et maquillés ainsi que dans l'immigration clandestine. Le criminel active entre Azoua, dans la wilaya de Tamanrasset, où il détient une cache à Tamarat Iblis, à 70km de la frontière nigérienne et Oued Snif de Stal à Aoum Etouyour et El Meghaïer. Mokhtar Benmokhtar jouit de la complicité de certains dans l'Erg de Talmine à Adrar, à Ouled Aïssa, au nord de Timimoun et Kénadsa à Béchar. Une ville transit pour les candidats à l'immigration clandestine de personnes originaires d'Afrique subsaharienne. Ces lieux constituent pour Mokhtar Benmokhtar des plaques tournantes qui lui permettent ainsi qu'à ses mercenaires embrigadés de disposer de plusieurs caches pour des véhicules volés à l'étranger et aux entreprises opérant au Sahara. Les mêmes sources précisent qu'il dispose de complicités libyennes, nigériennes, maliennes et de riverains de la frontière marocaine. A ce propos, l'on apprend que Mokhtar Benmokhtar cherche à enrôler, également, des terroristes marocains activant au sein de l'organisation Djamaât Ettawhid et El Djihad pour un soutien logistique au profit d'Al Qaîda, ainsi que pour des objectifs idéologiques. Rappelons qu'en 2002, le Gspc avait tenté, tant bien que mal, d'entretenir une alliance entre El hidjra oua takfir marocaine et les terroristes algériens. Le projet avait été éventé par les services de renseignements algériens. A l'époque, et suite à une première tentative avortée, des dizaines de terroristes marocains ayant pratiqué le terrorisme en Algérie, suivant la doctrine de l'organisation criminelle El hidjra oua takfir, affiliée à Al Qaîda, sont retournés à leurs pays d'origine, pour prendre contact avec leurs principaux chefs et discuté d'une alliance. A l'époque, Hassan Hattab, Abdelkader Saouane et Salim El Afghani ont reçu des lettres leur proposant une alliance et un ressourcement au Maroc. Les terroristes marocains estimaient que le Maroc est déjà un territoire du grand khalifat. Plus de 160 terroristes devaient participer pour faire aboutir ce projet. Cependant, l'objectif étant dévoilé par l'ANP, les terroristes d'El hidjra oua takfir et le Gspc avaient essuyé un échec. Idem pour la seconde tentative où les renseignements fournis par un repenti et quatre terroristes arrêtés, en juillet 2002, à Traine, dans la wilaya de Saïda, ont permis aux services de sécurité de déjouer le projet. Cela dit, pour revenir aux activités de Mokhtar Benmokhtar, nos sources ont indiqué que les marques et le genre de véhicules auxquels s'intéresse ce criminel vont du 4x4 tout-terrain haut de gamme aux véhicules Mercedes et BMW, dérobés à l'étranger. Presque tous les véhicules qui circulent dans le pays sans papiers sont, en fait, l'objet du trafic auquel s'adonne Mokhtar Benmokhtar. Parmi ces véhicules, il s'agit même de camions frigorifiques. Ces derniers servent en même temps au transport des candidats à l'émigration clandestine. Le sinistre sanguinaire ne se contente donc plus de la contrebande de cigarettes. D'ailleurs, dans ce contexte, c'est-à-dire concernant le trafic de cigarettes, une guerre sans merci avait eu lieu entre Mokhtar Benmokhtar et Abderrezak El Para, quelque temps avant son départ au Sud. En effet, confortablement installé à Bir El Ater, le parachutiste déserteur a vu son appétit grandir. A la contrebande au trafic juteux du cheptel, il décide de monter une filière pour l'importation de cigarettes et l'exportation de résine de cannabis, qu'il reçoit de ses complices, installés à Tiaret, Relizane et Saïda. La cigarette étrangère, domaine de prédilection de contrebandiers du Sud, a fait réagir Mokhtar Benmokhtar, le parrain du cartel du Marlboro et autres marques de cigarettes. C'est alors que Mokhtar Benmokhtar décide de rencontrer Abderrezak El Para. La rencontre a eu lieu, en avril 2002. Chaque criminel était entouré de sa garde rapprochée, puissamment armée. Ils se sont rencontrés dans une villa appartenant à Mokhtar Benmokhtar sous un nom d'emprunt, à la périphérie de Bouchagoune, au lieudit Ouled Djellal. La rencontre n'a pas abouti. Mokhtar Benmokhtar avait proposé à Abderrezak El Para, soit d'abandonner la contrebande de cigarettes, soit de l'associer au trafic en tout genre. Mais la rencontre a été très houleuse et les deux chefs ont passé deux jours à s'épier. L'intervention des deux conseillers des deux chefs avait permis d'éviter un massacre entre les deux bandes. Ces deux-là, âgés de 40 ans, à l'époque, répondent aux noms, selon les révélations d'un groupe de soutien, démantelé à Khenchela et questionné, à ce propos, Abou Harikh alias El Ouardi Boutoba du côté de Mokhtar Benmokhtar, et le second El Gerrout alias Bouzeaïeb Lakhdar du côté d'Abderrezak El Para. Très méfiant, El Para ne fournit pas l'itinéraire de son retour à Mokhtar Benmokhtar. Mais ce dernier connaît tous les passages obligés que doit emprunter El Para. Il dresse plusieurs embuscades à Doucen et Sidi Khaled, ainsi qu'à Ouled Harkat, à Ouled Djellal. Les éclaireurs d'El Para, au nombre de quatre, furent éliminés par Mokhtar Benmokhtar. Contraint de se cacher, El Para fait le mort pendant cinq jours et ne regagna ses abris qu'au sixième jour. El Para avait promis une vendetta. Mais en 2003, sa capture par les Maliens l'empêche de se venger. Selon des informations officieuses, Mokhtar Benmokhtar ou ses complicités seraient derrière la neutralisation d'Abderrezak El Para, aujourd'hui, entre les mains de l'autorité judiciaire. Il a tissé une véritable toile d'araignée, englobant divers secteurs d'activité prohibés et lucratifs. Sa connaissance du Sud et les vastes réseaux de soutien qui travaillent sous sa coupe lui ont donné une puissance de véritable parrain de la mafia. Il est devenu aussi puissant avec notamment, le soutien d'Al Qaîda. Comme nous l'avons indiqué dans notre édition de samedi dernier, ses complices sont pourchassés par le GGF, la Gendarmerie, le GIR et les brigades mobiles de la Douane nationale, mais l'immensité des territoires du Sud, l'importance des frontières rendent la tâche difficile. «Détruire complètement le réseau relève de l'utopie à moins d'éliminer physiquement Benmokhtar et les têtes de file de ses principaux réseaux», soutient une bonne source. Quand on le cherche à Tari, il se trouve à El Oued, à M'Sila ou à Biskra qu'il n'avait pas approché du temps d'Abderrezak El Para, connaissant, pour sa part, les frontières par les sentiers du sel (fréquentés par les Touareg). Il est un jour au Niger ou au Mali ou même en Libye. Les lieux qu'il évite absolument sont Tindouf, trop sécurisée pour des raisons que l'on connaît, et ses environs. Mokhtar Benmokhtar, s'il n'a pas été neutralisé jusqu'à présent, c'est parce qu'il utilise ses complices sans s'impliquer lui-même.