Ahmed Dane, connu pour être un farouche adversaire de son président, reproche à ce dernier «d'avoir commis deux erreurs» politiques. Boudjerra Soltani est-il toujours l'homme fort du MSP? La question mérite d'être posée depuis qu'il est tombé en disgrâce auprès du premier magistrat du pays. La réponse à la question posée est difficile à trouver au vu de la réalité de la vie interne du parti islamiste et de son mode de fonctionnement. Il n'est un secret pour personne que de dire qu'un front de refus à la ligne de conduite du président du parti s'est constitué depuis longtemps. Il renferme en son sein les anciens proches du défunt Mahfoud Nahnah, le fondateur du mouvement islamiste, pratiquant la politique de l'entrisme qui semble porter ses fruits...jusqu'à maintenant. Les prochaines élections s'annoncent déterminantes pour l'avenir immédiat du MSP. La démarche de Soltani a, de tout temps, été décriée par des cadres aguerris, à l'image de Menasra, Saâdi, Dane et bien d'autres militants de la première heure. La sortie du président Abdelaziz Bouteflika qui a cloué au pilori son ministre d'Etat et néanmoins chef du MSP au sujet de son audace de porter le débat sur le dossier lourd de la corruption sur la place publique, sans aller au fond des choses et surtout sans prendre la précaution de saisir qui de droit, à savoir la justice, a laissé des traces. Jeudi dernier, Soltani est allé prêcher la bonne parole du côté de la ville de Sidi Bel Abbès, en Oranie. Une manière de marquer sa présence sur la carte politique de son parti. Même s'il n'a pas abordé le fond de la problématique qui s'est posée au MSP, après l'attaque du président de la République sur le dossier de la corruption. Dossier, faut-il le signaler, pris en charge par l'ensemble des instances du parti qui ont chargé une commission de suivi de l'opération baptisée «stop corruption». C'est une façon, aussi, d'adresser un signal fort à ceux qui spéculent sur son éventuel affaiblissement au sein de son parti, dont les instances ont apporté officiellement leur soutien. Il offre ainsi l'image d'un mouvement politique dont les militants se portent en rangs serrés derrière leur chef de file. Tout cela donne l'impression que Soltani est prémuni par le rempart dressé autour de lui par ses compagnons. Un consensus qui risque d'éclater à tout moment. La première flèche, dans ce sens, est tirée par un membre influent du conseil consultatif national du MSP, Ahmed Dane, connu pour être un farouche adversaire des thèses défendues par son président. Il reproche, dans un communiqué rendu public, à Boudjerra Soltani «d'avoir commis deux erreurs» à savoir, son entrée dans le gouvernement en tant que ministre, ce qui a démuni le parti des espaces larges de liberté (d'expression ndlr), et l'a fait entrer «dans une prison dorée». une prison qu'il assimile à «une cellule de rétention des libertés». Sa seconde erreur, d'après ce membre du conseil, réside dans le fait que Soltani a confondu entre deux entités, le ministère et le parti, en ignorant les limites qu'impose l'exercice aussi bien de l'une et de l'autre fonction et surtout de ne pas avoir respecté un principe fort dans la mission du commis de l'Etat, à savoir appuyer ses déclarations avec des dossiers. Ces erreurs et leurs répercussions mènent le MSP sur le terrain de la confrontation politique qui n'est pas la voie choisie par le parti qui milite pour la réconciliation et la paix. Dane se pose même la question sur l'avenir du MSP après cette nouvelle donne. Cette levée de boucliers est annonciatrice d'une recomposition dans le paysage et la ligne de conduite du mouvement islamiste qui peut forcer Soltani à faire un choix entre les deux fonctions politiques qu'il occupe: lâcher le poste de président du MSP ou se départir de son poste de ministre d'Etat. La balle est dans le camp de l'auteur de celui qui a fait bondir le président de la République avec sa déclaration et l'histoire de la liste qu'il dit avoir en sa possession.