De 1.096 attentats à l'explosif enregistrés en 1993, seuls 245 ont été perpétrés en 2001. Une régression notable soulignée par les experts. Cette évolution prête à une lecture sécuritaire du phénomène, liée à la disposition des groupes terroristes, les filières d'acheminement des explosifs, la disponibilité des «ingrédients» nécessaires (TNT, plastic, nitroglycérine, engrais, poudre noire...) à la confection des bombes et le vol d'explosifs. Durant l'année 1995, 4.091 engins explosifs ont été récupérés. Cette année a été marquée par une sophistication des attentats à la bombe sous forme de voitures piégées. Le procédé a été expérimenté lors du sanglant attentat du boulevard Amirouche, lorsque deux kamikazes du GIA, à bord d'une Range Rover avait foncé sur le commissariat central. Les experts avaient craint à l'époque que le GIA ne développe cette technique, après des renseignements faisant état de formation d'artificiers dans les camps afghans et dans la plaine de la Bekka, au Liban Sud au contact du Hezbollah chiite. En 1996, 922 engins ont explosé contre 4.594 récupérés. Les GIA commençaient alors à entrer dans un processus de confection de bombes artisanales avec des moyens moins sophistiqués, mais diversifiaient les objectifs à travers le territoire national. Des bombes d'une moyenne puissance, souvent à base d'engrais chimiques, étaient confectionnées et les émirs du GIA avaient alors installé au niveau de chaque groupe un «spécialiste de la mort», généralement des soudeurs ou des plombiers, qui savaient manipuler les tubes de fer et la poudre noire. En 1997, les attentats culminaient à 1 385 contre 2.282 engins récupérés. Cette année a été marquée par le démantèlement par les forces de l'ANP de l'un des principaux laboratoires de confection des bombes dans un souterrain qui se trouvait sous les villas de Ouled Allel, dans la région de Sidi Moussa à l'est d'Alger, et qui fournissait à des commandos réduits des bombes de plus en plus compactes, faciles à dissimuler. En 1998, 2.864 attentats à la bombe ont été perpétrés contre 2.113 engins repris. Ces attentats étaient dans leur majorité commis lors des massacres de civils (lorsque les tueurs investissaient des maisons), lors de faux barrages ou contre des convois militaires. La pratique élargie au Gspc avait alors enflammé la Kabylie. En 1999, 1.346 attentats à la bombe ont été commis contre 1 439 engins récupérés. Cette baisse drastique, du double au simple, peut s'expliquer par le tarissement des sources d'approvisionnement depuis les réseaux de soutien logistique du GIA à l'étranger. Les groupes terroristes tentaient de maintenir une pression régulière sur les populations et les services de sécurité. En 2000, l'intensité des attentats a baissé d'un autre cran avec 559 commis contre 2.397 engins artisanaux désamorcés. Cette tendance à la baisse s'est poursuivie en 2001 avec seulement 245 attentats contre 2.160 engins récupérés. Pratiquement toutes ces bombes sont fabriquées par des artificiers dans les maquis et ne provoquent pas de dégâts importants. Des clous, des écrous et des boulons mélangés à de la poudre noire ont été utilisés quasi systématiquement. Le bilan humain de ces attentats à la bombe et des opérations de désamorçage fait état de 1.872 victimes dont 8.445 blessés. Depuis le premier vol d'explosifs en 1989 par des militants du FIS dans une carrière de phosphate à Jijel et le premier attentat à la bombe meurtrier à l'aéroport d'Alger, les groupes terroristes ont expérimenté des techniques macabres pour tuer et mutiler. L'impact psychologique, doublé de l'effet médiatique, rendait l'attentat à la bombe, un acte prisé par les GIA. Ces groupes n'hésitaient pas à piéger des voitures, du mobilier, des routes, des stations de bus, mais pire encore, des livres du Coran et des... cadavres.