Dans une économie vouée au libéralisme, où l'entreprise joue le rôle de moteur, les patrons ont aussi leur mot à dire. C'est une véritable guéguerre! La nouvelle stratégie industrielle risque de se voir ajournée. Abdelhamid Temmar veut imposer le fait accompli, le patronat oppose son veto et l'Ugta compte dicter coûte que coûte sa maquette sociale. L'agissement «unilatéral» du gouvernement, couplé à une hystérie sociale chez le syndicat de Sidi-Saïd, provoquent une grogne au sein du patronat, mis jusqu'ici à l'écart. Pourtant, les trois partenaires ont signé, lors de la tripartite de septembre 2006, un pacte qui trace les missions de tout un chacun et son terrain de jeu. Cette fusion confirme-t-elle sa fragilité? La Centrale syndicale croit, dès maintenant, au succès de sa maquette sociale. La nouvelle stratégie industrielle, version Ugta, repose sur «trois schémas directeurs», révélés, hier, au grand jour par une source syndicale. Primo, l'un des trois schémas fait allusion à une industrialisation à pièces lourdes. En termes clairs, il s'agit de s'investir pour l'essor de l'industrie dans un cadre de partenariat avec les grandes entreprises industrielles. Cela sous-entend l'industrie des ciments, la pharmacie, la mécanique et l'électronique, les hydrocarbures et le secteur énergétique. Secundo, l'autre schéma de l'Ugta est tracé à l'ombre des «industries à caractère régional». C'est-à-dire l'agroalimentaire, les textiles et cuirs, les produits sidérurgiques longs, les engrais et produits phytosanitaires. Viendront en troisième position de la pyramide les industries à caractère local. Autrement dit, les activités venant en appui à l'industrie, comme les services et les PME/PMI. Quant au modèle opératoire, il est question, d'après l'approche de l'Ugta, de «recentrer des activités vers la fabrication de composants à forte valeur ajoutée, avec le développement du tissu PME/PMI». Le syndicat des travailleurs recommande aussi la mise à niveau de l'outil de production. Cela étant, un projet qui date de l'ère de la pierre taillée, mais dont la mise en branle est restée à la vitesse minimale. Le partenariat constitue, à entendre l'Ugta, «un objectif incontournable» pour développer certaines filières telles la mécanique, l'électricité et l'électronique, ainsi que la chimie-pharmacie. Le syndicat de Sidi-Saïd veut-il jouer la carte d'un partenariat Etat-privé? A plus forte raison, il est le mariage que privilégie l'Ugta, excluant de la piste le partenaire étranger. Par ailleurs, dans une économie vouée au libéralisme, où l'entreprise joue le rôle de moteur, les patrons ont aussi leur mot à dire. La réaction des organisations patronales ne s'est pas fait attendre. Celles-ci, d'une seule voix, ont rejeté en bloc ce qu'elles qualifient de «pensée unique et d'agissement unilatéral». Quant à Abdelhamid Temmar, il ne sait plus sur quel pied danser. Jouer sur la corde du social revendiqué à cor et à cri par l'Ugta ou ouvrir la porte aux étrangers. Quoi qu'il en soit, la seconde option s'avère inévitable pour un pays en quête d'une transition économique. L'Etat devra, néanmoins, jouer l'accompagnateur par des mesures d'encouragement à l'essor de l'entreprise algérienne. Le ministre des Participations et de la promotion de l'investissements préfère qualifier la mission de l'Etat «d'intervention efficace et flexible». Mais jusqu'à quel stade? Face aux critiques acerbes des patrons, le gouvernement est appelé à renvoyer l'ascenseur et engager une discussion bipartite avec les patrons. Et puis, définir avec l'Ugta la zone interdite du social, mais suivant les règles du modèle économique escompté.