Des humains, des prisonniers pour la plupart, sont utilisés comme cobayes. Elles s'appelaient gerboise bleue, gerboise verte, gerboise rouge et gerboise blanche; ce ne sont là que quelques noms de code d'essais nucléaires français perpétrés dans le sud algérien. D'El Hammoudia à Reggane, à In Ekker à Tamanrasset, en passant par le massif de Tan Afella dans le Hoggar, l'horreur est la même. La première bombe atomique ayant explosé à El Hammoudia était d´une puissance de feu nucléaire dépassant les 450 kilotonnes, soit 40 fois plus forte que la bombe explosée par les Américains à Hiroshima, au Japon. Des essais dont les séquelles sont restées jusqu'à nos jours. Des humains, des prisonniers pour la plupart, sont utilisés comme cobayes. Aujourd'hui, 47 ans après l'apocalypse, les irradiations continuent de faire leur effet. Des milliers d'enfants sont condamnés à vivre avec des malformations congénitales, alors que d'autres seront stériles à jamais. Un autre crime contre l'humanité qui demande réparation et dont la France officielle, doit sans doute intégrer dans le chapitre des «bienfaits» de la colonisation, que les initiateurs de la loi du 23 février 2005, continuent de vanter. Pour que nul n'oublie, un colloque international sur les essais nucléaires dans le monde s'ouvre demain à Alger. Les cas des essais réalisés dans le Sahara algérien, mais aussi aux Iles Marshall, sur le territoire américain et en Australie, y seront abordés. Un déplacement en avion est prévu sur l'ancien site d'essais nucléaires de Reggane, le 15 février. Outre l'écoute de témoignages de victimes survivantes, les participants examineront plusieurs sujets importants relatifs à la gestion des conséquences des irradiations induites, soit par les bombardements, soit par les essais, notamment les aspects juridiques et la prise en charge des victimes. Conférences, ateliers et tables rondes sont prévus, devant aboutir à l'élaboration de recommandations. Parmi les invités, l'on retiendra le nom de M.Bruno Barrillot, expert du Conseil d'orientation pour le suivi des conséquences des essais nucléaires (Coscen) en Polynésie française. Il interviendra sur le thème: «Où en est-on dix ans après la signature du traité d'interdiction des essais nucléaires?» Roland Oldham, président de l'association Moruroa et Tatou, interviendra au nom des victimes des essais français dans le Pacifique. Mercredi, la problématique des procédures juridiques engagées par les victimes des essais nucléaires français et par leurs associations sera posée. Des plaintes avec constitution de partie civile déposées par l'association des vétérans des essais nucléaires, l'association polynésienne Mururoa et Tatou et une dizaine d'individus, ont trouvé, pour la première fois, une écoute auprès de la justice française. Le parquet de Paris a, en effet, décidé le 20 septembre dernier, d'ouvrir une information judiciaire sur les conséquences sanitaires possibles des essais nucléaires français dans le sud algérien et en Polynésie entre 1960 et 1966. L'enquête ouverte contre X porte sur des faits d'homicide volontaire et d'atteinte à l'intégrité physique. Les 13 et 14 février, le cas des essais nucléaires qui ont eu lieu en Algérie, le 13 février 1960, sera mis en exergue. Il est connu que les essais atmosphériques en particulier se sont avérés très polluants en irradiant le sol algérien tout en causant un grave préjudice écologique dont témoignent encore les roches noires et les terres brûlées où aucune végétation ne pousse. Ce qui a été constaté dans la région de Tamanrasset à 150km du site d'In Ekker c'est la disparition de l'eau potable qui pourrait avoir un lien avec le site atomique, car les explosions causent des déplacements tectoniques, voire des séismes. L'Etat français n'a pas voulu reconnaître jusqu'à présent ces effets. Même si le gouvernement, par la voie de M.Jurien de la Gravière -délégué à la sûreté nucléaire, mandaté par Mme Alliot-Marie- a été obligé de reconnaître que sur les 210 bombes qu'a fait explosées la France, au moins 10 essais réalisés dans le Pacifique posaient problème et qu'un suivi médical devait être mis en place. Le président algérien a conditionné la signature du traité d'amitié avec la France par la reconnaissance des crimes commis par l'ancien colonisateur, une démarche qui sera suivie par une repentance et des excuses officielles. De son côté, L'Association des vétérans des essais nucléaires (Aven) adressera un questionnaire à chaque candidat à l'élection présidentielle française pour «attirer leur attention sur l'urgence de reconnaître la responsabilité de l'Etat français en matière de conséquences sur l'environnement et sur la santé de toutes les personnes (...) qui ont participé aux expérimentations nucléaires aussi bien au Sahara algérien qu'en Polynésie française», indique un communiqué de l'association.