Il gérait une direction de sponsoring pour plus de 50 milliards sans comptabilité! La journée du mercredi a été caractérisée, notamment, par l'audition de l'ex-directeur du sport du groupe Khalifa, en l'occurrence Maâmar Djebour. Appelé comme témoin, ce dernier dira qu'il n'avait pas reçu de convocation et qu'il est venu à la suite des articles de presse faisant état d'un mandat d'amener qui devait lui être donné jeudi. Il travaillait à la Radio Chaîne III comme journaliste sportif avant de rejoindre le défunt groupe. Il avouera devant le tribunal avoir connu Abdelmoumen Khalifa au lycée El Mokrani de Ben Aknoun et leur relation a continué même à l'université. «Je le dépasse d'une année seulement. Il était au département de pharmacie et moi en architecture.» Bref, il dira qu'après une rupture de quelques années, il a rencontré de nouveau Abdelmoumen en 2001, lequel lui a proposé le poste de directeur de sport au niveau de son groupe, avec contrat. A ce moment, la juge intervint: «Une fois à Khalifa, que faisiez-vous à la Radio?» «Je suis resté en parallèle à la Radio pendant quatre mois, ensuite, c'était un reliquat de congé.» Cette réponse n'a pas laissé indifférente la juge pour lui dire qu'un reliquat n'est pas une rupture avec la Radio, une manière de lui dire qu'il avait un cumul de fonctions. «Avez-vous informé l'entreprise de la Radio?», dit-elle. Il répondit: «Non», sans donner de précisions. Coincé, il reconnaîtra avoir perçu un salaire de 150.000DA de Khalifa et 28.000DA à la Radio. Il reconnaîtra, aussi, face à une question du procureur général qu'il n'avait pas informé, officiellement, la Radio nationale à propos de son travail au groupe Khalifa. «Ils l'ont su par la suite», affirmera-t-il du moment qu'il était bien placé au groupe Khalifa en animant même des émissions à la chaîne de Khalifa TV. Dans ce sens, il dira, également, qu'on a fait appel à lui pour mieux organiser l'opération de sponsoring. Il ajoutera qu'il avait travaillé à Khalifa TV, à Paris, en animant des émissions sportives et de divertissement, et ce, avec un salaire de 3500 euros. Il reconnaîtra qu'il percevait de Khalifa un double salaire, et contrairement au poste de directeur de sport, celui de la chaîne de TV lui donnait son salaire de main en main. Il ajouta qu'à ce moment-là, il avait une mise en disponibilité accordée par la Radio nationale et qu'il était hébergé dans un hôtel 4 étoiles à Paris, place de la République, lequel était lié par convention avec le groupe Khalifa avec un abattement de 50%. Toutefois, et avec cette fonction rémunérée, l'animateur, vedette de la Radio était pris en charge à hauteur de 600 euros facturés chaque jour, avec en plus un chauffeur. «A ce moment, j'attendais ma régularisation dans ma fonction en France. C'est Mokadam qui prenait en charge la direction du sport du groupe Khalifa à Alger et je l'aidais par téléphone ou lors de mes déplacements, les week-ends.» La juge demanda: «Parlez-nous du sponsoring de Nacim Sidi-Saïd.» «Bon, c'était un pilote de formule1 et effectivement, il était pris en charge par Abdelmoumen Khatifa», répondit-il. La juge ajouta: «Et le fils de Belmondo qui était aussi pilote d'automobile, et le tournoi de tennis de Monte-Carlo qui étaient sponsorisés à coup de devises?» Le témoin ne nia pas cela mais n'avait pas de réponse au sujet du montant de ces transactions. La juge évoqua, par la suite, la fameuse conférence de presse en France en 2001, lors du sponsoring de l'équipe marseillaise de football (OM). Maâmar Djebour reconnaîtra que les journalistes présents avaient bénéficié d'enveloppes contenant des sommes allant de 3000 FF à 5000 FF. «Personne n'avait refusé ces enveloppes», dira-t-il. En voulant aller plus loin, la présidente du tribunal criminel de la cour de Blida demanda les noms de journalistes qui en avaient bénéficié. Le témoin, coincé, cita des noms de journalistes de la presse écrite et de la télévision. «Franchement, il était généreux Khalifa», dira la juge en se demandant pourquoi cette offre a eu lieu juste avant le début de la conférence de presse. «Pouvez-vous nous donner la période de votre dernier contact avec Abdelmoumen?» dira-t-elle. Le témoin répondit: «C'était janvier 2005. Toutefois, j'avais changé le numéro de mon téléphone car on m'appelait beaucoup à ce numéro». Prenant la parole, un avocat voulut savoir si la direction du sport dont il était le premier responsable, avait une comptabilité. «Non», répondit-il. La juge intervint pour dire que les équipes sponsorisées retiraient de l'argent carrément de la banque Khalifa, laquelle était bourrée d'argent d'Algériens. «Et le montant global représentant les opérations de sponsoring?» «20 milliards de centimes», déclara-t-il. La juge rectifia: «Je suis désolé, le montant est de l'ordre de 50 milliards de centimes, et ce, sans compter les opérations de sponsoring en France». Elle ajouta: «Le montant est énorme, surtout que la banque venait de démarrer». Il précisera: «On sponsorisait les grandes équipes, notamment celle qui avait un poids régional et même continental». «Et pourquoi vous n'aviez pas renouvelé le contrat avec le Mouloudia d'Alger?» dit la juge. La réponse est révélatrice: «Tout simplement parce que cette équipe nous exigeait 10 milliards de centimes et cela ne nous était pas possible.» Une manière de nier les déclarations des responsables du Mouloudia qui évoquaient le non-renouvellement de la convention pour des problèmes liés à l'ingérence des responsables du groupe Khalifa dans l'activité du groupe. Concernant la provenance de l'argent du sponsoring, il dira: «Certes, c'était l'argent de Khalifa Bank. Toutefois, on pensait que c'étaient les bénéfices qui sortaient et non l'argent des déposants».