Ce fléau des temps modernes, relevant de la santé publique, a été le thème d'un débat public sur les ondes de la Radio locale. Le suicide prend de l'ampleur à Béjaïa. Huit cas sont enregistrés depuis le début de l'année. Aussi, le suicide est sujet à débat au sein de la société alertée par les médias qui rapportent régulièrement des cas. Ce fléau des temps modernes, qui relève de la santé publique, a été le thème d'un débat public sur les ondes de la radio Soummam à travers une émission qui a suscité moult commentaires. Sur le plateau, psychologues, sociologues, imam, journalistes, responsable de la cellule d'écoute de la wilaya et parents de victimes auxquels seront joints, par téléphone, des auditeurs, ont, deux heures durant, abordé dans le détail ce fléau et les causes qui y conduisent. S'appuyant sur les chiffres fournis par la police et la Protection civile présentes sur le plateau, les participants ont réussi le pari de casser le tabou permettant une expression la plus variée possible avec, au bout, des recommandations allant dans le sens de la prévention, seule rempart à cette hécatombe qui endeuille bien des familles. Béjaïa, espace politique où s'exerce de façon plus accentuée la défense des valeurs humaines, de démocratie et de liberté, se veut aussi un milieu comptant des intellectuels, universitaires et de simples citoyens soucieux des maux qui frappent une société en pleine mutation. L'initiative de la Radio locale arrive à point nommé pour tirer la sonnette d'alarme, ce, d'autant plus que le phénomène du suicide touche gravement cette région qui a comptabilisé, rien que pour l'année en cours, 8 cas alors qu'en 2004, elle avait occupé le podium en la matière avec 64 cas. «Le crime contre soi», comme le définissent certains, inquiète à plus d'un titre, d'où cet appel unanime à l'endroit du mouvement associatif, la cellule familiale et les médias pour une communication sans laquelle aucune prévention n'est possible. «Parler chez soi, dans son environnement aide à se soulager et par voie de conséquence, éviter le geste fatal», en un mot, savoir communiquer pour prévenir. Il est bien évident que les auditeurs ont bien appris en cette matinée de jeudi. Les interventions des participants répondant aux questions pertinentes des deux animateurs de l'émission ont ouvert les yeux pour prévenir l'acte fatal que ni l'Islam ni la tradition ne tolèrent. «Evoquer le suicide comme solution pour sortir du marasme est la moitié du chemin fait vers la mort», estime un participant pour expliquer la fragilité des candidats au suicide qu'il convient de surveiller de près par une prise en charge psychologique urgente. Il en est de même pour ceux qui ont raté leur tentative et en sortent fragilisés. Les causes du suicide sont multiples. Des problèmes sentimentaux aux échecs professionnels et scolaires, les auditeurs et les participants ont tout évoqué pour expliquer le geste fatal. Les mutations socio-économiques, politiques et culturelles que connaît le pays depuis 1988 sont mises à l'index dans le sens où «les besoins sont de plus en plus importants alors que l'individu est de plus en plus dans la précarité et dans l'incapacité de les satisfaire». Pour paraphraser un participant qui alerte nous dirons: «L'heure est grave». L'Algérien qui vivait simplement voit ces 20 dernières années son quotidien complètement chamboulé avec l'avènement d'un nouveau mode de vie marqué par la consommation effrénée qui nécessite des moyens, mais lorsque ces derniers font défaut, le drame est parfois inévitable. «La mort est banalisée», lançait une auditrice qui se reférait à la tragédie nationale vécue par ce pays fort traumatisante. Contrairement à ce qu'on pense, les candidats au suicide sont généralement des personnes saines qui répondent, à travers le recours à l'acte fatal, à une situation d'échec qui trouve son origine dans les problèmes sociaux, mentaux et sentimentaux. Les spécificités algériennes existent bien évidemment et ne peuvent être connues que si les langues se délient. C'est seulement ainsi que la tâche de la prévention tendant à freiner ce fléau à défaut de l'éliminer, est possible. A Béjaïa, un pas a été franchi par cette initiative de la Radio locale, un média présent dans les foyers et dont la portée est, par conséquent, importante. Les participants au plateau restent convaincus que grâce à la communication, les choses peuvent évoluer positivement, pas seulement en ce qui concerne ce fléau mais bien pour tous les maux qui rongent la société et donc le pays.