Après 12 ans à la tête de l'Elysée, le président Chirac prendra sa retraite en emmenant avec lui l'héritage de la Ve République. La fin et le début se croisent. Ce 6 mai 2007 restera une date historique pour la France. Il marquera, en effet, une transition politique de deux générations, dont l'une a vécu les premiers instants de la Ve République et l'autre, non. Cette nouvelle génération, qualifiée de «baby boomers», incarnera-t-elle la rupture avec le système politique actuel? Même si la rupture n'est pas profonde dans le fond, elle le sera certainement dans la forme. Peu importe le vainqueur, Nicolas Sarkozy ou Ségolène Royal, aucun des candidats ne se souvient de la naissance de la Ve République. Après plus d'un demi-siècle, les Français feront leurs adieux, ce soir, au dernier capitaine de la génération De Gaulle, le président Jacques Chirac. Au palais de l'Elysée, le décor est déjà fin prêt. Le départ de la famille Chirac a été programmé et des aménagements ont été effectués pour accueillir le nouveau locataire. Après 12 années de mandat, Jacques Chirac quittera dans moins de deux semaines, ses fonctions de chef de l'Etat. La passation de pouvoir avec le président ou la présidente élu(e) obéit à des règles et le calendrier officiel comporte encore quelques étapes obligées avant la retraite politique. Le couple Chirac, qui vivait à l'Elysée, devrait provisoirement résider au Quai Voltaire, dans un appartement prêté par la famille de l'ex-Premier ministre libanais, Rafic Hariri. Jacques Chirac devrait, par ailleurs, annoncer les modalités de la fondation qu'il souhaite créer autour des thèmes qui lui tiennent à coeur comme l'écologie, le développement et le dialogue des cultures. Comme tout ancien président, il aura droit à un bureau et de conserver un petit nombre de collaborateurs. Son entourage assure qu'il s'agira d'une «structure légère avec quelques collaborateurs». Certes, le président s'est déjà trouvé une préoccupation, il n'en demeure pas moins qu'elle ne signifie pas grand chose pour un homme dont le parcours politique a commencé en 1967. Il faut reconnaître qu'après plus de 18 ans de responsabilité politique, la rupture avec le monde politique ne sera pas facile pour lui. En attendant son départ, le président Chirac a tenu à faire ses adieux à tout son entourage et même à la scène internationale. Mercredi dernier, il s'est déplacé en Allemagne pour rencontrer spécialement Angela Merkel, qui assure actuellement la présidence de l'Union européenne. C'était son dernier voyage officiel en tant que président de la République. Une visite placée sous le signe de l'émotion et du symbole. De retour en France, le président avait réuni, le soir même, l'ensemble du personnel de l'Elysée pour s'offrir un moment de plaisir et de sympathie. Le lendemain, il avait organisé une dernière cérémonie de remise de prix à l'Elysée. La France se souviendra-t-elle de lui? Si le bilan du président Chirac n'est pas très positif, il reste quand même satisfaisant. Sur le plan international, le président a mené des actions remarquables. Tony Judt, un historien britannique le juge «suffisamment gaulliste pour s'opposer à la folie des grandeurs de Washington». Effectivement, il a osé tenir tête à Bush durant la guerre de l'Irak. Contrairement à De Gaulle et Mitterrand, il a reconnu le rôle de la France dans l'Holocauste. Le monde lui témoigne sa préoccupation sur le réchauffement climatique. «Notre maison brûle et nous regardons ailleurs», avait-il clamé, en septembre 2002, en Afrique du Sud, face à la menace d'une destruction de l'environnement. La période Chirac témoigne d'une brillante carrière politique qui a permis à la France de garder sa grandeur historique. Une chose est sûre, la France de demain ne sera plus celle d'aujourd'hui.