Au lendemain de la parution dans l'Hexagone du très controversé livre du général Aussaresses, faisant étalage des pratiques de l'armée française pendant les «événements» d'Algérie pour le maintien de l'ordre, il était difficile de savoir quelle réaction allait avoir l'opinion publique. Après l'indignation des uns et la condamnation des autres, ce sont les médias qui donnent le ton. La Guerre d'Algérie devient un thème récurrent sur presque toutes les chaînes françaises. La diffusion d'une série d'émissions en trois épisodes sur la chaîne publique France 3 a révélé, selon les sondages, l'attention particulière que portent les téléspectateurs français à la Guerre d'Algérie. Cette série est intitulée L'Ennemi intime, et les documentaires de cette émission reviennent, témoignages à l'appui, sur l'insurrection des nationalistes et sur ce qui a été convenu d'appeler, depuis la charge des éléments du FLN sur le Constantinois le 20 août 1955, «les événements d'Algérie». Par la suite la torture devient pratique courante pour faire parler le moindre suspect. Entre ceux qui ont dit «non» et ceux que le souvenir des atrocités n'empêche pas de dormir, le documentaliste, Patrick Rotman, maintient la tension et la terreur qui imprégnaient les rues et les maquis et qui, immanquablement, peuvent justifier tous les dépassements. Certains intervenants renvoient dos à dos les deux camps, tous coupables d'atrocités. Après plus de quarante ans de distance, la France puise dans ces douloureux souvenirs. Pour ce pays, une génération entière de soldats a été marquée et parfois brisée par cette Guerre. Beaucoup de clichés tombent et certains aspects sont enfin désacralisés, ce que, malheureusement, nous ne sommes pas encore en mesure de faire, puisant encore dans l'image hautement idéalisée du combat pour le retour à la souveraineté nationale. La chaîne française du savoir et de la connaissance, la Cinquième, propose, à son tour, à partir du 15 mars et jusqu'en décembre 2002, à l'occasion du quarantième anniversaire de la signature des accords d'Evian le 19 mars, une série de documentaires sur l'Algérie. Selon Geneviève Giard, directrice des antennes, la chaîne publique souhaite aller «au-delà de l'historique et donner un panorama complet» sur «ce passé qui ne passe pas» entre la France et l'Algérie. France 5 diffusera en 2002 un total de 36 heures de programme sur les événements d'Algérie (en hertzien, sur le câble et le satellite) avec une diversité de thématiques et de points de vue. Eté 62 de Jean-Michel Maurice et Benjamin Stora, diffusé en juin, sera le film de référence sur la chronologie des événements ayant mené à l'indépendance de l'Algérie, de juin à septembre 62. La chaîne commencera par diffuser Algérie, paroles de tortionnaires (le 15 mars sur le câble et sur le satellite et le 18 mars sur le hertzien), réalisé par Jean-Charles Deniau et basé sur sept témoignages de volontaires et de soldats du contingent. On pourra voir aussi La guerre d'Algérie dans les actualités filmées Pathé dépeignant la manière dont les Français étaient informés sur ce qui se passait de l'autre côté de la Méditerranée de 1954 à 1962. Au programme également, Harki, un traître mot de Marie Colonna, elle-même née en Algérie et dont les parents, pieds-noirs, ont choisi le camp de l'Algérie indépendante (diffusion prévue en avril), Les Algériens de Lyon de Jean-Bernard Andro qui fait partie de la collection Français d'ici, peuple d'ailleurs (diffusion en mai) ainsi que Histoire de l'OAS de Georges-Marc Benamou, réalisée par François Margolin (diffusion en juin). On pourra aussi voir en juin Le onze de l'indépendance de Karim Nedjari, réalisé par Jean-Pierre Vedel, Algérie-Montpellier, aller simple de Benoît Califano sur les pieds-noirs arrivés en France en 1962 à travers l'histoire de trois familles installées à Montpellier. Sera diffusé ultérieurement Algérie, naissance d'une nation d'Hervé Bourges, ancien président du Conseil supérieur de l'audiovisuel. Journaliste à Témoignage Chrétien, journal qui dénonça la torture en Algérie dès 1957, il a participé à la guerre comme soldat avant de travailler au cabinet d'Edmond Michelet, garde des Sceaux de 1959 à 1961. Dès le 15 mars, France 5 propose sur son site france5.fr un prolongement pédagogique à cette programmation, avec un «chat» en partenariat avec Le Monde, les dates clefs de la colonisation jusqu'à la fin de la guerre d'Algérie, les différents mouvements politiques, et une bibliographie.