«Abou H.» était un émir au niveau des maquis de Jijel. Il a exercé son métier de médecin pendant douze années, avant de prendre les armes. De nombreux imams ont consacré leur prêche de vendredi dernier au phénomène d'«El hidjra oua takfir» et du terrorisme. Ils ont rappelé aux fidèles les dangers de l'extrémisme auquel fait face notre pays. un extrémisme symbolisé sur le plan politique par l'ex-numéro deux du FIS dissous, Ali Benhadj, qui vient de se «distinguer» récemment. En effet, il a été arrêté pendant quelques heures, jeudi dernier, avant d'être relâché. Selon la chaîne Al Jazeera, le lendemain du scrutin des législatives, Benhadj aurait appelé à l'annulation des résultats des législatives. Qu'est-ce qui fait courir Ali Benhadj? Un repenti tente de brosser les traits, jusque-là encore, inconnus de ce «trublion». «Ali Benhadj a été un va-t-en guerre. C'est un fanatique et profondément aigri. Ses connaissances théologiques ne sont pas assez vastes pour lui permettre de revoir sa position et peu d'entre nous, militants de l'ex-FIS, approuvions.» A propos du président de la République, il essaie de donner un avis «posé». «C'est un homme qui fait beaucoup d'efforts pour l'Algérie, et je pense ce que pensent tous les Algériens conscients». Natif de Djemaâ, dans la région de Jijel, médecin de formation, plus de la cinquantaine, ce repenti est bien marqué. Il est marié et père de trois enfants. Nous n'avons obtenu cet entretien que sous condition. D'abord, le respect de l'anonymat par mesure de sécurité. «Abou. H» était un émir au niveau des maquis de Jijel. Il a exercé son métier de médecin pendant douze années, avant de prendre les armes dans des circonstances particulières. Il a rejoint les rangs du FIS dissous par pure conviction et dans un but bien clair, croyant «faire triompher l'Islam», a-t-il souligné. «L'arrêt du processus électoral a exacerbé les esprits de la plus grande partie d'entre nous. J'ai été arrêté puis relâché. J'avais mal digéré cet acte. Des militant du FIS dissous, qui avaient déjà pris le maquis, m'ont appris que j'allais être arrêté une seconde fois. Ils sont venus me chercher ainsi que d'autres militants. C'était en 1993. J'ai occupé des postes de responsabilité.» «Des regrets?» Evidemment, j'ai des regrets et ce, depuis le premier jour où j'ai pris les armes contre ma patrie, pour laquelle mon père avait donné sa vie en 1961. J'ai déposé les armes pour des raisons multiples. Je me suis engagé pour un régime islamique par conviction et j'ai déposé les armes par conviction. Il m'a été difficile d'accepter les déviations des uns et des autres dans les maquis. Le mouvement du djihad, dont beaucoup étaient convaincus, a perdu de sa valeur. «Quand nous avons révisé les textes coraniques et les hadiths d'une part, et quand les plus grands savants en théologie nous ont fait parvenir des messages de condamnation, d'autre part, nous avons été trompés par les écrits de cheikh Kotb.» Ce dernier avait écrit son livre en prison d'où la suspicion d'aigreur et de parti pris. «Et puis, par cheikh Hassan Al Benna.» Nous avons, ensuite, appris d'un grand théologien musulman, reconnu par tous les théologiens contemporains, en matière de takfir (déclaration d'apostasie), que si un musulman a accompli 99% d'actes d'apostat, il faut tenir compte du centième. C'est ce qui m'a poussé à réfléchir. Ce repenti confie, également, que le mouvement a impliqué trop d'étrangers de l'Occident (Angleterre et France) et de certains pays qui se disent musulmans, tels que le Soudan de Hassan Tourabi, l'Iran et ses dirigeants extrémistes. Le repenti poursuit: «Je ne pouvais plus supporter d'être confondu avec ceux qui se permettent de tuer sans distinction d'âge et de sexe. Le peuple des campagnes qui nous avait bien accueillis au début, s'est retourné contre nous, ne serait-ce que par des reproches du regard.» A propos de la mouvance el hidjra oua takfir, il la lie au phénomène des Khaouaridj. Celle-ci remonte à très loin. Les Khaouaridj, selon lui, agissent par pure conviction. Ce sont des fanatiques. «Ils sont instrumentalisés par certains cercles qui ne veulent pas que la paix règne dans le pays, car cela pourrait compromettre leurs intérêts. Donc, on commandite des actes qui restent, pour l'heure, isolés pour maintenir le climat de suspicion et de haine. Ils vivent avec le peuple, le jour. C'est trop grave.» Ce sont des organisations clandestines qui profitent de la conjoncture et tout est envisageable. S'exprimant sur les attentats qui ont eu lieu dans sa zone, le repenti ne dit pas tout, mais nous distille quelques mots: «Dans la zone que j'ai supervisée, les seuls meurtres ont été commis par les éléments du GIA, quelques poches ont résisté même après la neutralisation de Zouabri, du côté de Texenna, El Aouana, El Milia et Collo. Ils ont, par la suite, rejoint le Gspc.» Sur la situation sécuritaire actuelle, le repenti confie: «Ceux qui perpètrent des attentats sont de vulgaires criminels et ne peuvent, en aucun cas, se prévaloir du djihad.»