Cette conférence de l'ONU s'ouvre, demain, à Durban, en Afrique du Sud, dans un climat tendu. Mary Robinson, haut commissaire des Nations unies pour les droits de l'Homme, en charge de cette réunion qui se veut historique, veut éviter son fiasco. Deux sujets cristallisent les passions: le Proche-Orient et la question des réparations liées à l'esclavage. En dépit des dernières négociations à Genève, les 22 pays de la Ligue arabe ont prévu de se rencontrer à Durban, le jour même de l'ouverture de la conférence, pour faire avancer leur projet de résolution contre Israël. Réunis en session extraordinaire au Caire, la semaine dernière, les ministres des Affaires étrangères des Etats arabes ont réaffirmé leur volonté d'assimiler le sionisme à une forme de racisme, lors de la conférence. Cette position est jugée «inacceptable» par l'Etat hébreu ainsi que par les pays de l'Union européenne et les Etats-Unis. Washington, qui n'a pas encore officiellement confirmé sa présence (ainsi qu'Israël) à Durban, ne veut pas que cette conférence se transforme en tribune anti-israélienne. Les Etats-Unis comme les quinze s'opposent aussi aux demandes africaines de réparations financières en faveur des descendants des victimes de l'esclavage et du colonialisme. Devant le risque de boycott américain, Mary Robinson a déclaré, depuis Durban, qu'il existe «un accord pour que la formulation, selon laquelle le sionisme serait une forme de racisme, ne soit même pas discutée». Cherchant à calmer le jeu, Mme Robinson a mis en garde contre la tentative de rouvrir le débat, clos il y a un quart de siècle, lorsque l'assemblée générale de l'ONU avait abrogé une résolution de 1975 assimilant le sionisme au racisme. De son côté, le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, multiplie les appels à trouver un terrain d'entente. Il a lancé, mardi, un appel pour que les Etats-Unis participent aux travaux de la conférence. L'échec de la réunion de Durban serait désastreux pour les Nations unies, dont la lutte contre le racisme est une mission essentielle. Rappelons que les deux précédentes conférences mondiales contre le racisme, qui s'étaient tenues en 1979 et en 1983 à Genève, avaient largement échoué à cause du conflit du Proche-Orient. Par ailleurs, des organisations non gouvernementales ont demandé, hier, à l'ONU de condamner Israël pour «ses pratiques discriminatoires» à l'encontre du peuple palestinien. La Conférence mondiale contre le racisme risque, donc, de voir s'affronter à couteaux tirés, durant une semaine - à partir de demain et ce, jusqu'au 7 septembre - quelque 7000 délégués de plus de 160 pays dans une atmosphère couplée par la poursuite de la violence au Proche-Orient. En sortant le racisme du seul cercle Etats-Unis-Israël-Europe, la conférence de Durban tente de renouer, si peu soit-il, le partenariat Nord-Sud. Elle le fait sur une terre qui s'est illustrée de manière exemplaire par l'abolition de l'apartheid.