M.Lamine Belghithe, spécialiste dans l'histoire de l' Algérie est catégorique: «La France officielle ne reconnaîtra jamais ses crimes ni sous l'ère de Sarkozy ni sous le règne d'un autre président», affirme-t-il à L'Expression. «La repentance est un passage obligatoire dans les relations entre la France et l'Algérie», affirme M.Mohamed El Korso, président de la fondation 8-Mai 1945. Cette dernière projetait de rendre publique une déclaration à la veille de la visite, à Alger du président français, M.Nicolas Sarkozy, avant d'abandonner cette option. «Nous avons préféré temporiser et suivre ce qui ressortira des discussions officielles entre M.Abdelaziz Bouteflika et Sarkozy», atteste notre interlocuteur. Faut-t-il encore que les deux parties abordent cette question. Le ministre des Moudjahidine, Mohamed Chérif Abbas, apostrophé par L'Expression sur cette question, atteste «ne pas détenir la réponse». Mais pour M.El Korso «la France doit faire un acte de repentance tôt ou tard». Cela pourrait-il se produire sous le règne de Sarkozy? «Cette thèse est très peu probable», atteste notre interlocuteur. Le président de la fondation 8-Mai 45 ne désespère pas néanmoins. «Nous faisons la distinction entre le discours du candidat Sarkozy qui a écarté la possibilité de la repentance, et celui du président qui, à notre avis, traduit une ouverture et une envie de dialogue avec l'Algérie sur toutes les questions d'intérêt commun.» Le rôle que devront jouer la diplomatie algérienne et la classe politique, en général «est plus que déterminant». «Sarkozy doit savoir que le partenariat économique et énergétique, qu'il souhaiterait avec l'Algérie, passe inéluctablement par un acte politique de repentance.» Autrement dit, la diplomatie algérienne doit exercer «des pressions» pour arracher cette repentance. Notons que Sarkozy a déclaré dans sa campagne électorale que «la mode de la repentance est une mode exécrable». Et d'ajouter «Je vais en finir avec la repentance, qui est une forme de haine de soi.» Pour le président français, la génération d'après-guerre n'est pas responsable de ce qu'ont commis ses aïeux. Un argument très peu crédible, selon notre interlocuteur. «Il ne s'agit pas de crimes commis par des personnes. Mais d'un crime d'Etat contre tout un peuple». Reconnaître ses crimes, imposerait à la France plusieurs «concessions» qu'elle n'est pas prête à faire. Premièrement, elle sera dans l'obligation de juger les «responsables de crimes contre l'humanité». Les massacres de Setif, Guelma, Kherrata, ceux perpétrés dans les villages de Blida, les effets des radiations des essais nucléaires dans le sud algérien sont des preuves tangibles de l'atrocité du colonialisme. Le refus des autorités françaises d'ouvrir ses archives, «conforte mon scepticisme.» La «repentance», imposera aux autorités françaises d'indemniser les victimes. «Sarkosy et tous ceux qui sont contre la repentance, mesurent parfaitement les enjeux de cette démarche», soutient-il. M.Belghithe n'attend pas grand-chose de la visite du président français, M.Nicolas Sarkozy. «Il est pour moi impossible de voir la France faire une action de repentance, elle qui a glorifié sa présence en Afrique du Nord.»