Le sommet arabe de Beyrouth des 27/28 mars se penchera sur le dossier palestinien. Que vont réserver les dirigeants arabes à un projet qui aura fait le tour du monde avant de leur être présenté lors de la tenue du sommet prévu ces mercredi et jeudi à Beyrouth? Avant de découvrir les tenants du texte en question, celui-ci aura été largement édulcoré par les présentations et commentaires diversifiés dont il fut l'objet. Une initiative de paix qui vient en son lieu et temps? Voir! D'autant que l'auteur de l'initiative, ou projet, le prince héritier saoudien, Abdallâh Ben Abdelaziz, se garde de toute surenchère voulant se placer sur le terrain de la légalité internationale en faisant appel aux diverses résolutions déjà adoptées par l'ONU dans ce contexte. De fait, le prince Abdallâh n'innove en rien, se contentant de reprendre les points les plus susceptibles d'avoir l'approbation des Arabes et sans doute d'emporter l'adhésion d'Israël. Certes, les Arabes sont partagés, les Israéliens indécis, mais d'ores et déjà l'assentiment de la communauté internationale au projet saoudien est unanime. C'est même la première fois que les médias internationaux réservent un accueil aussi... enthousiaste à une position arabe sur la crise du Proche-Orient. Pour n'en retenir notamment que le point où il était affirmé la «normalisation» des relations avec Israël. Ainsi, les médias occidentaux ont-ils plus mis en relief cet aspect du projet du prince Abdallâh, que sa condition concomitante: l'établissement de l'Etat palestinien sur les territoires occupés par Israël. Maintenant, il reste à savoir ce qu'il en est en vérité de ce projet d'offre de paix saoudien qui sera l'un des plats de résistance (avec la menace de frappe américaine contre l'Irak) du prochain sommet arabe à Beyrouth. Et il faut bien dire que le texte demeure assez controversé si l'on tient que la seule «version» qui en circule c'est encore le résumé qu'en donne le journaliste américain P.Friedman du New York Times qui en évoqua les termes après sa rencontre à Djeddah avec le prince héritier Abdallâh. A en croire le journal libanais As Safir qui en publiait, hier, le projet, ce dernier serait présenté sous forme de résolution pour adoption au Sommet arabe. S'il est fait appel à un retrait d'Israël des territoires arabes, y compris le Golan et ce qui reste de territoires libanais ; il préconise l'établissement d'un Etat palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale ; incite à trouver une solution juste à la question des réfugiés, conformément à la résolution 194 de 1949 ; suivie de l'établissement de relations normales avec Israël ; et, à cet effet, s'adresser directement à l'opinion israélienne afin qu'«elle saisisse l'offre arabe de paix». Il n'est mentionné nulle part, selon As Safir, de soutien «au droit à la résistance» ni de soutien «à l'intifadha palestinienne». Cette offre de paix saoudienne qui, pour le moment, pèche par l'imprécision, semble vouloir, semble-t-il, ne heurter aucune conviction ou susceptibilité et, aussi, se ménager des sorties «laissant les portes ouvertes» à d'éventuelles «modifications qui tiendraient compte de considérations relatives à la forme de négociations ultérieures», affirme-t-on du côté arabe, selon le journal libanais. Notons que ces dernières semaines, des consultations intensives ont eu lieu entre les dirigeants arabes dans la perspective d'améliorer un texte, voire le rendre attractif, qui ne semble pas faire l'unanimité arabe autour de lui. Toutefois, un ministre arabe, sous le couvert de l'anonymat, avait laissé entendre, jeudi au Caire, que «l'initiative a été finalisée lors de consultations effectuées par l'Arabie Saoudite au cours des derniers jours avec les (...) parties concernées», ajoutant: «Les divergences sur la formulation portant sur les relations avec Israël et la question des réfugiés palestiniens ont été aplanies.» Cependant, face aux diverses interprétations qui sont données au projet saoudien et qui circulent dans les médias arabes et internationaux, sans doute qu'il faudra patienter jusqu'à la tenue du sommet pour connaître le fin mot de l'affaire.