«La personne n'est pas née pour tuer ou se faire exploser» Kamikaze ou Djihadiste? La problématique est posée. Politologues, religieux et juristes ont essayé de décortiquer cette question dans l'émission «Le débat est ouvert» diffusée, hier, sur les ondes de la Chaîne III. Le premier à intervenir est Cheikh Bouâmrane, président du Haut conseil islamique. D'après lui, le concept du Djihad évolue avec les époques. Aujourd'hui, cela n'a plus la même connotation qu'à l'époque du Prophète (QSSSL). Cheikh Bouâmrane explique le Djihad tel que défini dans le Saint Coran. «Il y a deux sortes de Djihad: le majeur et le mineur. Le premier remonte à l'époque des prophètes. On l'appelle El Djihad Al Akbar, majeur, lorsque les armées reviennent victorieuses des batailles. En ce qui concerne la deuxième catégorie du Djihad, c'est la légitime défense. C‘est une manière de résister à l'agression», explique Cheikh Bouamrane. Remontant plus loin dans l'histoire, le président du HCI souligne que le premier à se laisser tuer était un aviateur japonais. Etayant ses dires, il rappelle l'appellation attribuée par les Français aux Algériens, lors de la guerre de Libération. «Ils traitaient les Algériens de terroristes. Pour eux, celui qui défend sa patrie et sa religion est traité de terroriste. Ce qui n'est pas réellement le cas». Le kamikaze de Batna est-il un martyr ou une victime? Pour Mohamed El Korso, politologue, toute action kamikaze est liée à une certaine référence. «Chaque personne qui se fait exploser et tuer est quelqu'un qui est endoctriné, préparé et manipulé, car la personne n'est pas née pour tuer. Elle n'est pas née pour se faire exploser», observe-t-il. Selon le même intervenant, «l'Islam n'est pas venu pour inciter les gens à tuer». Pour faire face à cette situation, le politologue propose de mettre en place des centres de recherche en sciences islamiques. «Nous avons des centres de recherches et des laboratoires en sciences sociales, mais pas en sciences islamiques», précise-t-il. Et de persister qu'il faut casser les tabous dans la recherche. M.El Korso estime que «nous sommes doctrinalement amnésiques». La mosquée est-elle aujourd'hui un réservoir de kamikazes? A cette question, El-Korso dénonce le fait de négliger le rôle important joué par les zaouïas, les mosquées et les religieux dans la libération de l'Algérie du colonialisme. «On ne peut nier le grand rôle de l'Association des oulémas algériens dans la sensibilisation des Algériens». En d'autres termes, M.El Korso défend que le kamikaze «se donne la mort pour une cause juste de son point de vue» et du point de vue de son imam. A propos des prêches du vendredi, Cheikh Bouâmrane souligne la nécessité de la contribution de l'Etat pour mieux contrôler les discours religieux. «Il faut une formation pédagogique pour les imams. Il faut les former dans les instituts et dans les universités. Chaque partie, notamment, doit jouer son rôle pour lutter contre le terrorisme et contre la pauvreté.» Pour lui, il faut créer «des groupes de réflexion» pour prendre en charge le volet pédagogique. Faut-il séparer la politique du religieux? Cheikh Bouâmrane est catégorique. «Les deux sont des choses indissociables. On ne peut pas les séparer, mais on doit plutôt les distinguer l'une de l'autre». De son côté, Me Benbraham, avocate, est revenue sur la naissance du concept terrorisme dans le monde musulman. Elle propose de traiter ce phénomène avec beaucoup de précautions. Enfin, celle-ci sensibilise les familles à surveiller leurs enfants, car le problème est à la fois politique et socioéconomique.