C'est un pays sur les dents qui a accueilli le chef de la Maison-Blanche, lequel se rend pour la première fois dans cette région marquée par le conflit israélo-arabe. Le chef de l'administration républicaine américaine, George W.Bush, est arrivé mardi soir dans un pays sur les dents -alors que les forces de sécurité faisaient le siège de l'hôtel King David où l'hôte d'Israël est descendu- confortant d'emblée, dans sa première déclaration, l'irrédentisme israélien. Dès qu'il a pris pied sur le tarmac de l'aéroport de Tel-Aviv, le président Bush a eu ces mots qui suscitent l'interrogation: «L'alliance entre nos deux pays contribue à garantir la sécurité d'Israël en tant qu'Etat juif.» Exactement ce que les Israéliens voulaient entendre quant à la nature de leur Etat fondé sur la religion, cette qualification constituant même le principal obstacle dans les négociations entre Palestiniens et Israéliens. En fait, ce n'est guère là une surprise de la part de dirigeants américains qui ont fait ces dernières années du soutien sans condition à l'Etat hébreu -qu'il ait tort ou raison- l'axe principal de leur politique moyen et proche-orientale. M.Bush ne déroge donc pas à la tradition qui fait d'Israël le «pont avancé» de l'Occident en pays «ennemis». Et surtout cette qualification d'Israël «d'Etat juif» de la part du chef de la première puissance mondiale, renvoie en fait dans les limbes près de deux millions d'Israéliens arabes qui se voient ainsi confirmée dans un statut de «second collège» donnant ainsi une visibilité particulière aux non-juifs israéliens. Ainsi, dès son arrivée en Israël, M.Bush donne sa bénédiction à la politique d'apartheid de l'Etat hébreu. De fait, à Tel-Aviv, George W.Bush s'est exercé à un discours convenu qui n'apporte aucun élément nouveau au problème de l'heure: la création de l'Etat palestinien indépendant duquel en vérité, dépend la sécurité d'Israël, car cet Etat serait garant de la paix dans la région. M.Bush n'a pas non plus mis en garde son protégé israélien sur ses actions militaires dans les territoires palestiniens qui vont à l'encontre des attendus de la conférence d'Annapolis censée remettre en marche le processus de paix israélo-palestinien. George W.Bush a encore dit, s'adressant aux responsables israéliens venus l'accueillir: «Nous ferons plus que nous défendre» (contre l'extrémisme), «nous recherchons une paix durable. Nous voyons une nouvelle chance pour la paix, ici en Terre Sainte, et pour la liberté dans toute la région». Certes, mais de quelle paix parle le président américain? D'une paix universelle négociée, d'égal à égal, entre Palestiniens et Israéliens ou seulement de la «pax israéliana», dans laquelle Israël serait le maître d'oeuvre, surtout lorsque M.Bush évoque la «paix» et la «liberté» pour toute «la région» quand les Palestiniens, sous le joug de l'armée israélienne et dont les Territoires sont fractionnés par Israël, ne connaissent ni la paix et encore moins la liberté? Aussi la question qui se pose c'est de savoir ce que va dire M.Bush aux Palestiniens, lui qui sera aujourd'hui l'hôte du président Abbas. Cela risque d'être la curiosité du voyage présidentiel dans les territoires occupés. Par ailleurs, le président Bush sera vraisemblablement le seul homme d'Etat étranger en visite à Ramallah à ne pas se recueillir sur la tombe de Yasser Arafat. M.Bush qui accusait le président défunt palestinien de «terrorisme» ne l'a d'ailleurs jamais rencontré. Aussi, il y a fort à parier que le «voyage» de George W.Bush au Proche-Orient ne sera qu'une simple tournée des popotes, une visite de fin de mandat qui n'apportera rien de positif au contentieux maintenant sexagénaire opposant Palestiniens et Israéliens.