Il se précise que les autorités kosovares proclameront l'indépendance de la province ce dimanche. Le Premier ministre kosovar, Hashim Thaçi, qui devait donner hier une conférence de presse devant la presse internationale - spécialement convoquée hier pour l'événement - doit à cette occasion annoncer la date de la proclamation de l'indépendance prévue pour demain, dimanche. De fait, le Parlement du Kosovo est convoqué pour ce 17 février. Belgrade, qui s'oppose, avec l'appui de Moscou, à l'indépendance de la province kosovare, indique que la Serbie «annulera» cette proclamation et «ne reconnaîtra jamais» l'indépendance. Mais il semble que cette annulation sera à tout le moins formelle et ne changera pas grand-chose à la donne ainsi établie, d'autant plus que les Etats-Unis et l'Union européenne soutiennent fermement l'indépendance du Kosovo. Il est patent cependant que cette nouvelle donne risque d'induire pas mal de changements dans les Balkans et plus généralement en Europe où de nombreuses minorités luttent pour leur autonomie ou leur indépendance. De fait, Moscou a averti hier que la proclamation de l'indépendance du Kosovo aura des répercussions sur sa politique vis-à-vis des territoires séparatistes géorgiens, pro-russes d'Ossétie du Sud et d'Abkhazie, a indiqué hier l'agence russe Interfax. Cependant, le ministère russe des Affaires étrangères a démenti que Moscou envisage un «changement de politique». Entre-temps, les choses se sont accélérées hier à Pristina, capitale du Kosovo, où le Parlement a adopté une motion lui donnant d'approuver en 24 heures les lois liées à l'indépendance, dans le même temps où le Premier ministre Hashim Thaçi se préparait à donner une conférence de presse sur ce même sujet. Le changement de procédure d'adoption des lois va permettre au Parlement d'entériner rapidement les documents prévus, dans le cadre du plan de l'envoyé spécial de l'ONU pour le Kosovo, Martti Ahtisaari, qui préconise une indépendance de la province sous «supervision internationale» et une large autonomie pour la minorité serbe (un peu moins de 10% de la population). D'ailleurs, la nouvelle Constitution kosovare, qui sera mise en application dès la proclamation de l'indépendance, s'inspire largement du document de l'envoyé spécial onusien. La Serbie et la Russie qui menaient, jeudi encore, un combat d'arrière-garde, ont demandé une réunion urgente du Conseil de sécurité de l'ONU. «Que ce soit clair: la Serbie n'acceptera jamais aucune violation de son intégrité territoriale. Nous ne reconnaîtrons jamais l'indépendance du Kosovo», a déclaré le ministre serbe des Affaires étrangères, Vuk Jeremic. «Nous n'y renoncerons pas, même si cet acte lâche n'est pas empêché. Pas maintenant. Pas dans un an. Pas dans une décennie. Jamais. Le Kosovo fera partie de la Serbie pour toujours», a-t-il déclaré lors de la réunion organisée jeudi au Conseil de sécurité. «Nous prendrons toutes les mesures diplomatiques, politiques et économiques pour empêcher et inverser cette attaque directe et non provoquée sur notre souveraineté», a encore dit le chef de la diplomatie serbe. De son côté, l'ambassadeur de Russie, Vitaly Tchourkine, a condamné le projet de proclamation d'indépendance du Kosovo, que Moscou considère comme «une violation flagrante du droit international». Ces condamnations russes et serbes, semblent aujourd'hui de pure forme devant l'avancée des événements alors que l'Union européenne se prépare à accompagner l'avènement de la nouvelle République du Kosovo. En effet, l'UE était sur le point de donner (à partir d'hier à minuit, 23h00 GMT) son feu vert au lancement de sa mission de policiers et juristes, Eulex, qui doit accompagner les premiers pas du Kosovo indépendant, selon des sources diplomatiques à Bruxelles. En fait, ce sera là le début du compte à rebours pour la relève par les Européens de la mission de l'ONU (Minuk). Celle-ci, qui administre le Kosovo depuis 1999, gardera ses pouvoirs, avant de les transmettre au gouvernement kosovar, conseillé et surveillé par la mission européenne «Eulex». Le Kosovo indépendant s'annonce comme un coup de force des grandes puissances occidentales qui introduisent de la sorte une inconnue non seulement en Europe -ou plusieurs minorités ethniques réclament leur autonomie-, mais également dans le monde. Une boîte de Pandore semble bien avoir été ouverte au Kosovo.