La pièce de théâtre Fatma se veut une oeuvre universelle. Après avoir enflammé les planches de Tamanrasset et du TNA, la pièce de théâtre Fatma, présentée à la salle Errich de Bouira, mercredi dernier, a fait salle comble. Le produit, dont la version originale a été écrite par Benguettaf en langue française, et traduite en arabe par l'auteur lui-même. La version kabyle est de Mohand Nath Yeghil, et sa mise en scène a été confiée à Hamida Aït El Hadj. Une dramaturge qui continue d'apporter, à chaque nouvelle production artistique, une touche d'originalité, et des mises en scène qui marquent son empreinte et son génie. Comme d'habitude, Hamida Aït El-Hadj nous invite à un voyage de découverte. La fameuse pièce Le Fleuve détourné adaptée du roman du grand écrivain Rachid Mimouni, par Omar Fetmouche et mise en scène par Aït El-Hadj, a connu un immense succès sur la scène artistique nationale, avec la parution pour la première fois sur scène du rappeur Lotfi. Cette fois-ci, avec la pièce Fatma, le rendez-vous a été donné pour découvrir une autre comédienne talentueuse: Razika Ferhane, jeune artiste connue dans les feuilletons El Bedhra et Hal oua Ahoual; elle a entamé sa première expérience sur les planches dans le rôle de Fatma. Une mission qui s'est avérée difficile mais réussie. Fatma, ou tout simplement le destin outragé d'une femme. Les événements se déroulent dans un espace où toute la vie sociale y est présente. Du haut de la terrasse d'un immeuble où Fatma, orpheline et esseulée, s'y rend pour faire le ménage, elle porte un regard amer sur la situation de l'être faible. Solitude, violence conjugale et tradition «légiférée» que traîne comme un boulet la femme. Tout est tabou pour que la femme renonce à ses aspirations. Le monologue est interprété par cette jeune et prometteuse comédienne, qui a su emballer le public bouiri à travers une extraordinaire aventure, purement artistique, par son élégance et sa souplesse dans le rôle de Fatma, et ce, grâce au verbe utilisé dans lequel elle a excellé. Cette pièce reste un appel du coeur d'une frange réduite au grand silence, dans un monde où l'homme fait et défait les lois, non seulement il est fort, mais il est homme. Contrairement à la version Benguettaf, où la femme paraissait sous l'aspect le plus agressif, ici, elle est hautaine et déterminée; elle s'impose à l'homme qui est réduit aux plus extravagantes soumissions. Hamida Aït El-Hadj a tout bouleversé, en prenant le revers de la médaille en filigrane, dans la condition féminine. Dans un souci de dire le mal que vivent tant de femmes dans notre société, le message est peut-être passé, et cela, malgré les différences ethniques ou linguistiques. Un message qui se dit sans frontière, un hymne à la délivrance de la femme des mille et un tabous qui ne cessent de l'empêcher de s'épanouir et de percer dans un monde fait d'hommes et de traditions. Fatma relate le quotidien de la femme algérienne, victime à la fois de la tragédie nationale et encore de la nouvelle vision mondiale qui oeuvre pour la restructuration de tous les ordres, sociaux, moraux. «Fatma se veut universelle», a déclaré Hamida Aït El-Hadj lors d'un point de presse. Au cours de la pièce, Fatma s'est arrogée le droit d'être heureuse malgré sa solitude et ses amours contrariées. Ce qui confère à la pièce la dimension d'un chef-d'oeuvre en matière de défense et de lutte pour l'émancipation de la femme. Par ailleurs, en marge de cette soirée théâtrale, la direction de la culture de la wilaya a rendu hommage au jeune romancier de la langue amazighe, Tahar Ould Amar, auteur d'un roman intitulé Bururu (hibou), qui a décroché récemment, le premier prix Apulée de la Bibliothèque nationale pour le roman d'expression amazighe.