Les crimes maritimes ne peuvent être traités convenablement par des tribunaux ordinaires. L'un des facteurs influant sur l'augmentation du nombre de candidats à l'émigration clandestine, méconnus bien sûr, par les concernés, est «le vide juridique dans le dispositif législatif algérien» relatif à ce délit d'un genre nouveau. Cette situation a été déplorée mardi par le commandant Salah Boutadjine lors d'un séminaire intitulé «Action de l'Etat en mer» organisé à l'Ecole supérieure navale de Tamentfoust (Alger). Dans une communication remarquée, il a relevé qu'«aucun texte de loi ne punit le fait de prendre la mer à bord d'une embarcation». Ce vide juridique épouse une dimension tout autre aujourd'hui, car constituant un facteur certain dans l'augmentation du nombre de harragas. L'orateur a cependant relevé que, conformément aux dispositions des articles du Code maritime algérien, «l'embarquement clandestin sur un navire marchand à destination de l'étranger est un délit». Pour illustrer sa communication, il a rappelé qu'entre 2005 et 2007, période au cours de laquelle le nombre d'interventions en mer a connu une hausse de 991%, le nombre de personnes interceptées en mer est de 1568 dont 56 Marocains, 3 Maliens, 1 Congolais et 1 Ivoirien. Le nombre de clandestins interceptés en mer a ainsi augmenté de 1 086% dont 4,41% de nationalité étrangère. Il s'avère nécessaire, voire impératif et urgent, comme du reste l'a recommandé le commandant Boutadjine, que soient adoptés des textes juridiques concernant ce fléau, le renforcement des gardes-côtes en moyens humains et matériels, l'instauration d'une coopération interservices de sécurité et une réglementation régissant les embarcations de plaisance pour mieux contrôler le mouvement d'appartenance de cette flottille convoitée par les candidats à l'émigration clandestine. L'orateur a aussi suggéré la coordination dans la collecte de renseignements et leurs analyses par les différents services de sécurité sur le réseau du trafic d'immigration. Un bilan sur l'activité 2007 des gardes-côtes (Service national des gardes-côtes), présenté par le colonel Ali Bouchakour, fait apparaître que 1 082 migrants clandestins, dont 34 étrangers, ont été interceptés par la police maritime. Les éléments du Sngc ont, par ailleurs, saisi au cours de la même année plus de 166kg de stupéfiants, 54kg de corail, correspondant à plus de 815 millions de DA de conséquences financières. Une «nouvelle approche sur le crime maritime» a été suggérée aux pays maghrébins par un intervenant sur les caractères nationaux, régionaux et transnationaux relatifs au transport de drogue et contrebande dans la région du Maghreb. Il a été, par ailleurs, recommandé par le lieutenant-colonel Youcef Zerizer que «pour assurer sa double vocation, civile et militaire, le Sngc doit fonctionner comme un département extérieur des ministères des Transports, de la Pêche et des Finances et en même temps comme composante du commandement des forces navales.» Faute d'un pouvoir judiciaire dévolu au Sngc, déplore-t-il, les harragas ne sont retenus que «trois jours, avant de les remettre à la justice». Le lieutenant Zerizer a proposé la création d'un organe de coopération dont seraient membres des représentants de diverses autorités civiles et militaires, à savoir des représentants des ministères de la Défense, des Finances, des Transports, de la Pêche ainsi que ceux de l'Intérieur et de l'Environnement. Les travaux de cette rencontre ont été ouverts par le général Malek Necib, commandant des forces navales.