Jadis, l'abattage clandestin se faisait seulement dans les campagnes et contrées isolées, car dépourvues d'infrastructures. Au moment où certaines wilayas bannissent les pratiques ancestrales, usitées par manque de moyens adéquats, comme l'abattage d'ovins, bovins et de poulets dans des conditions qui ne répondent pas aux normes d'hygiène, la wilaya de Annaba, ville touristique, s'adonne toujours à cette pratique. L'implantation d'abattoirs légaux à travers la wilaya n'a pas empêché certains bouchers de recourir à ce procédé dans le but d'échapper au contrôle des vétérinaires, à l'image de Sidi Salem, une localité relevant du chef-lieu de la commune d'El Bouni, où l'élevage anarchique de bovins vivant des décharges grandeur nature, a permis aux chômeurs et aux vieux retraités de se lancer dans l'abattage clandestin, la commercialisation de lait impropre à la consommation et la vente de viande sans certificat de salubrité. Et cela sans aucun égard à la santé publique. Le plus souvent, ces commerçants agissent avec la complicité du maquignon qui propose au boucher ou au vendeur de viande la bête malade à un prix inférieur à sa valeur réelle. Ce dernier, véreux et sans scrupules, attiré par le gain facile, ne rate pas l'aubaine. Dans cette transaction illicite, le consommateur est certes victime mais aussi complice en s'approvisionnant dans les marchés de fortune, comme celui de Sidi Salem, ou au souk hebdomadaire, à l'image de celui de la localité de Seybouse. Quant à la santé du consommateur, c'est le dernier souci de ces marchands à la sauvette. Certes, les services de contrôle de la qualité font l'impossible pour mettre fin à ces pratiques moyenâgeuses mais n'arriveront jamais à bout de ces spéculateurs sans la collaboration du citoyen. Celui-ci, au même titre d'ailleurs que le fonctionnaire de la répression des fraudes, doit être vigilant au moment de l'achat de viande. Cette situation n'est pas unique et spécifique à Sidi Salem car, c'est aussi le cas de la localité de Boukhadra, commune d'El Bouni, Berrahal et Aïn El Barda, connues pour leur spécialité de grillade. Les restaurants implantés au niveau des chef-lieux de communes de Berrahal et Aïn El Berda, s'approvisionnent en viandes provenant, pour la plupart du temps, d'abattages clandestins. Une virée sur les lieux nous a permis de rencontrer, tôt le matin, un fournisseur sur le point d'alimenter son client en viande ovine, fraîchement abattue. L'interlocuteur qui a voulu garder l'anonymat nous a révélé que le prix du kg en gros est de 480DA. Ce prix alléchant ne peut être que convoité, puisqu'au retour, il générera des bénéfices considérables pour les «sans-scrupules». Toutefois, il convient de rappeler que le contrôle est de rigueur dans la plupart de ces localités où l'abattage clandestin devient de plus en plus intense. Sauf que depuis le débrayage des vétérinaires, le phénomène a pris des proportions alarmantes. Depuis onze jours, les vétérinaires refusent de délivrer les certificats de conformité ce qui a facilité la tâche à ces «maquignons» pour intensifier leur commerce «juteux» en approvisionnant quotidiennement aussi bien les restaurants que les milieux scolaire, universitaire ou autres. Approché, le représentant de la qualité de la DCP de Annaba fait état de la saisie, durant cette période, de plus de 500 kg de viande non certifiée. «Certains documents étaient rédigés à la main. Ce qui n'est pas conforme ni valable même s'il porte la signature du vétérinaire», souligne-t-il. Comme il a été procédé à la saisie de 200kg de dinde durant la même période pour les mêmes motifs. Quand aux produits impropres à la consommation, les mêmes services ont saisi 5kg d'abats, 6kg de merguez, 7kg de viande hachée et 9kg d'escalope. Ces produits ont été systématiquement incinérés. Le montant de ses saisies est évalué à 183.297DA. Si les vétérinaires persistent dans leur mouvement, la situation risque de prendre des proportions démesurées. D'autant plus que les grandes chaleurs approchent. Cependant, il y a lieu de souligner que le phénomène de l'abattage clandestin ne date pas d'hier. Il est plutôt le fruit du laxisme des services concernés.