Des universitaires islamiques et d'anciens militants désavouent publiquement la légitimité de la nébuleuse terroriste. La lutte contre le terrorisme international bat son plein. Le réseau d'Al Qaîda perd du terrain, notamment après que des universitaires et d'anciens militants et des exégètes, dont l'autorité morale est incontestable, l'ont condamnée. Dans un entretien accordé, il y a quelques jours, au Washington Post, le directeur de l'Agence centrale du Renseignement (CIA), Michael Hayden, a déclaré: «Dans l'ensemble, cela se passe plutôt bien. La défaite stratégique d'Al Qaîda en Irak et en Arabie Saoudite est imminente. Ce groupe terroriste a également essuyé de considérables revers dans le monde - et je ne vais pas hésiter à dire sur le plan idéologique - parce que le monde islamique repousse de plus en plus sa vision de l'Islam». Contacté par L'Expression pour comprendre pourquoi le Gspc n'a pas été cité dans les propos du directeur de la CIA, un responsable algérien chargé du dossier de la lutte antiterroriste a soutenu qu'«aux yeux des partenaires internationaux, l'Algérie a vaincu le terrorisme et, de ce fait, la déchéance du Gspc et des autres groupes terroristes n'est pas à démontrer». Une déclaration en concordance avec les propos tenus dernièrement par la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, qui a affirmé que l'Algérie est «championne» de la sécurité régionale et internationale et «un leader reconnu en Afrique du Nord et au-delà». La nébuleuse terroriste «Al Qaîda» perd du terrain grâce au renforcement de la coopération internationale, à la lutte contre le terrorisme et au nombre croissant d'universitaires islamiques et d'anciens militants qui désavouent publiquement sa légitimité. Naâman Ben Otman, un ancien militant libyen qui a combattu aux côtés de Ben Laden en Afghanistan, a publié une lettre ouverte à Al Qaîda, l'exhortant à cesser ses attaques contre le monde arabe et l'Occident. Cette lettre a suscité un vif débat dans l'ensemble du Moyen-Orient. Un autre ancien chef terroriste, Sayed Imam Al-Chérif, ami proche de Aymen el-Zawahiri, a publié un livre en épisodes dans des journaux égyptiens. Ce livre dénonce la manipulation de la théologie islamique pour justifier la violence. M.Al-Chérif, aussi connu sous le nom de Dr Fadl, est l'auteur d'un nouvel article intitulé The Rebellion Within: An Al Qaîda Mastermind Questions Terrorism, publié par Lawrence Wright dans le numéro de juin 2008 du New Yorker. Il a étudié avec Al-Zawahiri en Egypte dans les années 60, et les deux hommes ont fondé Al-Djihad, un groupe terroriste qui est devenu un élément-clé de la future Al Qaîda. Tout en maintenant ses vives critiques contre l'Occident, Al-Chérif s'est retourné contre le groupe qu'il a contribué à fonder. «Zawahiri et son commandant Ben Laden sont extrêmement immoraux. J'en ai parlé afin de prévenir les jeunes contre eux, des jeunes qui sont séduits par eux et qui ne les connaissent pas.» Dans un article publié dans le magazine The New Republic, au début de ce mois, Peter Bergen et Paul Cruickshank estiment que «Al Qaîda et les groupes qui y sont affiliés ont fait des milliers de victimes musulmanes depuis le 11 septembre 2001: des centaines de simples citoyens afghans tués chaque année par les talibans, des dizaines de Saoudiens tués par des terroristes depuis 2003, des Jordaniens massacrés lors d'un mariage qui se déroulait dans un hôtel américain à Amman en novembre 2005. Tout cela a poussé les musulmans à prendre conscience du fait que le virus idéologique déclenché lors des attaques du 11 septembre et des attentats perpétrés à Londres et à Madrid est le même que celui qui fait aujourd'hui des ravages dans le monde musulman.» Il y a lieu de s'interroger, dans cette optique, pourquoi les Etats-Unis persistent-ils à dire que le phénomène du terrorisme n'a commencé qu'avec les attentats de 11 septembre 2001? Et la décennie tragique qu'a vécue l'Algérie, dans quelle case faudra-t-il la placer? Ce sont là des questions auxquelles, du moins pour le moment, aucune réponse fiable et exacte ne peut être fournie.