La rencontre de Marseille entre les chefs des diplomaties européenne et arabe est marquée par l'incertitude. L'heure des bilans a sonné pour l'UPM. Cinq mois après son lancement à Paris, un certain 13 juillet 2008, le projet de l'Union pour la Méditerranée stagne dans sa première phase. Afin d'établir un premier bilan sur le chemin parcouru, les ministres des Affaires étrangères des pays membres, à savoir les 27 membres de l'Union européenne et 16 pays de la rive sud, sont en réunion depuis hier à Marseille afin d'établir une première évaluation du projet. Cette rencontre intervient dans une conjoncture qui diffère de celle ayant présidé au sommet du lancement de l'organisation à Paris. Des blocages persistent. L'une des questions qui soulèvent l'interrogation, est celle de la présence de la Ligue arabe aux réunions de l'UPM, qui déjà semble susciter la controverse. Israël conteste la participation de la Ligue arabe en tant qu'entité. En soulevant cette question, Tel-Aviv semble d'ores et déjà vouloir façonner les contours de ce que doit être l'Union pour la Méditerranée. Le veto qu'Israël semble ainsi imposer à la présence de la Ligue arabe semble avoir eu ses premières retombées négatives. Ainsi, la réunion ministérielle, ayant pour thème l'eau, première du genre dans le cadre de l'UPM, qui devait se tenir en Jordanie le mois dernier, est ainsi tombée à l'eau, puisque annulée. Le refus d'Israël de voir la Ligue arabe présente aux travaux a provoqué le report de cette réunion. Ce n'est là que le premier couac d'une Union pour la Méditerranée mal conçue. En fait, dès le départ il semble qu'il y a eu maldonne dans la mesure où les 27 Etats membres de l'UE, y compris les pays n'ayant pas de rivage avec la Méditerranée, en sont partie prenante, alors que ce n'est pas le cas pour les pays arabes membres de la Ligue arabe. Il n'y a aucune raison en fait que le Danemark et la Pologne (juste un exemple) soient membres de l'UPM, mais pas le Koweït ou le Qatar. Le guide libyen Mouamar El Gueddafi a eu quelque part raison de refuser de participer au lancement de l'UPM en faisant valoir qu'il n'acceptait pas que l'Union européenne soit entièrement impliquée, alors que la Ligue arabe et l'Union africaine en sont exclues. L'autre point qui fait problème, concerne le secrétariat général et le siège de l'UPM pour lesquels quelques candidats se sont manifestés, notamment le Maroc et la Tunisie. Or ces deux pays se sont récemment désistés et ne postulent plus au secrétariat général pour le premier et à l'accueil du siège pour le second, poste et siège qui n'intéressent désormais que l'Espagne et la France qui assure, en outre, la coprésidence de l'UPM avec l'Egypte. Il y a lieu, cependant, de s'interroger sur ce qui a pu pousser Rabat et Tunis à retirer leur candidature. Pour le moment, beaucoup de questionnements quant à ces désistements, mais peu de réponses, à moins que la réunion de Marseille n'éclaire un peu plus sur les tenants de cette affaire. Ce qu'il y a à constater en revanche, est le fait qu'aucun pays de la rive sud ne manifeste sa propension à briguer des postes de responsabilité au sein de l'UPM. Il ne reste que l'Egypte qui assure, avec la France, une coprésidence assez symbolique. Il y a quelques semaines, le secrétaire d'Etat espagnol aux Affaires étrangères, Angel Lossada, a effectué une visite en Tunisie où il avait évoqué avec les responsables tunisiens les préparatifs de la réunion de Marseille. La Tunisie s'est-elle désistée au profit de la ville de Barcelone, qui a accueilli en 1995 l'Euromed, ou Processus de Barcelone? Toutefois reste le fait qu'une UMP avec toutes ses institutions installées en Europe ne reflète aucunement l'esprit qui a présidé à sa fondation. Des clarifications sont donc attendues de la part des promoteurs de ce projet. L'autre point qui peut freiner le développement de ce nouveau cadre de coopération entre les deux rives de la Méditerranée, est lié à la question du financement de l'UPM. La question n'a pas été tranchée en fait, d'autant plus que l'Union européenne n'est guère enthousiaste à prendre en charge ce volet, pourtant crucial pour le fonctionnement de l'organisation. Les seuls pays qui peuvent participer au financement de l'UPM sont encore les pays riches membres de la Ligue arabe, exclus de fait. Mais peut-on demander à des Etats qui ne sont pas membres de droit ou de facto d'une organisation, de la financer néanmoins? La réunion de Marseille des chefs de la diplomatie de l'UPM, apportera-t-elle des réponses à ces questionnements? Attendons pour voir!