Masque de l'un, miroir de l'autre, Arezki Mellal choisit le nez rouge de la farce pour ce huis clos désopilant... Le racisme ordinaire a de l'avenir hélas, et les clichés aussi. A fortiori, le rapport humain nord-sud. Afrique versus Occident. Cette pièce de théâtre adaptée du roman d'Arezki Mellal, En remontant le Niger, le démontre bien. Présenté dimanche et lundi derniers sur initiative du Centre culturel français, cette pièce mise en scène par la Yougoslave Maria Zachenska jette sa trame au bord du Niger. Accompagnés d'un guide local, une mère, Isabelle et son fils Désiré, embarquent pour l'Afrique que l'on croit peuplée ou infestée d'hommes masqués, de magie noire et de guerres...Les fantasmes de la mère lubrique, les appétits mercantiles du rejeton mal aimé, mal aimant, prêt à tout pour parvenir à ses fins, tuer sa mère et hériter de son argent, son rire gras et ses plaisanteries balourdes font face, le regard amusé, consterné, à demi-complaisant, de Moussa-Lustucru...Lui n'est pas blafardé et maquillé à outrance comme les deux autres personnages, portant en eux outrageusement la marque de fabrique du «blanc» conquérant qui sait tout...Masque de l'un, miroir de l'autre, Arezki Mellal choisit le nez rouge de la farce pour ce huis clos désopilant qui donne à la fois la nausée et les mains sales. Si la caricature est présente, la dénonciation se veut sous-jacente, claironnée en geste fanfaron et claire. Si les chèvres et autres animaux sont abattus pour sauver la quiétude de la mosquée, la pollution de la rivière et la mort des poissons est un cri sans appel, jeté à la mer et dont l'objet du crime n'est autre que le mercure dévastateur dû à ses mines d'or que viennent creuser ces Européens. Ceux-ci contribuent à créer l'anarchie en terre d'Afrique en fournissant à ses habitants des armements à même de faire tourner la machine, comme finira par expliquer Isabelle, tombée en béatitude devant Moussa. Et ce ne sont pas les ONG qui feront bouger les choses. «Ne me dites pas que les enfants jouent à la guerre!» crie, interloquée, Isabelle devant la sérénité consternante de Moussa. Peut-être que personne n'est tout à fait bourreau, ni tout à fait victime. En tout cas, cette pièce donne à réfléchir.