Capitale de l'or noir, l'espace d'un jour, Oran pourrait rentrer dans l'histoire si la chute des prix du pétrole était enrayée. L'Algérie joue son prestige au même titre que l'Organisation pétrolière dont elle fait partie. Chakib Khelil, qui en assume la présidence, le sait. C'est pourquoi, la décision d'Oran devrait être aussi spectaculaire que fut la dégringolade des prix du pétrole. Ils ont perdu près des deux tiers de leur valeur depuis le 11 juillet 2008, où il avait établi le record historique de 147 dollars. Le ministre algérien de l'Energie et des Mines n'a pas caché que des «décisions importantes» seront prises à Oran à la mi-décembre. «Si nous ne prenons pas nos dispositions, il y aura des retombées négatives à court terme en raison de la baisse de l'offre sur le marché et la hausse des prix dans les deux prochaines années», a averti Chakib Khelil. A l'issue de la réunion du Caire, et après avoir passé en revue la situation et les perspectives de l'économie mondiale, puis étudié ses éventuelles conséquences négatives, notamment sur la demande mondiale de pétrole, le consensus semblait être fait autour d'une nouvelle baisse de quelque 2 millions de barils par jour. La décision sera prise à Oran, le 17 décembre. «Il y a un consensus général pour une action, lors de la prochaine réunion», avait affirmé, samedi au Caire, Abdallah El Badri, le secrétaire général de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole. L'économie mondiale est en panne sérieuse. La demande de pétrole s'amenuise. Les prix du pétrole dégringolent. Tous les ingrédients sont réunis pour que l'Opep décide d'une troisième baisse en quelque quatre mois. La dernière en date, de 1,5 million de barils par jour, décidée le 24 octobre à Vienne, n'a été d'aucune efficacité. La prochaine représentera au minimum le même volume. «L'Opep a donné des signes en faveur d'une baisse de 1,5 à 2 millions de barils par jour», selon Raâd Al Kadiri, analyste de PFC Energy. En tous les cas, les 12 membres du cartel doivent réagir vite, car il y a déjà le feu à la maison. Il faut donc l'éteindre avant qu'il ne soit trop tard.Les déclarations d'Al Kadiri rendent compte d'une situation préoccupante. «L'Opep fait face aux circonstances les plus dures depuis dix, voire trente ans», a estimé l'analyste de PFC Energy. Les fantômes de la crise asiatique, il y a une dizaine d'années, qui ont fait chuter le baril de pétrole à 10 dollars, frappent aux portes de l'Opep. La Russie, qui risque de subir de graves préjudices, est prête à coordonner avec l'Opep. «La situation ne peut qu'inquiéter la Russie, le Venezuela et les autres pays exportateurs», avait confié le président russe, Medvedev, à Caracas, lors de son voyage au Venezuela. Russie-Opep, un duo de poids pour inverser une tendance à la hausse du prix de l'or noir. Du côté de Téhéran, on ne semble pas vouloir tourner trop longtemps autour du pot. «Il y a un excédent de 2 millions de barils par jour sur le marché, et nous cherchons à créer un équilibre entre l'offre et la demande», a déclaré le ministre iranien du Pétrole, Gholam Hossein. C'est donc vers une baisse de 2 millions de barils par jour que convergent tous les pronostics. Avec une telle décision, la réunion extraordinaire des pays membres de l'Opep pourrait s'inscrire dans l'histoire qui a jalonné l'existence du cartel. Au même titre qu'Alger fut, dans les années 60, «la Mecque des révolutionnaires», la ville d'Abdelkader Alloula pourrait devenir la capitale de l'or noir, à titre même symbolique. Celle où un jour de décembre 2008 fut scellé l'avenir du baril de pétrole. Le défi est double: il s'agit d'enrayer la chute du prix de pétrole et montrer à la face du monde que l'Algérie est aussi une place où peuvent se prendre des décisions importantes pour l'économie mondiale et son équilibre. Que les pays soient pauvres, riches ou émergents, les populations de la planète doivent, non seulement apprendre à coexister, mais aussi à partager.