Fathallah Sijilmassi quitte la capitale française après avoir tenté de manipuler des députés de l'Hexagone. Par des courriers qui devaient rester confidentiels, le diplomate du Royaume chérifien avait instruit les consuls généraux du Maroc de faire des pieds et des mains pour rallier les députés et les sénateurs français au projet d'autonomie marocain pour le Sahara occidental. Selon toute vraisemblance, des fuites organisées ont porté cette sournoise affaire sur la place publique. L'ambassadeur du Maroc a-t-il été victime de sa propre initiative? Toujours est-il que l'ambassade du Maroc à Paris a été mise sens dessus dessous. Une enquête a été diligentée pour débusquer celui ou ceux qui ont failli à leur mission. Le sémillant diplomate du Royaume chérifien s'est retrouvé sur la sellette. Dès lors, les jours de Fathallah Sijilmassi à la tête de l'ambassade du Maroc étaient comptés. Les protections de haut niveau qu'on lui prêtait n'ont apparemment pas été assez efficaces. Son épouse n'est autre que la cousine du ministre des Affaires étrangères du Maroc, Taïeb Fassi Fihri. Dans la foulée d'un vaste mouvement qui a touché pas moins de 15 pays, Mohammed VI a procédé à la nomination d'un nouvel ambassadeur en France, mercredi dernier. L'opération, qui s'est faite finalement en douceur, est passée comme une lettre à la poste. Le scandale a pu être circonscrit sans qu'il n'y ait trop de vagues. L'affaire de lobbying menée par Fathallah Sijilmassi auprès des élus français, en faveur du plan d'autonomie marocain, était qualifiée par de nombreux observateurs de tentative de corruption. Cela commençait par sentir le soufre. L'opération devait être pilotée par Jean Rotta, député UMP de Marseille et président du groupe d'amitié France-Maroc ainsi que par la présidente du groupe d'amitié France-Maroc, Paulette Brisepierre, sénatrice de la même formation politique. «Vous trouverez en pièce ci-jointe, une note explicative de la démarche marocaine qui, je l'espère, recueillera votre assentiment», avait écrit Jean Rotta à ses collègues pour les convaincre de rallier le projet marocain. L'affaire, une fois éventée, risquait de porter un sérieux coup à la crédibilité de la formation politique qui avait porté Nicolas Sarkozy au palais de l'Elysée. Rabat n'avait plus d'autre alternative que de rappeler son ambassadeur à Paris et de mettre fin à ses fonctions pour éviter d'un côté, l'incident diplomatique et de l'autre côté, maquiller les «ratés des services marocains». De nombreuses représentations diplomatiques du Royaume chérifien ont, en effet, été éclaboussées par des affaires d'espionnage mais aussi de trafic de documents officiels. Deux ressortissants hollandais d'origine marocaine ont été accusés d'avoir infiltré la police des Pays-Bas au profit des services marocains tandis que le consulat du Maroc à Montréal a été pointé du doigt pour avoir permis à six femmes d'entrer sur le territoire canadien sous couvert de passeports diplomatiques, alors qu'un trafic de faux diplômes fut mis au grand jour durant l'année 2007. Ces trois pays, le Canada, la France et les Pays-Bas, viennent de faire les frais du mouvement d'ambassadeurs décidé par Mohammed VI pour donner un nouveau visage à la diplomatie marocaine.