«Il faut faire la distinction entre les crimes commis par les autorités coloniales et la position du peuple français», a estimé Abdelhamid Mehri. L'ancien secrétaire général du FLN a estimé que demander le pardon à la France pour les crimes commis durant l'ère coloniale ne pouvait répondre à l'impératif d'assainir les relations entre les deux pays. «Le pardon ne suffit pas», a affirmé, hier, le conférencier, lors du forum culturel de la Radio nationale. Ce faisant, il a ajouté: «La question impose une analyse profonde des relations entre l'Algérie et la France. Celles-ci résultent d'un passif lourd de 132 ans de colonialisme et d'une résistance continue qui a abouti à une guerre de Libération féroce qui a duré 7 ans et demi. Cette réalité historique ne peut être occultée.» Autrement dit, une telle démarche implique la responsabilité de l'Algérie en tant qu'Etat souverain dans la consolidation des relations entre les pays voisins et ceux de la Méditerranée. Sur ce plan, Abdelhamid Mehri a estimé: «Effectuer une étude profonde de la période coloniale n'est nullement en opposition avec l'établissement de relations de coopération avec la France.» Cette démarche s'inscrit dans les traditions de la Révolution algérienne qui, de l'avis du conférencier, a toujours fait la distinction entre la responsabilité des autorités coloniales dans les atrocités commises en Algérie, et la nécessité de traduire l'élan de solidarité affiché par le peuple français en des relations d'amitié. Précision de Mehri qui a souligné: «Le soutien d'intellectuels et hommes publiques français à notre cause traduisait, pour nous, la position du peuple français à l'égard de notre combat. De ce fait, l'établissement des relations politiques entre les deux pays doit représenter le prolongement des liens entre les deux peuples.» Concernant la responsabilité de l'Etat français dans les crimes commis en Algérie, vis-à-vis du droit international, M.Mehri a déclaré: «Dans le texte de loi voté par le Parlement français, le 18 octobre 1999, il a été procédé au remplacement de la notion "opérations militaires en Algérie" par le concept "la guerre d'Algérie". Cette question n'a pas eu l'attention qu'elle mérite.» Lecture analytique faite, l'orateur a démontré que pendant les sept ans et demi qu'a duré la guerre de Libération nationale, la France n'a pas cessé de transgresser les lois internationales. Selon Abdelhamid Mehri: «Cela implique la responsabilité de l'Etat français à l'égard des instances internationales.» A l'opposé, la révolution algérienne, a souligné M.Mehri, s'est fixé comme ligne de conduite de se conformer aux lois internationales. En conséquence, Mehri a présenté l'équation politique qui en découle ainsi: «D'un côté un Etat membre de l'Organisation des Nations unies, voire de son Conseil de sécurité, qui enfreint la juridiction internationale et de l'autre une Révolution qui se conforme au droit international.» A l'époque, l'Algérie était considérée comme un département français. Donc, la responsabilité de la France était entièrement engagée en ce sens que l'Etat français menait une guerre contre une population qu'il était censé protéger. Effectuer un diagnostic déchirant mais honnête, de la période coloniale est à même de permettre à l'Algérie, pays colonisé, et à la France, pays colonisateur, d'engager des relations d'intérêts réciproques entre les peuples des deux nations. Au révisionnisme politique, voire politicien, il faut opposer une révision objective dénuée de spéculations et de surenchères contre-productives.