Sa levée est une prérogative du Président de la République. La reconduction de Zerhouni et d'Ouyahia dans le nouveau gouvernement semble conforter la thèse selon laquelle l'état d'urgence s'étalera encore dans le temps. Les deux personnalités ont eu déjà à s'exprimer sur cette mesure. Pour Zerhouni, la levée de l'état d'urgence est «un sujet qui mérite débat», alors que Ouyahia a tout simplement jugé que la levée d'une telle mesure est inutile en l'état actuel des choses. Aussi l'état d'urgence porte-t-il en filigrane de très grands enjeux et exprime-t-il les degrés d'influence au sommet de l'Etat? Zerhouni, dont le départ du gouvernement aurait été perçu par certains comme «une mesure d'apaisement», a été tout bonnement reconduit. Ouyahia, l'homme le plus décrié aussi bien dans son parti, le RND, qu'au sein de l'ex-gouvernement, reste dans le giron du pouvoir, même si son rôle demeure pour le moins flou: ministre d'Etat et conseiller personnel auprès du Président. Les autres officiels, qui se sont exprimés sur cette mesure antinomique à un Etat démocratique, l'ont fait à titre personnel ou au nom de leur parti. Le chef de cabinet du Président Bouteflika, Larbi Belkheir, n'avait pas vu d'inconvénient, il y a quelques mois, s'exprimant en son nom personnel, dans les colonnes du journal Le Monde à la levée de l'état d'urgence. Il faut signaler que la levée de l'état d'urgence est une prérogative du Président de la République. S'adressant à la Commission nationale de promotion et de protection des droits de l'homme, le chef de l'Etat a décrié en avril dernier: «L'élaboration du plan national pour les droits de l'homme permettra notamment une meilleure lisibilité des normes les encadrant devra aboutir à terme à ôter toutes les formes de l'arbitraire, tous les alibis législatifs et réglementaires qui pouvaient, par leur insuffisance, leur servir de caution.» L'état d'urgence décrété en 1992 par le HCE (Haut comité d'Etat), une institution non élue, et en l'absence d'une Assemblée (dissoute par Chadli), est une mesure anticonstitutionnelle. Ni le CNT (Conseil national de transition) ni l'Assemblée élue de 1997 n'ont eu à entériner l'état d'urgence. Seul un décret présidentiel aurait donné une légalité à cette mesure. Ni l'ex-Président Zeroual ni Bouteflika ne l'ont fait. A la suite de la détérioration du climat sécuritaire au lendemain de l'arrêt du processus électoral, le président du HCE, feu Boudiaf, après avoir réuni le Haut Conseil de sécurité et consulté le chef du gouvernement Sid-Ahmed Ghozali, a signé le décret portant instauration de l'état d'urgence le 9 février 1992. «L'état d'urgence est proclamé à compter du 9 février 1992 pour une durée de 12 mois sur l'ensemble du territoire national. Il peut être néanmoins levé avant cette date» (art.1 du décret). Pourquoi maintien t-on ce décret 10 ans après? A quoi sert l'état d'urgence si le terrorisme n'est pas circonscrit? s'interrogent aujourd'hui les observateurs.