Huit ans se sont écoulés depuis l'élimination du sanguinaire Sayah Attia alias Abou Younès, l'un des neuf chefs de zone du GIA. On croyait que les rescapés de sa Katiba El-Khadra étaient réduits à se terrer définitivement après l'extermination du fils de Sayah, ses deux frères Ahmed dit «Rouget» et Kouider, de Djeriba, Regab, Aïnougrad et des frères Matmoura. Pour preuve, la tristement célèbre katiba El-Khadra ne comptait plus, selon le décompte fait par des spécialistes de la chose sécuritaire, qu'une dizaine de rescapés dont on entendra d'ailleurs plus parler. En réalité, ceux qui ont échappé aux opérations des forces combinées observeront, à partir de 1997, une longue «hibernation» rendue nécessaire par le maillage sécuritaire de la ville. A Ksar El-Boukhari, ancien fief de combat régional du GIA, rien, désormais, ne se passait plus; et seules les troupes du Gspc menées par l'émir Abdelkader Saouane, alias Hadj Belgacem, sévissaient, épisodiquement, à partir des massifs forestiers de Derrag (sud-est de Médéa), jusqu'à la wilaya de Aïn Defla. Les rescapés de Katiba El-Khadra élaboraient, en fait, une pratique entièrement nouvelle de la clandestinité en se gardant, bien entendu, de préparer toute action armée. La preuve? Aucun acte terroriste n'a été enregistré avant l'arrestation, il y a deux ans, d'un membre appartenant à un réseau de soutien activant au coeur même de Ksar El-Boukhari pour le compte de M'hamed Houti, chef de zone d'Ouled Antar, entré en dissidence avec Saouane. C'est à la suite de ce coup de filet des services de sécurité que les neuf autres membres du noyau de Ksar El-Boukhari prendront le maquis d'Ouled Antar où Houti préparait sa progression vers Mongorno avec, dit-on, l'apport du groupuscule de Moudjbeur dirigé par un certain Rokia, un criminel ayant fait partie de l'équipe sauvage de Sayah Attia. L'incursion avortée du Vieux-Ksar, la bombe désamorcée au CEM de Zobra ont mis sur le devant de la scène sécuritaire les noms de Ali Aïssaoui dit «Kesgan» (ancien chef de zone du quartier Zaouïa), de Moumène et de huit autres éléments tous originaires de Ksar El-Boukhari. Selon d'autres sources, le groupe en question planifiait ses attentats loin de cette ville considérée comme leur base arrière, car offrant gîte et logistique. Les deux bombes de Gouïa ayant coûté la vie à trois militaires et les deux policiers assassinés récemment à Tahtouh (centre de Médéa) peuvent constituer des indices à cette pénétration dans des zones qui ont échappé jusque-là à l'émir Saouane qui aurait récupéré les acolytes de Houti. En témoigne l'affichage d'un communiqué signé par Hassan Hattab, et appelant au recrutement, moyennant la somme de deux millions de centimes. Du moins, c'est ce que rapportent les citoyens de Ksar El-Boukhari. Katiba El-Khadra a substitué à son acien système linéaire, une tactique nouvelle qui sera «nucléaire». S'agit-il d'un recrutement d'individus insoupçonnables et inconnus des fichiers des services de sécurité? Sont-ce des exécutants au nombre très restreint (2 à 3 personnes) qui ne se rencontrent physiquement qu'à l'occasion d'un attentat terroriste de manière à ce que, si une tête tombe, celle-ci n'entraînerait pas l'écroulement du noyau central? Ces interrogations demeurent entières.