«L'Amérique, c'est comme un grand transatlantique, ce n'est pas un hors-bord, ça ne change pas de direction instantanément.» Barack Hussein Obama, Président des Etats-Unis d'Amérique 20 janvier 2009, Barack Hussein Obama prend les rênes du pouvoir. Barack Obama atteint cette étape symbolique des 100 premiers jours de sa présidence. Le nouveau chef de la Maison-Blanche maintient une cadence énergique dans la promotion de ses nombreux projets et la gestion d'épineux dossiers. Cette seule liste des principales têtes de chapitre donne le vertige. Relance de l'économie, du secteur financier, de l'industrie de l'automobile, développement des nouvelles énergies, virage climatique, rétablissement du leadership américain dans le monde, fermeture de Guantanamo, interdiction de la torture, guerres en Irak et en Afghanistan, poudrière pakistanaise, menace iranienne, relance du processus de paix au Proche-Orient et assouplissement face à Cuba. Malgré ses réticences, va-t-il devoir accepter une enquête publique ou du Congrès sur les atteintes aux libertés de l'administration Bush au nom de la lutte au terrorisme? Sa jeunesse, son dynamisme et son éloquence continuent de séduire une majorité d'Américains. Il est aussi actuellement l'homme politique le plus populaire de la planète. Quelques repères sur la situation des Etats-Unis à la veille de l'ère Obama. La situation économique américaine est la pire que les Etats-Unis aient connue depuis les années trente. A l'été 2007, une crise financière a affecté le marché de l'immobilier et provoqué son retournement. La crise n'est toutefois pas restée circonscrite à la sphère financière et immobilière, elle a également contaminé les autres secteurs de l'économie réelle. L'emploi industriel, hors technologies de l'information, a fortement régressé (moins de 8% des emplois contre 11% en 1996). L'industrie automobile a été tout particulièrement frappée par cette crise. Obama consent à aider ces entreprises si elles s'engagent à réduire la consommation d'essence des voitures. Aujourd'hui, les prévisions de la croissance sont négatives. Le Congressional Budget Office (CBO) a publié, début janvier 2009, sa dernière étude prospective sur l'activité économique qui estime que «la production économique au cours des deux prochaines années sera en moyenne de 6,8% en dessous de son potentiel, ce qui se traduit par une baisse de production de 2100 milliards de dollars». L'économie américaine se caractérise également par un niveau élevé d'endettement vis-à-vis de l'étranger. Le déficit budgétaire (1752 Mds USD en 2009) provoque un besoin de financement extérieur auquel ont jusqu'à maintenant répondu principalement les banques centrales des pays asiatiques (Japon, Chine, Corée du Sud) en acquérant des titres américains (le Japon en détient plus de 800 milliards, la Chine 242 milliards) grâce aux excédents dégagés du commerce avec les Etats-Unis. Un style particulier L'Administration Obama a élaboré et fait adopter un second plan de relance par le Congrès américain (American Recovery and Reinvestment Act) d'un montant de 787 Mds USD en février 2009. Ce «stimulus plan», qui devrait mobiliser 75% de ses ressources sous 18 mois, comporte trois axes prioritaires: réduction d'impôts pour les ménages (38%), dépenses sociales (38%) et dépenses d'investissement (24%). L'Administration démocrate ambitionne avec ce dispositif de créer ou sauver 3,5 millions d'emplois, d'apporter un soutien aux programmes sociaux pour aider les plus pauvres, d'injecter des ressources dans l'économie et d'investir dans l'économie du futur. Il a fait preuve de leadership sur les grandes questions et, à 47 ans, d'une maturité dont on ne le soupçonnait pas nécessairement. Ses partisans ne cachent pas leur admiration. ´´Je pense que ce qui s'est produit avec Obama, c'est que, comme durant la campagne, beaucoup de gens ont sous-estimé qu'il était un grand leader´´, a confié le représentant démocrate Elijah Cummings à la chaîne Msnbc. ´´On peut constater qu'il a adopté un nouveau ton et obtenu certaines choses significatives. Mais ce que ne disent pas les 100 premiers jours, c'est le cours que prendra le reste de sa présidence´´, souligne Larry Sabato, professeur de sciences politiques à l'université de Virginie. Les 100 jours d'un président sont toujours une étape artificielle. Mais c'est aussi une période lors de laquelle il dispose de la meilleure occasion d'utiliser à bon escient le capital sympathie et l'ascendant politique acquis grâce à sa victoire électorale. Ignorant les critiques lui reprochant de s'attaquer à trop de dossiers à la fois, Obama a entrepris de réviser le système de santé national, de s'atteler au problème du réchauffement climatique et d'améliorer le système éducatif, les présentant comme des volets indissociables de la reprise. ´´Sa capacité de succès au-delà des 100 jours dépendra très lourdement du succès de ce qu'il aura obtenu durant ses premiers 100 jours´´, déclare David Rohde, professeur de sciences politiques à l'université de Duke. Franklin Roosevelt avait montré l'exemple en 1933 en mettant en place durant ses 100 premiers jours les fondements de son New Deal qui devait sortir le pays de la Grande Dépression. Ce qui distingue les 100 jours d'Obama, c'est son effort pour ne pas se limiter à la récession mais à tout une gamme d'autres problèmes. ´´Si j'avais à choisir un mot pour décrire ses 100 jours, je dirais ´´créatifs´´ (...) Il a vraiment tenté de faire un nombre incroyable de choses´´, s'enthousiasme Stephen Hess, professeur à l'université de Washington. Barack Obama a utilisé ses 100 premiers jours à la Maison-Blanche pour imprimer son style présidentiel. A en juger par sa cote de popularité, son état de grâce auprès de l'opinion perdure. Selon un sondage d'ABC News et du Washington Post, le président américain Barack Obama bénéficie, après les premiers cent jours de son mandat, d'opinions plus positives que ses prédécesseurs depuis vingt ans. 69% des Américains approuvent son action, ce qui représente le meilleur score en deux décennies. Toutefois, son action est approuvée par 93% des Démocrates et seulement 36% des Républicains, 50% des Américains pensent que leur pays est sur la bonne voie, contre 19% avant l'investiture d'Obama. En rupture avec Bush, Obama a aussitôt interdit la torture, fermé les sites clandestins de détention de la CIA et annoncé la fermeture de Guantanamo. Mais il ne se montre pas pressé d'abroger la loi sur les écoutes ou le Patriot Act et, tout en laissant son département de la Justice publier des mémos accablants pour l'Administration antérieure, il s'oppose à toute poursuite contre les agents de la CIA. Il veut recentrer la guerre contre le terrorisme en Afghanistan Justin Vaisse, chercheur à la Brookings Institution, dresse un premier bilan de la politique étrangère de Barack Obama, 100 jours après son investiture. Une politique dont «les marques de fabrique revendiquées par Obama sont le pragmatisme et le réalisme». Une nouvelle approche qui ne garantit toutefois pas des résultats positifs. En ce qui concerne la politique étrangère américaine, Barack Obama a multiplié les annonces et les gestes politiques. Le 22 janvier, deux jours seulement après son investiture, le nouveau président signe un décret ordonnant la fermeture du centre de détention de Guantanamo Bay dans un délai d'un an. Le 27 février, Obama annonce que toutes les unités de combat américaines déployées en Irak seront retirées d'ici au 31 août 2010 et que tous les soldats américains devront avoir quitté l'Irak avant le 31 décembre 2011. Le 19 mars, le président adresse un long message télévisé aux dirigeants et au peuple iraniens. Le 1er avril, en marge du sommet du G20, Obama conclut avec son homologue russe, Dmitri Medvedev, un accord pour une reprise des négociations Start sur le désarmement stratégique. Quatre jours plus tard, lors d'un discours prononcé à Prague dans le cadre d'un sommet de l'OTAN, il réaffirme sa volonté de réduire l'arsenal nucléaire américain, ajoutant que son pays, sur ce plan, doit servir d'exemple. Le lendemain, à Ankara, il déclare que «les Etats-Unis ne sont pas en guerre contre les musulmans». Enfin, le 17 avril, lors du sommet des Amériques, Barack Obama serre la main d'Hugo Chavez. Quelques jours plus tôt, sur le dossier cubain, il avait appelé à un nouveau départ et annoncé un assouplissement des restrictions de voyages et de transfert d'argent à Cuba pour les Américains d'origine cubaine.(1) «S'il est difficile de mettre en oeuvre la nouvelle approche, qui représente un défi de premier ordre pour Barack Obama, Justin Vaisse estime néanmoins que le président américain "ne s'arrêtera pas à ces quelques revers initiaux. Il faut se souvenir que la question iranienne est centrale: elle a des retombées sur le dossier israélo-palestinien, le dossier libanais, l'Irak, l'Afghanistan, et les relations Etats-Unis-Russie, à travers le projet de bouclier antimissile en Europe de l'Est". Dans ce contexte, "je ne crois pas qu'Obama se soit trop engagé, je crois qu'il va persévérer et explorer sérieusement l'option d'une issue négociée sur le nucléaire iranien. Mais là encore, le succès n'est nullement garanti". L'autre gros dossier moyen-oriental inscrit dans l'agenda de Barack Obama est la question israélo-palestinienne. George Mitchell, son émissaire spécial, a déjà effectué, durant ces 100 jours, trois visites au Proche-Orient. Visites au cours desquelles M.Mitchell a souhaité que l'initiative de paix arabe soit prise en compte dans les efforts de paix et a rappelé le soutien du président au principe d'un Etat palestinien indépendant».(1) Justement, la venue au pouvoir de l'extrême droite en Israël compromet sérieusement les chances de paix d'autant que Netanyahou impose aux Palestiniens de reconnaître Israël comme un Etat juif, cela veut dire d'abord qu'Israël se veut raciste mais plus grave encore, que les Arabes israéliens ont vocation à être expulsés d'Israël. Où vont-ils aller dans la prison à ciel ouvert de Ghaza? augmenter la diaspora qui, on l'aura compris, «n'a plus de droit au retour» pendant que l'Aipac, lobby juif américain, paie des milliers de dollars à tous les Juifs de la Terre qui veulent bien faire leur «Alya» en Israël! On comprend que Mahmoud Abbas ait refusé ce marché pour le moment...De plus, Israël vient de poser encore comme à l'accoutumée de nouvelles conditions: il ne veut rien faire tant que le problème du nucléaire iranien n'est pas réglé dans le sens où il l'entend. Justement, le lobby juif aux Etats-Unis s'est opposé à la nomination d'une personnalité «favorable» aux Arabes. Obama a reculé... Du côté de l'énergie et malgré l'annonce d'un plan de 150 milliards de dollars pour les énergies vertes, il semble pour le chef du GIEC que cela ne soit pas suffisant. Si le monde doit réagir à la menace climatique, le président élu américain doit renforcer les objectifs de son pays en matière d'émissions. Les objectifs du président élu, M.Obama, en matière de réduction des émissions aux niveaux de 1990 d'ici à 2020, ne répondent pas aux mesures dont ont besoin les dirigeants mondiaux pour relever le défi de réduire les émissions à des niveaux qui nous épargneront les pires effets du changement climatique. C'est ce qu'a indiqué le Dr Rajendra Pachauri, président du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), au cours d'un événement du Worldwatch Institute. Il appelle les Etats-Unis, un pollueur majeur, à assumer le leadership en adoptant des législations nationales sur le climat et en s'engageant avec la communauté internationale pour parvenir à un nouvel accord sur l'interruption des émissions lors des prochains débats qui auront lieu à Copenhague en décembre. Et les Arabes? Que peut-on dire nous les déshérités? La patrie de George Washington et d'Abraham Lincoln, de Neil Armstrong, devrait être convaincue qu'au-delà de la tentation d'empire - elle en a les moyens -qu'elle a un magistère moral sur le mouvement du monde. L'Amérique reste pour beaucoup, le Fort Knox de la morale et du sentiment religieux. Le problème est que la perception du monde arabe et du monde musulman n'est perçue dans les médias américains, par une propagande bien élaborée, comme une incarnation du mal, de la terreur. Il y a, comme dans toute religion, des extrêmes. Souvenons-nous du kherem biblique qui vise l'extermination de tout ce qui n'est pas juif, Souvenons-nous de l'Inquisition, des Saint-Barthélémy à répétition. Toutes les sociétés humaines, dans leurs dimensions laïque ou religieuse, ont connu ces extrêmes. «Le problème des peuples arabes, disions-nous dans une contribution précédente, mal gouvernés par des potentats sans réelle dimension, est qu'ils aspirent à un mieux-être, à la démocratie, à l'alternance au pouvoir, à l'éducation, bref, à la promotion et à l'émergence de sociétés fascinées par l'avenir, mais qu'ils refusent de lâcher leur identité ou leur repère religieux. Le problème est que, les masses arabes sont constamment humiliées par la politique qui prévaut au Moyen-Orient. L'Irak avait inversé le destin de l'Empire américain, en l'attirant dans un bourbier qui a affaibli sa position partout ailleurs. Mais les tentatives de faire de l'Afghanistan, puis de l'Irak, des démonstrations de l'invincibilité militaire des Etats-Unis se sont terminées par le résultat exactement inverse et ont mis en exergue les limites de cette puissance militaire.»(2) On dit souvent que la politique américaine est devenue plus agressive depuis qu'ils ont dépassé le peak oil, date du début de la dépendance du pétrole extérieur, prévu par King Hubbert. De ce fait, ils doivent s'assurer des sources d'approvisionnement sûres et pérennes, au besoin, par la force. On remarque que les dizaines de bases américaines ne sont pas loin des routes du pétrole... Est-ce que l'Amérique ce n'est que cela? Non, il y a autre chose. Le bourbier irakien est une leçon pour tout le monde, la crise iranienne ne doit pas mener le monde à l'irréparable. ´´La destinée des Etats-Unis sera véritablement «manifeste»´´ si elle arrivait à conjurer ses vieux démons et à offrir au monde une alternative à cette panne d'espérance. (*) Ecole nationale polytechnique 1.Emilie Sueur 27/04/2009 http://www.lorientlejour.com/article/616114/ 2.C.E.Chitour: De l'«american way of life» à l'«american way of war». Mille babords 14/03/2007