Au moment où le pays connaît une flambée de violence, le n° 2 du Fis est souvent cité. Pourquoi? Dans un communiqué signé par Ali Djeddi et Kamel Guemazi, ce qui reste de la direction de l'ex-FIS (Boukhemkhem a été l'auteur d'un communiqué semblable, il y a quelques jours) demande, «pour le bien de tous, et comme un gage de bonne volonté pour une sortie de crise», la libération de Ali Benhadj et la levée des restrictions sur Abassi Madani. Les leaders du parti dissous semblent répondre à la déclaration faite par le général de corps d'armée, Mohamed Lamari, à un média étranger, et dans laquelle il motive la non-libération des deux leaders du parti par le danger qu'ils encourent face à la menace des GIA qui tenteront, «à coup sûr», de les assassiner. Le général-major Mohamed Lamari, qui multiplie, ces derniers temps, les sorties et les déclarations, garde toujours son ton mesuré et circonspect, mais se prête aussi, de par ses propos, à des lectures diverses. Car n'oublions pas qu'il reste le principal responsable concerné par cette guerre d'usure contre le terrorisme et, à la lumière des dernières recrudescences de la violence terroriste, en milieu urbain notamment, qu'il doit absolument apporter les correctifs nécessaires à la stratégie de la lutte antiterroriste. Le secrétaire général du MDS, El-Hachemi Cherif, estime, quant à lui, qu'«il faut réviser le procès de Ali Benhadj», car «la direction du Front islamique du salut est responsable de la mort de 200 000 Algériens». «Réviser», dans l'optique du leader du MDS, correspond à une augmentation de la durée de peine à purger, ou quelque chose dans le genre, c'est-à-dire la confiscation définitive de toutes les libertés dont peut jouir l'enfant terrible de l'ex-FIS dans moins d'un an. Le leader du MDS représente certainement un courant d'idées bien implanté dans le pouvoir décisionnel, mais qui reste minoritaire. Le courant éradicateur a essuyé, dès 1992, les plus cuisants échecs qui peuvent exister, mais ses tenants persistent à revenir à la charge, à chaque flambée de violence, et à chaque occasion qui s'y prête, avec un langage mis au goût du jour. La 58e session des droits de l'Homme de l'ONU avait justement sévèrement critiqué la détention de Abassi Madani et de Ali Benhadj, allant jusqu'à la qualifier d'«arbitraire», et la mettant en flagrante non-conformité avec les textes de lois qui régissent pareils cas de figure. En fait, l'année qui reste à purger sera un véritable casse-tête autant pour Ali Benhadj lui-même que pour ceux chargés de le gérer. Il est, d'ores et déjà, établi qu'il n'aura pas sa pleine liberté pour haranguer encore ses foules, car cet «illuminé» peut encore séduire par ses prêches inénarrables, et rameuter des milliers de jeunes radicaux des quartiers déshérités et des zones néo-urbaines de la périphérie de la capitale. Les douze années de détention de Benhadj expireront en juin 2003, et il est très peu probable que les autorités du pays prendront le risque de prolonger sa peine. Un «deal» devrait être trouvé. Lequel? Les supputations les plus fantaisistes ont été avancées. La plus vraisemblable, sans doute, est certainement celle qui consiste à le libérer avant l'expiration de sa peine, et pouvoir ainsi conditionner sa libération. Le dernier des irréductibles des leaders islamistes fait peur. Politiquement, il n'est pas un interlocuteur fiable. Les revendications théologico-politiques qu'il avance sont un discrédit jeté à la face du monde moderne. Manipulable, il l'est par beaucoup. Et non pas uniquement par les islamistes.