La cour d'arbitrage internationale tranche aujourd'hui sur les frontières de la région pétrolifère soudanaise d'Abyei, convoitée par le gouvernement et l'ex-rébellion sudiste. L'ONU craint de nouvelles violences après les heurts meurtriers de 2008 qui ont émaillé cette région convoitée par Khartoum et l'ex rébellion soudanaise du Sud. Pour préserver le calme après la décision des juges de La Haye, des soldats de la paix supplémentaires ont été déployés dans ce secteur à la limite entre le Nord musulman et le Sud majoritairement chrétien ou animiste. En mai 2008, la ville d'Abyei avait été rasée lors de heurts qui ont fait une centaine de morts et obligé des milliers de personnes à fuir. Ces violences avaient été considérées comme la menace la plus grave à l'accord de paix global (CPA) de 2005 entre le gouvernement de Khartoum et les anciens rebelles sudistes du Mouvement de libération du peuple du Soudan (SPLM), qui avait mis fin à une guerre civile de 20 ans, la plus longue d'Afrique. Dans un rapport publié le 14 juillet, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon avertissait que la situation à Abyei «reste explosive et requiert une attention constante». «Le passé a montré que les conflits concernant le statut d'Abyei et les conflits entre les communautés locales pouvaient créer une instabilité qui pourrait se traduire par une escalade majeure», avait-il dit. Après les affrontements de mai 2008, le Nord et le Sud du Soudan avaient chargé la Cour permanente d'arbitrage de La Haye de trancher leur différend. Le tribunal d'arbitrage sur Abyei, nommé par la Cour, doit déterminer si la commission soudanaise qui a dessiné les frontières de cette région a outrepassé son mandat. Si la commission a respecté son mandat, les frontières qu'elle a déterminées prévaudront. Mais si elle l'a outrepassé, le tribunal de La Haye pourra lui-même redessiner les contours d'Abyei. L'enjeu est de taille. Aux termes du CPA, la population d'Abyei doit dire lors d'un référendum en 2011 si elle veut garder son statut spécial au sein du Nord ou si elle veut rejoindre le Sud, lequel tiendra au même moment un référendum sur son indépendance. Beaucoup au Sud-Soudan espèrent un «oui» au vote sur l'indépendance et souhaitent ramener dans le giron sudiste la plus grande surface possible des terres pétrolifères d'Abyei. Le Nord, lui, ne veut pas perdre le contrôle de ces précieuses ressources. Le représentant spécial de l'ONU, Ashraf Qazi, s'est dit lundi «complètement convaincu» que les dirigeants des deux côtés étaient attachés «à une mise en oeuvre pacifique de la décision sur Abyei, qu'ils en soient complètement satisfaits ou pas». Mais il a aussi ajouté que des renforts avaient été envoyés dans le secteur au cas où des heurts se produiraient une fois le jugement rendu. «Nous nous sommes engagés à respecter l'arbitrage et nous allons accepter le jugement», a affirmé Ghazi Salaheddine, du Congrès national, le parti du président Omar El-Bechir. Pour sa part, Malik Agar, du SPLM, le parti à la tête du gouvernement du Sud semi-autonome, a estimé qu'il fallait s'attendre à des violences mais qu'aucune des deux parties ne permettrait qu'elles dégénèrent. «La décision n'ira bien entendu pas sans une déception pour l'une des deux parties, a-t-il dit. Nous nous attendons à ce que des violences puissent avoir lieu, mais les deux parties sont prêtes à étouffer toute violence». M.Qazi a affirmé lundi soir que des groupes armés étaient en train de se retirer d'Abyei. Les seules forces de sécurité mandatées dans la région d'Abyei sont les patrouilles militaires et policières mixtes, nordistes et sudistes.