Les trois mois qui ont suivi l'accession au pouvoir, début mai, du charismatique leader zoulou l'ont mis à l'épreuve sans délai. Le président sud-africain Jacob Zuma a imprimé sa marque d'homme du peuple lors de ses premiers 100 jours à la tête de la plus grande puissance économique du continent, mais la bataille face à la récession qui fait s'écrouler ses promesses de lutte contre la pauvreté. Les trois mois qui ont suivi l'accession au pouvoir, début mai, du charismatique leader zoulou l'ont mis à l'épreuve sans délai. Alors que l'Afrique du Sud est entrée en récession pour la première fois depuis 17 ans, les manifestations parfois violentes se sont succédé dans les quartiers pauvres lassés de l'absence de services publics ou dans les centre-villes pris en otages par les employés municipaux en grève. «Ces 100 jours ont été 100 jours d'enfer», résume l'analyste politique Susan Booysen, de l'Université Witswatersrand à Johannesburg. Mais, à l'opposé de son prédécesseur Thabo Mbeki caricaturé comme une autruche se cachant la tête dans le sable, Jacob Zuma reconnaît les problèmes et n'hésite pas à aller à la rencontre de ses plus féroces critiques. Il «reconnaît qu'il y a une crise et avertit que tout (ce qu'il avait promis pendant la campagne électorale) ne pourra pas être réalisé, une attitude accueillie favorablement» par la population, souligne Mme Booysen. Jacob Zuma avait fait miroiter la création de 500.000 emplois d'ici la fin 2009, dans un pays où près de 40% de la population active est au chômage selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et renvoie aujourd'hui à décembre pour faire le point sur la situation. Quelque 270.000 emplois ont été supprimés depuis le début de l'année, sous l'impact de la crise économique mondiale. La lutte contre la pauvreté, alors que 43% des 49 millions de Sud-Africains vivent toujours avec moins de deux dollars par jour quinze ans après la chute du régime ségrégationniste, ne s'est en outre pas encore traduite en mesures concrètes. La différence pour l'instant par rapport à Thabo Mbeki est dans l'attitude. Jacob Zuma, 67 ans, s'implique personnellement. Cette semaine, il a surpris les habitants d'un des plus pauvres townships du pays en leur rendant visite sans se faire annoncer, trouvant le maire chez lui en pleine journée. «J'ai vraiment compris la colère et la frustration, j'ai vu qu'il n'y avait ni école, ni clinique», a-t-il déclaré plus tard. «Je ne me contenterai pas de recevoir des rapports de mes ministres», a-t-il prévenu. Et d'annoncer la création d'un groupe ministériel pour s'atteler à la «mauvaise gestion» dans les municipalités, les «fraudes et la corruption» qui entravent les efforts de l'Etat. La veille de cette visite impromptue, le ministre du Logement Tokyo Sexwale, un homme d'affaires multimillionnaire, avait passé une froide nuit de l'hiver austral dans une baraque d'un autre township. Selon l'analyste Dirk Kotze, de l'Université d'Afrique du Sud, Jacob Zuma s'inspire dans son mode de gouvernement du héros de la lutte anti-apartheid Nelson Mandela, premier président noir du pays, en allant à la rencontre du peuple tout en «déléguant» à des ministères puissants. Avant les élections générales du 22 avril, les critiques dénonçaient les tendances populistes du tribun zoulou et affirmaient qu'il s'était lié les mains en misant sur la gauche et les syndicats pour accéder au pouvoir suprême. Mais il a formé un gouvernement ouvert à l'opposition et n'a jusqu'à présent pas cédé devant la pression de la rue, remarque Dirk Kotze. «En dépit de tous les scénarios catastrophes, il semble que le nouveau gouvernement soit en mesure d'assumer.»