On le dit en perte de vitesse et même sur la voie de l'implosion, mais l'ANC (African National Congress) entend demeurer le premier parti d'Afrique du Sud. Le pari n'est pas aisé, mais lui entend donner la preuve lors des prochaines élections générales dans ce pays toujours marqué par ailleurs par de profondes divisions et autant d'écarts. Ces frictions sont apparues lors du procès pour corruption de Jacob Zuma devenu le plus sérieux prétendant à la tête de l'Etat sud-africain avant qu'il ne devienne président de l'ANC au pouvoir depuis 1994. En ce sens, l'automne fut véritablement agité puisque le président en exercice, Thabo Mbeki, a été contraint de remettre sa démission, alors que son mandat expire justement ce printemps. Dans cette perspective, des milliers de supporters de l'ANC ont assisté, hier, à East London, au lancement de la campagne électorale de l'ANC pour un scrutin crucial. Un des porte-parole du parti Brian Sokutu attend jusqu'à 500 000 personnes venues de tout le pays, dans et aux abords du stade. « Toute la ville d'East London est peinte en jaune, noir et vert (les couleurs de l'ANC) et il y a une mer de t-shirts jaunes, les gens chantent », a-t-il précisé. Après la diffusion d'un message de Nelson Mandela, le leader du parti, Jacob Zuma, présentera en milieu de journée le programme de son parti pour les prochaines élections générales, perçues comme le scrutin le plus important depuis la fin de l'apartheid en 1994. Le chef du parti, Jacob Zuma, a été clair lors d'un dîner de gala organisé pour le lancement du programme et le 97e anniversaire du parti. « Nous pouvons nous attendre à ce que cette campagne soit musclée et intéressante », a poursuivi le favori à la présidence. Ultra-majoritaire depuis quinze ans, l'ancien parti de la lutte anti-apartheid se voit confronté pour ces élections générales, prévues au second trimestre 2009, à une scission de plusieurs personnalités de premier plan. Cette dissidence, qui a débouché mi-décembre sur la création du Congrès du peuple (Cope), est le fruit d'une lutte interne entre MM. Zuma et l'ancien président Thabo Mbeki. Le Cope organisait également, hier, un meeting dans la province du Kwazulu Natal, d'où est originaire le tribun zoulou Jacob Zuma. Pour la première fois depuis 1994, l'ANC fait face à une compétition sérieuse puisque certains élus ANC ont basculé dans le camp des dissidents. Ces derniers, dont les meetings sont régulièrement perturbés par des fidèles de l'ANC, ont de fortes chances d'écorner la suprématie de l'ANC aux prochaines élections, selon des analystes. L'Eastern Cape, « c'est le cœur de l'ANC (...). Nous sommes ici pour détruire la rumeur selon laquelle la base militante de l'ANC dans cette région a été effritée », a déclaré cette semaine le ministre des Transports, Jeff Radebe. « Nous sommes sur la bonne voie pour remporter les élections avec une victoire écrasante », a-t-il ajouté. Le chef de l'ANC lancera ensuite son programme électoral, « produit de 15 années d'expérience » avec comme priorités la création d'emplois décents, l'éducation, la santé, la criminalité, le développement rural, la réforme agraire et la jeunesse. Première puissance économique du continent, l'Afrique du Sud a enregistré une croissance forte ces dernières années, mais 43% de sa population vit toujours sous le seuil de pauvreté et le chômage touche deux adultes sur cinq. « Le programme électoral 2009 (...) est le pilier central de notre programme d'action gouvernementale pour les cinq prochaines années », a souligné M. Zuma vendredi soir. « Il va montrer que nous nous sommes développés et avons grandi en tant que parti au sein d'un gouvernement, que nous comprenons les défis de la gouvernance », a-t-il assuré. Il lui reste à effacer ces tristes images de Sud-Africains faisant la chasse aux immigrés essentiellement zimbabwéens, comme si ces derniers étaient la cause de leurs malheurs. Autant de malheurs que la puissante Afrique du Sud n'est pas arrivée à résorber.