Eminemment symbolique et exigé par le camp du président Laurent Gbagbo, le désarmement des ex-rebelles était censé s'achever au plus tard deux mois avant le scrutin. Désarmement difficile, épineuse question des grades: l'avenir des ex-rebelles ivoiriens pèse sur l'élection présidentielle du 29 novembre, censée clore la crise politico-militaire née du coup d'Etat manqué de 2002. Signé fin 2008, le dernier accord de paix entendait régler définitivement les «questions militaires» restées ouvertes malgré les textes précédents. Cependant, près de sept ans après la tentative de putsch de l'ancienne rébellion des Forces nouvelles (FN), la normalisation sécuritaire se fait toujours attendre, entre un nord contrôlé par les FN et un sud contrôlé par les loyalistes. Eminemment symbolique et exigé par le camp du président Laurent Gbagbo, le désarmement des ex-rebelles était censé s'achever au plus tard deux mois avant le scrutin. Mais le ministre de la Défense Michel Amani N'Guessan a averti la semaine dernière que la disposition principale du processus, l'encasernement de 5000 ex-combattants FN destinés à la future armée réunifiée, ne commencerait que fin septembre. Ce regroupement devrait être bouclé «d'ici début novembre», a-t-il indiqué, invoquant des difficultés matérielles et financières. Le déploiement de brigades mixtes de police et de gendarmerie, censées comprendre 4000 autres ex-rebelles et le même nombre d'éléments loyalistes afin de sécuriser le processus électoral, prend aussi du retard. Mardi, le ministre a installé les deux premières unités à Bouaké (Centre), fief de l'ancienne rébellion de Guillaume Soro, Premier ministre depuis 2007 dans le cadre du processus de paix. Mais aucune précision n'a été donnée sur la suite du déploiement, prévu pour s'étaler jusqu'au 29 novembre. Si les problèmes matériels et financiers existent, cette étape bute aussi sur l'exigence des FN de voir reconnaître à leurs hommes un «statut», et donc un grade légal. Pour que les éléments FN puissent «remplir leur fonction en bonne et due forme, il faut que leur grade soit reconnu», insiste le général Soumaïla Bakayoko, chef d'état-major des Forces armées de Forces nouvelles (FAFN). Un membre de sa hiérarchie militaire évoque une «condition sine qua non». Des milliers d'éléments venus aux FN se sont vus attribuer des «grades Soro». Quant aux quelque 500 officiers et sous-officiers déserteurs à l'époque du coup d'Etat manqué, et amnistiés depuis, certains ont eu des promotions-éclair. Des caporaux ont été propulsés commandants, comme les hommes forts du nord, les fameux «com-zones». Prévu par le dernier accord de paix, le décret reconnaissant aux «com-zones» leur grade, assorti d'une mise à la retraite, n'a toujours pas été signé par le président, pas plus que celui concernant les deux généraux FN, dont le chef d'état-major. Pour statuer sur les quelque 500 officiers et sous-officiers passés à la rébellion, un séminaire technique s'est ouvert la semaine dernière et s'est achevé jeudi soir. Chaque camp s'est dit globalement satisfait des mesures proposées pour «harmoniser» les grades de ces hommes avec ceux de leurs promotionnaires loyalistes, comme le veut l'accord. Mais un délégué du camp présidentiel admet redouter la réaction des soldats loyalistes à la promotion de leurs «frères ennemis» et les revendications qui pourraient suivre. S'agissant des hauts cadres FN comme du gros des troupes, la question des grades est «explosive», souligne un bon connaisseur du dossier: «Soro ne peut pas laisser tomber ses hommes et pour Gbagbo reconnaître les grades des FN est très lourd de conséquences pour l'armée», en termes de budget et d'organisation. La décision finale reviendra aux responsables politiques, a d'ores et déjà prévenu le ministre de la Défense.