L'un des plus vieux conflits africains semble en phase de connaître enfin son issue. Kampala, capitale de l'Ouganda, a été le lieu de la rencontre historique entre le président soudanais Hassan Omar El-Béchir et le charismatique chef de la rébellion du Sud, le colonel John Garang. C'est la première fois que ces deux hommes se ret rouvent face à face pour enfin parler de paix. Le Soudan, qui vit une guerre civile depuis le début des années 80, a, aujourd'hui, surtout besoin de paix. Le président Omar El-Béchir, qui a organisé depuis environ deux années une profonde mutation des structures étatiques du Soudan, semble conscient qu'aucun développement, de l'un des pays les plus arriérés du continent, n'est possible tant que le Soudan traîne cette plaie de la guerre civile. Les rebelles sudistes, pour leur part, sont arrivés à une impasse qui ne sert ni leurs intérêts ni ceux du Soudan. Ces deux évolutions induites par les réalités d'un environnement mondial en constant changement ont rendu ce rendez-vous inéluctable et le dialogue incontournable. C'est à Machakos (Kenya) après plusieurs semaines de négociation, que le pas le plus important a été concrétisé, le 21 juillet, entre les deux parties, lorsque les représentants du gouvernement soudanais et de la rébellion sont arrivés à un accord sur l'autodétermination du Sud, et de la place de l'Islam (le sud du Soudan a une population à majorité chrétienne et animiste, contrairement au Nord arabo-musulman). Cet accord a été salué, notamment, par le président kenyan, Daniel Arap Moi, (qui a supervisé les négociations entre les deux parties), qui y a vu un cadeau qui lui est ainsi offert avant son départ à la retraite. Le protocole d'accord entre le gouvernement de Khartoum et la rébellion sudiste stipule notamment une autonomie pour les provinces du Sud suivie d'un référendum d'autodétermination, qui se tiendra, selon le SPLA (Armée de libération des peuples du Soudan), dans six ans. Durant cette période transitoire (dont les modalités restent à déterminer) c'est le mouvement SPLA qui prendra en charge la gestion du territoire du Sud. Selon l'un des représentants de la rébellion, «le référendum offrira deux options très claires: le Sud demeurera au sein du Soudan, conformément à des dispositions à mettre en place à la reprise des négociations, en août prochain, ou le Sud optera pour la sécession». Ainsi, la population du Sud aura à choisir entre l'indépendance ou rester au sein de l'Etat soudanais. En tout état de cause, cet accord a suscité un immense espoir au Soudan parmi une population quasiment en état de survie. C'est sans doute avec cette réalité à l'esprit que le gouvernement soudanais veut compléter ces bonnes dispositions en parvenant rapidement à un cessez-le-feu avec la rébellion. L'organisation de la rencontre entre le président du Soudan et le chef de la rébellion, une semaine à peine après l'annonce de l'accord de Machakos, atteste de la disponibilité de Khartoum à conclure un deal avec la rébellion et de trouver une solution définitive au contentieux qui met, depuis 1983, le pays à feu et à sang. Ces bonnes dispositions se retrouvent dans le communiqué rendu public à l'issue de la rencontre El-Béchir-Garang, dans lequel il était affirmé que les deux hommes «ont souligné la nécessité de renforcer le processus de paix en lui donnant un soutien populaire et en construisant un consensus national pour un règlement politique d'ensemble». MM.El-Béchir et Garang ont, en outre, assuré, selon le communiqué, que «tous les efforts seront déployés pour résoudre les questions en suspens qui seront discutées dans la prochaine phase des pourparlers de paix». La rencontre entre le président El-Béchir et le colonel Garang ouvre de sérieuses perspectives de paix pour un pays laminé par près de vingt ans de guerre.