M.Mourad Medelci a adressé une lettre de protestation à son homologue français, dans laquelle il condamne le classement de l'Algérie sur la liste noire. Entre la France et l'Algérie, rien ne va plus. Les relations diplomatiques passent par une zone de turbulences. Hier, le ministre des Affaires étrangères, M.Mourad Medelci, a affirmé que le Sommet entre le président, Abdelaziz Bouteflika et Nicolas Sarkozy, annoncé et reporté plusieurs fois, est conditionné au traitement des dossiers en suspens. Les travaux des commissions mixtes installées pour aplanir les points de divergence sur différentes questions ayant trait notamment au passé colonial «n'avancent pas au rythme voulu», a déclaré hier le chef de la diplomatie algérienne sur les ondes de la Chaîne1 de la Radio nationale. L'Algérie souhaiterait des pas concrets de la diplomatie française sur plusieurs questions. Medelci en dévoilera quelques-unes. Il y a tout d'abord la restitution des archives: «Les deux pays ont signé un accord pour la restitution des archives, mais cet engagement n'est pas totalement respecté par la partie française», précise Medelci. Les négociations sur les effets des essais nucléaires français sur la population du Sud algérien, ainsi que celles sur les accords de 1968, souhaitées par la France, sur les questions de l'émigration patinent, reconnaît Medelci. Alger n'est pas pressée de recevoir Kouchner Les relations diplomatiques entre les deux pays ont connu un refroidissement à la suite de plusieurs événements. Parmi les signes de cette tension, l'on retient la réponse négative d'Alger, fin octobre, à une demande de visite officielle du ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, et avant lui, celle du ministre de l'Immigration et de l'Identité nationale, Eric Besson. Le gouvernement algérien n'apprécie pas la critique française concernant sa dernière loi de finances donnant priorité aux «investisseurs nationaux». Les déclarations à chaud du président Sarkozy, avant de se raviser ensuite sur l'affaire des moines de Tibhirine, le flou total dans le traitement du dossier du diplomate algérien Hasseni, ont provoqué de vives réactions des responsables algériens. Sur le plan de la coopération régionale, les réticences de l'Algérie sur le projet de l'UPM ne sont plus à démontrer. L'Algérie ne partage pas les positions de la France sur les dossiers du Proche-Orient et le Soudan. Ces problèmes rendent difficile pour ne pas dire impossible la tenue d'une rencontre entre les présidents des deux pays. Les divergences ont pris une telle ampleur que le ministre des Affaires étrangères français, attendu à Alger en janvier, a reporté sa visite pour le mois de février. M.Medelci souhaite avant cette date une solution à un autre problème qui est venu empoisonner les relations bilatérales et qui se pose depuis quelques semaines. Les nouvelles mesures pour renforcer la sécurité aérienne seraient la goutte qui a fait déborder le vase. La France a décidé de classer l'Algérie dans la liste des pays à risque, et de soumettre ses citoyens à des fouilles indignes au niveau des aéroports. Medelci qui a condamné cette décision, a révélé avoir adressé une lettre de protestation à son homologue français dans laquelle il est dit: «J'ai clairement souligné que ce dispositif constitue une atteinte à la dignité du citoyen algérien». Le 5 janvier, l'ambassadeur français en Algérie fut convoqué par le ministère des Affaires étrangères. Du côté algérien, l'on espère régler ce problème avant l'arrivée de Bernard Kouchner à Alger. Si sur le plan politique les choses se compliquent. M.Medelci affirme qu'il existe une amélioration sur le plan de la coopération institutionnelle, notamment culturelle et scientifique. Medelci s'est longuement étalé sur la menace terroriste dans le monde et les mesures dites «préventives» prises par des capitales occidentales. Bien évidemment, il rebondit sur la liste noire des USA dans laquelle figure l'Algérie, pour relever la contradiction dans le discours des officiels américains. Il estime «paradoxal» le fait de considérer, à la fois, l'Algérie comme un partenaire stratégique dans la lutte contre la menace terroriste, et l'aligner dans la liste des pays qui menacent la sécurité américaine. «Cette décision n'a aucun horizon», précise l'invité de la Chaîne1. C'est, d'ailleurs, le message transmis à l'ambassadeur des Etat-Unis convoqué lundi au ministère des Affaires étrangères. M.Medelci a souhaité que l'Algérie soit rayée rapidement de la fameuse liste. La question sera abordée avec les responsables américains qui se rendront en Algérie dans les semaines qui suivent. Ce dernier annonce la visite du ministre de la Justice, qui sera sanctionnée par des accords de coopération judiciaire et douanière. Séjourneront, aussi à Alger, des hommes d'affaires américains. En dépit du mécontentement officiel, l'Algérie n'a pas l'intention de revoir ses relations avec ses partenaires. M.Medeci a défendu le projet de l'Algérie portant sur la pénalisation du paiement des rançons, soulignant que c'est à travers ces mesures qu'on lutte contre le terrorisme et non par le biais des démarches «inutiles», faisant référence à la liste noire. Abordant les relations algéro-espagnoles, le ministre a affirmé que la coopération est appelée à se renforcer et à s'élargir aux secteurs hors hydrocarbures. S'agissant du Grand Maghreb, il a exprimé le souhait de l'Algérie à traiter les dossiers d'une manière globale loin du conflit sahraoui, pris en charge par les institutions onusiennes. Enfin, M.Medelci s'est dit favorable à la réforme des structures de la Ligue arabe. Pourvu que cette démarche soit accueillie favorablement par les dirigeants politiques.