Les promesses du gouvernement de réguler davantage le marché se font attendre. Le gouvernement ne semble pas pressé de s'attaquer au phénomène de la flambée des prix. Depuis plus d'un mois, il avait annoncé l'adoption d'une nouvelle législation pour protéger le pouvoir d'achat des travailleurs sans que le dispositif ne voie le jour. Le ministre du Commerce, El Hachemi Djaâboub vient juste d'annoncer que la loi sur la concurrence sera modifiée sans citer d'échéance. On sait seulement que les marges bénéficiaires seront limitées. Cela ne doit pas être interprété comme un retour aux prix administrés, précise le ministre. L'Etat ne viserait pas une fixation des prix mais leur contrôle. La liberté des prix demeure un principe inamovible, mais celle-ci ne doit en aucun cas léser le consommateur. Or, tout indique que c'est actuellement le cas. Sur le terrain, les commerçants ne savent plus quel argument brandir pour justifier la hausse des prix. A titre d'exemple, ceux de la volaille ont atteint des pics. Ainsi, de 170 à 200 DA, le prix du poulet vidé est passé à 350 DA le kilogramme. Le prix de l'escalope de dinde est passé allègrement à 500/600 DA le kg, voire plus dans certains quartiers. Les raisons d'une telle envolée des prix, avancées par les vendeurs, ne tiennent plus la route. Pourtant nombre d'entre eux se défendent en accusant les fournisseurs d'être à l'origine de ces prix prohibitifs, assurant qu'une faible marge bénéficiaire leur est consentie. En amont, les aviculteurs mettent l'accent sur le prix de l'aliment. Négocié auparavant entre 4000 et 6000 DA le quintal, l'aliment de volaille a atteint le seuil record de 10.000 DA le quintal. Selon un volailler, cela expliquerait la montée en flèche des prix de détail. Sans parler de la viande, une protéine bien chère pour le citoyen lambda. Cette tendance haussière s'applique à l'ensemble des produits alimentaires. Les produits maraîchers frais ne sont pas à l'écart de cette spirale. Le manque de main-d'oeuvre et l'augmentation des frais de transport sont parmi les arguments invoqués pour justifier cette flambée. Selon des opérateurs économiques, l'application du crédit documentaire gêne considérablement l'approvisionnement du marché depuis l'étranger. Mais ce ne sont pas que les produits importés qui sont chers. Les dattes sont cédées à 300 DA/kg. Le prix grimpe même jusqu'à 800 DA/kg pour Deglet Ennour, comme au marché de Bab Errahba de Blida. Les oranges et mandarines, pourtant fruits de saison, se négocient, quant à elles, à des prix qui dépassent l'entendement et fluctuent actuellement entre 120 et parfois plus de 200 DA/kg. Le prix des légumes secs n'est pas en reste. Les lentilles sont à 190DA/kg, et le ministre du Commerce considère que ce n'est pas encore trop élevé. Haricots secs ou encore les pois chiches semblent s'offrir un statut de luxe. Les commerçants tentent d'expliquer que les prix ont augmenté sur les places internationales. Certains décrient la faiblesse du dinar dont le taux de change n'arrête pas d'augmenter face à la monnaie européenne, zone d'où est importée la majeure partie des intrants pour l'élevage et l'agriculture (engrais, produits phytosanitaires, alimentation du bétail et de la volaille...). Tous ces éléments concourent à la dégradation du pouvoir d'achat des travailleurs. Ils n'arrivent pas à s'approvisionner convenablement en produits alimentaires variés. La population subit durement cette flambée des prix qu'enregistrent les produits de large consommation. Les dispositifs de régulation du marché jouent mal leur rôle quand ils ne sont pas absents. La spéculation et les intermédiaires continuent d'imposer leur loi. C'est dans ce contexte que l'Etat est interpellé pour trouver des mécanismes capables de protéger le consommateur. Nombre de commerçants opèrent illégalement sur le terrain. Permettre aux agriculteurs de commercialiser leur production réduirait certainement les prix à la consommation. En tout cas, pour l'instant, même l'augmentation des salaires n'a pas résolu le problème des prix. C'est pour que cette situation change que les travailleurs sont dans la rue.