«Ils étaient accrochés à des poteaux à proximité du lieu de l'explosion pour étudier le comportement de l'homme lors d'une explosion atomique.» 150 Algériens ont été utilisés comme cobayes lors des essais nucléaires français de Reggane. C'est ce qu'a affirmé la revue El Djeich en revenant sur le sujet. Dans sa première édition pour cette année 2010, la revue a consacré plusieurs pages au dossier intitulé «Essais nucléaires: l'homme cobaye», un sujet abordé sous toutes ses facettes par l'auteur de l'enquête, Ammar Mansouri. Ce chercheur en génie nucléaire est revenu de long en large sur la manière dont les essais ont été conduits par le colonisateur français, usant de vies humaines algériennes et même françaises, pour étudier les réactions face à l'explosion atomique. «C'est lors de ce deuxième essai (Gerboise blanche) que 150 Algériens ont été utilisés comme cobayes» a-t-il soutenu. Et d'ajouter que «différents témoignages se recoupent pour apporter une confirmation irréfutable quant à l'utilisation, par le colonialisme français, de vies algériennes comme cobayes». Ce dernier s'est référé au témoignage du vétéran Peter Hanz. Ce doyen avait déclaré dans un film documentaire que «lors des essais atomiques de Gerboise blanche, du 1er avril 1960, 150 Algériens ont servi de cobayes humains. Ils étaient accrochés à des poteaux à proximité du lieu de l'explosion pour étudier le comportement de l'homme lors d'une explosion atomique». L'auteur de l'article a ensuite commenté: «C'est ainsi que les militaires français ont poussé la barbarie à l'extrême en exposant des prisonniers algériens, des résistants pour la plupart, à environ un kilomètre de l'épicentre.» M.Mansouri est ensuite revenu sur la version de la partie française, quant à ces essais. Cette dernière arguant du fait que «ce sont des mannequins revêtus, ou non, de tenues de protection qui ont été utilisés, et plus fort encore, qu'il n'y avait pas de vies humaines dans la région où les essais ont été réalisés». L'auteur renchérit en notant que «la France est allée jusqu'à affirmer, du haut de la tribune des Nations unies, que les lieux choisis pour les expériences nucléaires au Sahara n'abritaient aucune vie, qu'elle soit humaine, animale, ou végétale, que c'était des régions désertiques et inhabitées». Il est à noter que cet article arrive quelques semaines après l'adoption par le Parlement français du projet de loi sur l'indemnisation des victimes des essais nucléaires effectués par la France en Algérie et dans le Pacifique au cours du XXe siècle. Le texte concerne l'indemnisation des victimes des 210 essais menés en Algérie de 1960 à 1966 et en Polynésie de 1966 à 1996. Environ 150.000 militaires et civils ont travaillé sur ces chantiers, sans compter la population locale. Le ministre de la Défense, Hervé Morin, avait alors expliqué que les premières victimes pourraient être indemnisées «au début de l'année prochaine». Le texte prévoit que «toute personne souffrant d'une maladie radio-induite résultant d'une exposition à des rayonnements ionisants dus aux essais nucléaires français» et inscrite sur une liste fixée par décret du Conseil d'Etat «peut obtenir réparation intégrale de son préjudice» et que «si la personne est décédée, la demande de réparation peut être présentée par ses ayants droit». Néanmoins, les victimes doivent prouver avoir résidé ou séjourné soit entre le 13 février 1960 et le 31 décembre 1967 au Centre saharien des expérimentations militaires, ou entre le 7 novembre 1961 et le 31 décembre 1967 au Centre d'expérimentations militaires des Oasis ou dans les zones périphériques à ces centres, pour pouvoir bénéficier de ces indemnisations. Ainsi, il aura fallu des décennies de lutte pour arriver à un tel résultat d'autant que son interprétation a minima pourrait conduire à n'indemniser que peu de victimes. Ainsi, Paris persiste dans sa logique en tentant de limiter dans le temps et dans l'espace les dégâts provoqués par ses essais nucléaires dans le Sahara algérien.