Dans sa dégaine de cow-boy, frisant la copie de Rachid Taha, pantalon en cuir noir et chapeau vissé sur la tête, Fethi Tabet, paradoxalement, imprégnera l'assistance d'émotion en évoquant son premier amour musical, le hawzi... Décalé pour mercredi, la veille du match Algérie-Egypte, le concert du virtuose algérien Fethi Tabet n'a pas drainé grand- monde mais, néanmoins, a suscité de bonnes vibrations parmi l'assistance. L'artiste enthousiaste et bout-en-train n'a cessé de mettre de l'ambiance au sein du public en interprétant un repertoire issu du music-hall algéro-judéo-chrétien et d'autres morceaux du patrimoine andalou. Nostalgie oblige, cela fait plus de 30 ans que ce Bélabessien n'avait pas remis les pieds dans son pays natal. De Chine, en Inde en passant par l'Afrique, Fethi Tabet transmet de la chaleur là où il passe et assure jouer à chaque fois le répertoire du pays, un peu pour interpeller son public. Ce soir donc, il dira avoir choisi un programme typiquement algérien en revisitant des vieux titres au grand bonheur des familles présentes. Ambiance mariage assurée puisque les youyous n'ont pas cessé d'emplir la salle. Cependant, pas très faite pour ce genre de spectacle. Dans sa dégaine de cow-boy, frisant la copie de Rachid Taha, pantalon en cuir noir et chapeau vissé sur la tête, Fethi Tabet paradoxalement, imbibera l'assistance d'émotion en invoquant son premier amour musical, le hawzi, en se lançant dans un succulent istkhbar. Il fera vibrer ses cordes vocales ainsi sur des airs de Mechayt alya, Ana el warka el meskina ou encore Dour biha yachebani. Fethi Tabet fera même une belle déclaration d'amour en chanson à son oud fétiche par ses jolis mots: «Oh! oud de ma vie, que serais-je sans toi, je n'ai que toi, tu es ma raison d'exister et mon seul horizon..». Véritable ambassadeur de la World Music comme il est présenté par la critique, Fethi Tabet passait d'un registre à l'autre sans sourciller mêlant avec aisance des sonorités diverses et genres musicales de façon incroyable. Ici, la nouba est mêlée à la salsa, du rythme tzigane, et puis il part en vrille avec des poussées de flamenco pour finir sur du laâlaoui et cadence marocaine. A l'image de son terroir natal, l'ouest algérien, sa musique est aussi traversée par les influences française, espagnole, subsaharienne et marocaine qui se côtoyaient de façon notable et même naturelle. Sur des musiques de danse et de fête, les chansons de Fethi Tabet nous ont entraînés aux confins de l'Orient et du Maghreb, mais aussi en Afrique, en Jamaïque et à Cuba. Leurs textes originaux chantés en français et en arabe, ont été servis par des musiciens venus des quatre coins du monde, preuve que la musique est universelle. «Il suffit de se piquer pour voir qu'on a le même sang qui coule dans nos veines. Il ne faut pas tomber dans le piège», allusion faite aussi à la haine entre Arabes et notamment et surtout celle engendrée récemment entre Egyptiens et Algériens plus précisément. Fethi Tabet incarne une nouvelle tendance des musiques populaires actuelles qui privilégie la générosité, le contact avec le public et le rapprochement des cultures. Il en donnera un bel exemple, mercredi dernier, en descendant de scène pour pousser les jeunes gens à quitter leur siège et danser. Ce fut une belle soirée déjantée et bien amusante. Malgré son style décalé, un peu has been, l'artiste enchantera le public!