«Nous nous sommes trompés, nous avons fait fausse route en matière de privatisation et d'investissements», avait déclaré le Président Bouteflika, le 27 juillet 2008. Est-ce la fin d'une «époque»? Depuis une dizaine d'années, l'Algérie s'est distinguée par un modèle de gestion particulier: livrer des projets, voire des mégaprojets aux entreprises étrangères. Ces dernières ont mis la main sur des secteurs d'activité de haute importance. Il s'agit, entre autres, de l'hydraulique, des hydrocarbures, des travaux publics et du transport. Jusque-là, cette politique a coûté à l'Algérie près de 20 milliards de dollars. En 2001, les autorités nationales ont lancé un plan de soutien à la relance économique (Psre). Etalé sur quatre ans, ce plan a mobilisé une enveloppe de 7 milliards de dollars. Un deuxième Psre a été lancé en 2004. Qualifié de «complémentaire», ce plan a engagé une somme avoisinant 10 milliards de dollars. Ce second plan avait pour objectif de combler le déficit en infrastructures de base qu'accuse l'Algérie. Résultat: «Nous nous sommes trompés, nous avons fait fausse route en matière de privatisation et d'investissements», avait déclaré le Président Bouteflika, le 27 juillet 2008. Depuis, une nouvelle page a été ouverte. Cela s'est concrétisé avec les dispositions de la loi de finances complémentaire de 2009. Laquelle loi consacre la souveraineté nationale sur le plan économique. Cette orientation a été confirmée par la loi de finances en cours. Sellal donne l'exemple Dans cette optique, se présente une nouvelle vision: la primauté des sociétés nationales sur les multinationales dans l'octroi des marchés. L'exemple est donné dans le secteur de l'hydraulique. Ainsi, deux entreprises nationales ont bénéficié de projets de réalisation de trois barrages. Pour 5,84 milliards de dinars, Cosider est chargée de construire l'infrastructure de Soubella dans la wilaya de M'sila. Cette entreprise est également engagée pour la construction du barrage de Seklafa à Laghouat. Pour sa part, l'entreprise Hydro-Téchnique est sur le projet de réalisation du barrage de Béni Slimane dans la région de Médéa. Concernant la gestion déléguée de l'eau, les entreprises étrangères en oeuvre en Algérie risquent de perdre pied sur le marché national. Nombre d'entre elles sont sur la corde raide. La cause? Tout simplement, le non-respect des clauses des contrats signés avec les autorités nationales. Sur ce chapitre, la Société des eaux de Marseille (SEM) risque d'être dessaisie de la gestion des eaux de la ville de Constantine. Lundi, elle a reçu une mise en demeure de la part de la Société de l'eau et de l'assainissement de Constantine (Seac). Ainsi, la SEM est tenue de respecter ses engagements contractuels. Désormais, cette dernière doit finaliser ses travaux tous azimuts dans un délai n'excédant pas deux mois. La SEM a décroché ce contrat qui s'étale sur cinq ans et demi pour la somme de 27,8 millions d'euros. Une autre entreprise française est dans le collimateur du département de Abdelmalek Sellal: Suez. «La gestion de la distribution de l'eau dans la capitale s'est beaucoup améliorée (...) En matière de formation et de transfert de technologie, c'est en cours, mais pour ce qui est de l'assainissement, les objectifs n'ont pas encore été atteints», a déclaré le ministre sur les ondes de la Radio nationale, fin décembre précédent. Le vent des enquêtes Ainsi, M.Sellal avait montré son insatisfaction quant aux prestations de Suez. Idem pour Seaal, société française. En conséquence, le ministre a annoncé la tenue d'un audit pour faire le point de la situation. Plus droit à l'erreur. L'inspection du travail et les services de sécurité sont en train de passer au peigne fin la politique de privatisation menée depuis 1993. Ainsi, toutes les procédures de cessation des entreprises publiques seront soumises à un contrôle minutieux. Cela va droit dans le sens des revendications de la classe ouvrière. Demandée par le gouvernement, cette enquête s'inscrit dans le cadre de celles qui touchent les marchés conclus dans le domaine des hydrocarbures. Ces enquêtes ont révélé au grand jour des malversations et autres infractions commises. Cela a abouti au démantèlement d'un réseau constitué de hauts responsables de Sonatrach. L'ambiguïté entoure aussi la cessation de la gestion du port d'Alger à l'entreprise émiratie Dubai Port World. Pour un montant de près de 84 millions d'euros, cette entreprise dispose du plus grand port d'Algérie pour une période de 30 ans. Seulement, le trafic maritime au niveau de cette installation portuaire ne s'est guère amélioré. Le projet de l'autoroute Est-Ouest n'est pas en reste. Pour 11,4 milliards de dollars, ce projet a été attribué à deux groupes asiatiques, le chinois Citic-Crcc et le japonais Cjaal. Mal négocié, le marché nécessite une réévaluation. Annoncée à mainte reprises, la réception de l'autoroute est constamment reportée. Dans toute cette situation, le gouvernement entend enquêter sur les irrégularités entachant les différents marchés conclus dans les différents domaines. Aussi, les autorités entendent consolider la souveraineté nationale sur le plan économique.