Le Parlement européen devaait accorder sa confiance hier, après trois mois de flottement, à la nouvelle Commission européenne de José Manuel Barroso qui va devoir s'atteler sans tarder à relancer la croissance économique. Le vote en début d'après-midi s'annonce sans surprise: malgré les réserves de quelques eurodéputés, l'équipe «Barroso II» devrait être adoubée. Après plusieurs mois de gestion des affaires courantes, en raison du retard dans l'application du traité de Lisbonne puis de la démission en janvier de la candidate bulgare à l'exécutif européen, la Commission devra en priorité s'atteler à relancer la croissance européenne en berne. «Notre situation économique et sociale exige un changement radical», a affirmé hier devant les eurodéputés M.Barroso, qui entame son deuxième mandat de cinq ans. Souvent mis en cause lors du premier mandat pour son immobilisme, le Portugais s'est voulu volontariste. Il a promis des «mesures à court terme pour remettre l'Europe au travail» et promouvoir croissance et emploi. M.Barroso a admis les problèmes actuels de l'Europe. Elle ne compte «pas encore» autant qu'elle le devrait dans le monde, a-t-il dit, insistant sur le besoin de parler «d'une seule voix». En particulier, «si nous voulons renforcer notre base industrielle (...) il faut une coordination économique plus forte», a-t-il estimé, alors que l'idée d'un «gouvernement économique» fait son chemin. Elle sera au centre d'un sommet des dirigeants européens demain à Bruxelles. Reste à voir si la nouvelle équipe de M.Barroso, très critiquée dans le passé pour avoir tardé à réagir face à la crise financière, saura relever le défi. La vice-présidente de la Commission, la Britannique Catherine Ashton, haute représentante pour les Affaires étrangères et «voix de l'Europe», est déjà sur la sellette pour son effacement après le séisme en Haïti. En privé, les Français lui reprochent aussi de ne pas maîtriser la langue de Molière. Comme elle, beaucoup de membres de l'équipe «Barroso II» doivent encore convaincre. «J'ai eu l'impression que c'était l'ordre des trappistes», un ordre religieux où la parole est interdite, et que l'abbé José Manuel a dit à ses novices: «ne dites rien plutôt que de dire des bêtises», a raillé hier le chef de file des eurodéputés socialistes, l'Allemand Martin Schulz, commentant les examens de passage des commissaires en janvier devant le Parlement. Enfin, la Commission risque d'avoir du mal à s'affirmer face aux Etats et au nouveau président de l'UE Herman Van Rompuy qui a commencé à imprimer sa marque en convoquant pour demain le sommet sur la crise. Le président du groupe libéral du Parlement, Guy Verhofstadt, a réclamé «des projets ambitieux» et «que cette nouvelle Commission soit le moteur de l'UE, ce qui n'a pas été le cas ces cinq dernières années». «N'écoutez pas trop les Etats», a-t-il conseillé à M.Barroso, accusé par ses détracteurs d'avoir l'échine trop souple face à Nicolas Sarkozy ou Angela Merkel, et alors que se profile à partir de 2011 une rude bataille sur le futur budget de l'UE. Même constat du chef de file des conservateurs, le Français Joseph Daul. Il souhaite, lui aussi, «une action énergique» car «la voix européenne n'a pas été à ce stade à la hauteur de nos espérances». «Il faut que l'Europe soit forte pour éviter un monde bipolaire», lui a fait écho Martin Schulz. «S'il y a renationalisation (de l'UE) plutôt qu'un projet européen ambitieux, c'est la même chose qu'à Copenhague (sur le climat): les décisions sont prises par Barack Obama et Hu Jintao», les présidents américain et chinois, a-t-il mis en garde.